Images de page
PDF
ePub

part du corps lumineux: Que les preffions plus longues qui font toûjours les plus fortes, donnent les rayons rouges; & les plus courtes, qui font les plus foibles, donnent les rayons violets, & que les preffions intermédiaires donnent les rayons des couleurs intermédiaires qui leur répondent. Il faudroit expliquer encore en vertu de quoi les parties du corps lumineux preffent inégalement les rayons, les unes demeurant plus long-tems appliquées aux rayons qu'elles preffent, les autres s'y appliquant un plus court efpace de tems: Et pour cela il faudroit mettre dans un grand jour la nature des corps lumineux. Mais tout cela demanderoit une Differtation d'une toute autre importance que celle-ci; ainfi je me contenterai de dire ma pensée fans autres éclairciffemens. Je croirois donc volontiers, que les éclairs produits par l'inflammation d'une matiere, où les fouffres dominent, doivent être plus rouges, que lorfque les fels y font en plus grande quantité, & que la differente proportion qui fe trouve entre les quantitez de fouffres, & de fels ou acides, qui forment la matiere du Tonnerre, fait toutes les diffe rences qu'on apperçoit dans les couleurs des éclairs. Outre les raifons claires que j'en donnerois, fi c'étoit ici le lieu d'expliquer mon fyftême fur les couleurs & fur

[ocr errors]

la nature des corps lumineux, j'en trouve une preuve de fait dans l'experience; car le feu des fusées eft d'autant plus rouge & plus foncé qu'il y entre moins de fels & plus de fouffres ; & il eft d'autant plus clair, que les fels y dominent davantage.

30. Il arrive fouvent qu'il fait des éclairs, fans qu'on entende le bruit du Tonnerre; cela doit arriver lorfque la matiere qui s'enflamme eft en petite quantité, & qu'il n'y a pas à l'entour d'autres grands tourbillons qui retardent fa dilatation. C'est ainfi qu'une traînée de poudre s'enflamme fans beaucoup de bruit, parce que fes parties n'étant point refferrées, elles fe diffipent avant d'avoir pû fe mêler à un certain point, & acquerir par ce mélange un reffort allez vif & affez violent, pour comprimer fortement l'air. Mais cela doit arriver encore plus, lorfque les fouffres dominent beaucoup dans la matiere du Tonnerre parce qu'alors fa dilatation n'eft pas af lez brufque & affez prompte pour comprimer l'air au point convenable pour former le fon. Car on fçait que pour la formation du fon, la preffion de l'air doit être extrémement prompte. Ce n'eft pas au refte fans fondement que j'affure, que la dilatation de la matiere du Tonnerre eft moins prompte, lorfque les fouffres y dominent; l'experience nous fait voir, que c'est le mê

lange des fels avec les fouffres qui fait cette promptitude de rarefaction, & qu'elle eft d'autant plus prompte que les fels dominent davantage. Ainfi quand on veut rendre l'action de la poudre à Canon plus lente on y ajoûte du fouffre, & on y ajoûte du nitre pour la rendre plus vive. C'eft que les parties fulphureufes étant plus molles & plus fouples,elles prennent moins de mouvement de la matiere étherée, qui d'ailleurs les traverse trop aifément par leurs pores, pour leur en communiquer la quantité neceffaire à une grande rarefaction. Mais lorsqu'il fe trouve beaucoup de fels mêlez avec les fouffres, outre que l'étherogeneité des parties admet plus de matiere étherée entr'elles à caufe de leur plus grand éloignement reciproque; cette matiere étherée agite beaucoup plus puiffamment les fouffres par le moyen des fels.

C'est par les mêmes raifons qu'en beaucoup d'autres occafions, on voit des exhalaifons s'enflammer fans bruit au milieu des airs. Tels font ces feux qui paroiffent quelquefois dans l'athmofphere, & qu'on a appellé des Etoiles, des Piramides, des Colomnes, des Pouttes, des Dragons des Cheves, felon les diverfes figures qu'ils reprefentoient. Tel eft le feu S. Elme, & les feux follets qui voltigent fouvent dans les Cimetieres,

[ocr errors]

40. On voit quelquefois les nuées lancer de tous côtez des éclairs, dont l'un n'at tend pas l'autre quelquefois éclairer de differens côtez à la fois, enforte que l'air paroît tout en feu. Il est en effet tout en feu, au moins y a-t-il dans toutes les parties de la nuée des tourbillons tous pleins de la matiere du Tonnerre,prêts à s'enflammer fucceffivement ou à la fois, felon le degré de préparation où ils font. Ces tourbillons font plus petits dans ces occafions & le fouffre y domine communément, d'où il arrive qu'alors il ne tonne prefque pas, ou que le bruit que font ces tourbillons en éclatant eft fi petit, qu'il ne peut pas s'entendre à une fi grande distance; fur tout lorfque les tourbillons d'où partent les éclairs ne font pas contigus, & qu'ils font placez à la partie fuperieure d'une nuée fort épaiffe. Car à caufe de leur peu de contiguité, ils doivent faire peu de bruit en éclatant, comme nous l'avons déja remarqué; & ce petit bruit eft encore étouffe avant de venir à nous par la grande quantité de vapeurs, que les rayons de fon, trouvent en chemin, & où ils s'éteignent.

5. On voit des éclairs où il n'y a point de nuées, au moins on l'affure, & bien des gens prétendent en être des témoins ocuLaires. Mais ces éclairs ne paroiffent que

fur l'horifon, ce qui me feroit penfer qu'il y a des nuées au-deffous qui lancent ces éclairs, & qu'ils font réfléchis vers nous par les vapeurs & les exhalaisons, que ces rayons de lumiere vont rencontrer dans l'air. La fameufe Montagne des Sorciers, dont parle Kirker, * au-deffus de laquelle on voyoit de loin dans les airs de belles Prairies, des Guerets, des Châteaux, des grands troupeaux qui paiffoient, & les experiences que fit cet Auteur, pour prouver qu'on ne voyoit ainfi tous ces objets que par des rayons refléchis par les exhalaifons qui regnoient au-deffus de la Montagne nous doivent faire comprendre, que les éclairs fortis des nuées cachées fous l'horifon, peuvent nous être renvoyez par les exhalaifons dont l'horifon eft toûjours couyert. Certainement on n'a pas des preuves du contraire, & la chofe paroît plus que vrai femblable. Ce n'eft pas qu'il ne puiffe quelquefois faire des éclairs fans qu'il y ait de nuée fenfible,par la fubite inflammation de quelques exhalaifons qui font en trop petite quantité pour obfcurcir fenfiblement l'air. Mais cela n'arrive auffi fréquemment, que le peuple toûjours précipité dans fes Jugemens croit voir de ces éclairs où il n'y a point de nuées, &

Mundus fubt.

pas

I

« PrécédentContinuer »