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binaison de la réunion de l'Assemblée à Tours, mais il insiste pour que la garnison de Strasbourg soit rendue prisonnière. >>

Je touchais au terme. Mon rôle était fini, et la force m'abandonnait. Je me levai vivement, un nuage sortant de mon sein obscurcit mes regards, etje me détournai contre un chambranle pour y appuyer un instant ma tête qui éclatait, et y dévorer mes larmes. Ce fut l'affaire d'une seconde, et me retournant:

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<< - Pardon, monsieur le comte, de cet instant de faiblesse. Je suis honteux de vous l'avoir laissé deviner, mais les souffrances que j'endure sont telles que je suis excusable d'y avoir été entraîné; je vous demande la permission de me retirer. Je me suis trompé en venant ici, mais je ne m'en repens pas. J'ai obéi au sentiment de mon devoir, et il n'a fallu rien moins que cette impérieuse nécessité pour me faire suporter les tortures qu'elle m'a imposées. Je rapporterai fidèlement à mon Gouvernement les détails de nos entretiens. Personnellement je vous remercie de la bienveillance que vous y avez apportée; j'en garderai le souvenir. Si mon Gouvernement estime qu'il y ait quelque chose à faire dans l'intérêt de la paix avec les conditions que vous m'avez posées, je dominerai mes répulsions et serai ici demain. Dans le cas contraire, j'aurai l'honneur de vous écrire. Je suis bien malheureux, mais plein d'espoir. >>

Le comte me parut légèrement agité, me tendit la main, m'adressa des paroles polies, et je descendis, le cœur gonflé de douleur et de colère, le grand escalier du château.

N° 510.

PROCLAMATION DE M. GAMBETTA.

Paris. le 21 septembre 1870.

Citoyens,

C'est aujourd'hui le 21 septembre.

Il y a soixante-dix-huit ans, à pareil jour, nos pères fondaient la République, et se juraient à eux-mêmes, en face l'étranger qui souillait le sol sacré de la patrie, de vivre libres ou de mourir en combattant.

Ils ont tenu leur serment; ils ont vaincu, et la République de 1792 est restée dans la mémoire des hommes comme le symbole de l'héroïsme et de la grandeur nationale.

Le Gouvernement installé à l'Hôtel de Ville aux cris enthousiastes de

Vive la République ! ne pouvait laisser passer ce glorieux anniversaire sans le saluer comme un grand exemple.

Que le souffle puissant qui animait nos devanciers passe sur nos âmes, et nous vaincrons.

Honorons aujourd'hui nos pères et demain sachons comme eux forcer la victoire en affrontant la mort.

Vive la France! Vive la République!

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Monsieur, je suis en mesure de vous faire connaître d'après les meilleures sources les vues des Gouvernements allemands alliés au sujet des conditions de paix à établir entre eux et la France.

Les garanties de paix contenues dans le plébiscite tout dernièrement voté en France, n'on rien produit de bon.

Les événements ont montré l'instabilité des dispositions de la nation française. La majorité de la Chambre, le Sénat, les organes de l'opinion publique ont demandé si hautement une guerre de conquête contre l'Allemagne que les amis isolés de la paix ont perdu tout courage pour s'y opposer, et l'Empereur a pu se croire justifié en affirmant qu'il avait été forcé à déclarer la guerre par l'opinion publique. En présence de ces faits, les Gouvernements allemands alliés ne peuvent trouver une garantie de paix dans les dispositions du peuple français. Ils ne doivent donc pas se bercer de l'espoir qu'il n'y a aucune raison de s'attendre après la paix à un prompt renouvellement d'une attaque quelles que soient les conditions qui seront réclamées de la France. La nation française n'oubliera jamais la série de défaites qu'a subies leur présente guerre d'agression. Même dans le cas où les Allemands ne demanderaient aucune cession de territoire, aucune indemnité, aucun avantage, excepté la gloire de de leurs armes ; il resterait-l'amour propre blessé du peuple français et son désir héréditaire de conquête; il n'attendrait que le jour où il pourrait espérer recommencer la guerre avec succès. La modération du Gouvernement allemand en 1867 provenait de son désir d'éviter une

ère de rancunes et de mauvaises passions, mais avec de la patience et l'entretien attentif de rapports amicaux entre les deux pays de fonder les bases d'une ère de paix et de bon vouloir réciproque.

Comme cette modération a manqué son effet, et comme les Allemands, malgré tous leur efforts ont été forcés de subir une guerre d'agression, ils regardent désormais comme nécessaire de rechercher des garanties contre la prochaine attaque autres que celles à trouver dans le bon vouloir de la France. Les garanties qui avaient été prises en 1815 contre le même ambition du peuple français ont perdu leur effet, et l'Allemagne ne peut maintenant se fier qu'à sa propre force et à ses propres ressources. Les Allemands ne devraient pas être continuellement exposés à la nécessité de recommencer les mêmes efforts qu'ils ont faits cette fois, et des garanties naturelles sont en conséquence indispensables pour leur protection et la conservation de la paix en Europe.

Ces garanties seront réclamées, non pas d'un Gouvernement transitoire de la France, mais de la nation française qui s'est toujours montrée prête, comme l'atteste l'histoire des siècles passés, à suivre son Gouvernement dans les idées de guerre, et sous chaque Gouvernement, à chercher à acquérir des territoires en Allemagne. Afin donc d'établir une paix durable, des garanties doivent être obtenues contre la prochaine attaque imminente de la part de la France, et ces garanties ne peuvent être trouvées que dans le changement actuel des frontières défensives de l'Allemagne du Sud, de façon à ce que le point de départ de la future attaque soit plus éloigné et que les forteresses par lesquelles la France a jusqu'ici menacé l'Allemagne soient remises au pouvoir de l'Allemagne autant qu'elles pourront former plus tard des boulevards défensifs contre l'invasion.

Les idées que je viens de développer sont, je le sais, celles qui sont entretenues dans les cabinets des princes allemands. Elles existent aussi dans toute leur force irrésistible dans les esprits du peuple allemand. Je vais ajouter une réflexion qui m'est propre. Une vraie garantie pour l'Allemagne contre les attaques futures de la France, serait l'union politique même de l'Allemagne, et les plus sérieuses négociations sont engagées en ce moment entre l'Allemagne du Nord d'une part, et l'Allemagne du Sud, spécialement le Wurtemberg et la Bavière, d'autre part pour atteindre ce but. L'Allemagne, étant unie, n'aura plus rien à craindre de la France d'un côté, ni la Prusse de l'autre.

J'ai, etc.

Signé: BANCROFT.

N° 512.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Tours, le 21 septembre 1870.

Mylord, comme j'ai eu l'honneur d'en faire part à Votre Seigneurie dans ma dépêche d'avant-hier, les représentants de l'Autriche, de l'Italie, de la Russie et de la Turquie ont quitté Paris dans la nuit du 17 et sont arrivés ici dans la matinée du 18. A cinq heures et demie de ce même jour, toute communication entre Paris et le reste de la France, par chemin de fer, a été complétement coupée par les armées allemandes; et à quatre heures de l'après-midi, le 19, le dernier fil télégraphique a été coupé, et depuis ce moment, aucune nouvelle n'a plus été reçue ici de Paris.

On sait que M. Jules Favre est parti samedi matin, 18, pour le quartier-général prussien; comme aucune nouvelle de lui n'est arrivée à Tours depuis son départ, il est probable qu'il n'était pas encore de retour à Paris, lorsque les communications télégraphiques ont cessé dans la soirée d'avant hier.

Dans ces circonstances, tant que Paris sera enfermé par les armées allemandes, des arrangements ont été pris pour l'expédition des affaires publiques.

Le pouvoir est exercé en complète plénitude par trois membres du Gouvernement, savoir: M. Crémieux, ministre de la Justice; le vice-amiral Fourichon, ministre de la Marine; et M. Glais-Bizoin.

Les fonctions administratives de ceux des membres qui sont enfermés dans Paris sont remplies par des délégués, députés par eux, qui sont depuis quelque temps installés ici.

En partant pour le quartier général prussien, M. Jules Favre a donné ordre à son chef de cabinet, le comte de Chaudordy, de se rendre à Tours, pour agir comme son représentant dans la conduite des Affaires étrangères. M. de Chaudordy m'a montré une lettre autographe que M. Jules Favre lui a remise, dans laquelle il exprime la confiance complète qu'il a en lui et le charge de s'occuper, en son lieu et place, des affaires courantes avec les chefs des missions étrangères à Tours. La lettre contient en outre une allusion à la probabilité de l'arrivée éventuelle de M. Jules Favre ici.

M. de Chaudordy m'informe que les lettres d'affaires adressées à M. Jules Favre par les représentants des puissance étrangères à Tours, seront ouvertes et qu'il y sera répondu par lui ici.

Le chargé d'affaires d'Espagne est arrivé de Paris avant-hier. En conséquence, les représentants étrangers présents dans cette ville, sont le prince de Metternich, ambassadeur d'Autriche; Djemil-Pacha ambassadeur de Turquie; le chevalier Nigra, ministre d'Italie; M. Okouneff, chargé d'affaires de Russie; M. Hernandez, chargé d'affaires d'Espagne, et moi.

J'ai, etc.

Signé: LYONS.

N° 513.

LORD LYONS AU COMTE DE GRANVILLE.

Tours, le 21 septembre 1870.

Mylord, M. Thiers est arrivé ici, hier matin, à 7 heures, et trois heures après, a continué son voyage pour Saint-Pétersbourg, par la voie de Turin, Vienne et Varsovie. Comme il est très-désireux d'arriver à Saint-Pétersbourg aussitôt que possible, il a l'intention, à ce que j'ai compris, de ne rester que quelques heures à Vienne, en passant, et de remettre à son retour ses négociations avec le Gouvernement autrichien.

Le séjour de M. Thiers a été tellement court,qu'il m'a été impossible de le voir; mais j'ai appris qu'il avait parlé avec une grande satisfaction de la réception cordiale qu'il a eue personnellement de Votre Seigneurie et de M. Gladstone, et il s'est exprimé comme étant généralement très-satisfait du résultat de sa mission en Angleterre. J'ai, etc.

No 514.

Signé LYONS.

LES CONSULS GÉNÉRAUX ET CONSULS RESIDANT A PARIS

A M. WASHBURNE.

Paris, le 22 septembre 1870.

Monsieur le ministre, les soussignés: E. Tiberghiem Ackerman, consul général de la République orientale de l'Uruguay; Jules Thirion,

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