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qui sépare le vêtement du meuble pour toucher à la céramique et à la peinture proprement dite.

L'émail, en effet, prend des développements tels, qu'il finit par constituer un art technique spécial. Les émaux de toute sorte et la céramique suffiraient à faire du Musée rétrospectif une collection exceptionnelle. L'ébénisterie y déploie aussi toutes ses raretés, et quand la ciselure d'art s'y joint comme sur certaines commodes du marquis d'Hertford ou sur les tables de M. L. Double, les prix fabuleux qu'elle atteint nous disent en quelle haute estime elle est aux yeux des amateurs; au-dessus de l'ébénisterie, voilà encore les industries immédiatement dépendantes de l'architecture et ces objets mobiliers qui occupent les degrés inférieurs de la peinture et de la sculpture: la ferronnerie et les bronzes, pendules, chenets, luminaires; les ivoires, les statuettes, les miniatures, les manuscrits enluminés.

Ces indications sommaires nous justifient sans doute de n'avoir point entrepris avec nos lecteurs une exploration régulière du Musée rétrospectif; et cependant la difficulté devant laquelle nous reculons n'est pas, de sa nature, invincible; elle nous donne la preuve manifeste qu'une classification des arts est devenue nécessaire; et nous croyons quant à nous que, dès à présent, un musée, non pas temporaire mais définitivement établi, pourrait être classé, la part faite aux exigences de la décoration, suivant l'ordre logique que les quelques pages précédentes font pressentir.

Une première salle ou galerie pour les arts destinés au service de l'individu, armes, tissus et bijoux, en observant dans le détail l'ordre historique. Une seconde série pour les émaux, la céramique et le mobilier proprement dit. Puis une salle à part pour la ferronnerie, les bronzes d'art et en général les ouvrages où le métal a une influence dominante sur le travail et qui dépendent visiblement de l'architecture; puis enfin un dernier groupe de toutes les ramifications de la peinture et de la sculpture, non plus appliquées à une destination usuelle, mais devenues de véritables œuvres d'art ne se rattachant plus au mobilier que par leurs dimensions portatives.

Une salle d'honneur serait consacrée aux morceaux hors ligne de toutes les branches d'art et d'industrie qui par leur destination religieuse, leur caractère symbolique et leur exécution parfaite s'élèvent au-dessus de leur sphère et constituent des exceptions uniques.

Si l'on objecte que ce classement systématique suppose des locaux de dimensions et de distributions trop disparates, puisque certaines séries tiendraient à l'aise dans un cabinet, tandis que d'autres séries rempliraient des galeries, nous demanderons où serait le mal, qu'un musée, au lieu de se composer de monotones compartiments impropres à leur destination, fut construit en vue des collections, comme les bibliothèques

sont construites pour les livres? Des particuliers ont déjà donné l'exemple de ces constructions spéciales, et nos musées publics ne seront des monuments que lorsqu'ils rempliront cette condition-là.

On le voit, indépendamment des impressions et des souvenirs que le Musée rétrospectif a donnés aux amis des arts et que malheureusement nous n'avons pu transmettre à nos lecteurs, il a posé des questions d'une importance capitale qu'un prochain avenir est appelé à résoudre.

On peut donc apprécier quels grands services a rendus et rendra encore au goût et au progrès esthétique l'Union centrale des arts appliqués à l'industrie.

C. DE SAULT.

VARIA

UNE NOUVELLE SOURCE DE MAGNÉTISME vient d'être découverte. Le moyen est désormais trouvé d'exciter une électricité permanente dans le fer doux; effet qu'on ne peut obtenir ni par le courant électrique ni par la méthode des touches.

A l'atelier central du chemin de fer de Nassau on s'aperçut que les rubans d'acier et de fer doux qui tombaient du tour étaient magnétiques et doués de polarité quelle que fût leur longueur. On aurait pu supposer que la polarité dépendait du côté droit ou gauche selon lequel était tourné le pas de vis; mais cette idée ne se confirma pas. Cependant on observa que le magnétisme était plus fort, toutes les fois que le pas de vis, regardé du pôle sud, tournait dans un sens opposé à celui des aiguilles de montre. La position relative des pôles dépendait uniquement d'une tout autre circonstance; le pôle nord était invariablement situé à l'extrémité où le ciseau avait commencé à mordre, et le pôle sud à l'extrémité où il s'était arrêté.

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(Intellectual Observer.)

LES SÉQUOYAS GIGANTESQUES DE LA CALIFORNIE. Nous lisons dans une lettre adressée de Sacramento à la New York Daily Tribune :

Vingt forêts environ, peuplées de ces monstres végétaux, ont été découvertes en Californie. Celle de Mariposa est la plus grande et la plus belle, mais celle de Calaveras est mieux connue. Des séquoyas de Mariposa, deux cents ont plus de douze pieds de diamètre, cinquante plus de seize pieds et six plus de trente pieds. Le plus grand de tous, qu'on appelle le Monarque tombé, dépouillé de ses feuilles et de ses branches, gît sur le sol depuis cent cinquante années. Il a été fort endommagé par le feu, mais on peut facilement mesurer qu'avec son écorce, il a dû avoir une épaisseur de quarante pieds. Mesurez quarante pieds sur le sol, puis quatre cents, et seulement alors vous pourrez vous rendre compte du diamètre et de la hauteur du colosse, tel qu'on aurait pu le voir, il y a un millier d'années.

La cime des arbres les plus hauts a été brisée; mais découronnés ils ont encore une hauteur de deux cent cinquante pieds. Le plus gros des arbres sur pied s'appelle Grizzly Giant (le Géant chenu). S'il était coupé, cinquante chevaux tiendraient aisément sur la plate-forme de son tronc.

Le dernier Congrès de Washington a réservé les bois de Mariposa et la vallée Yosémite comme propriété du domaine public, et en a fait un lieu de plaisance pour le peuple des Etats-Unis, ses héritiers et ayant droit à perpétuité. C'est le plus beau parc au milieu du plus sublime paysage qu'il y ait au monde.

DES PERLES A COSTA-RICA.

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On vient de découvrir, dans les eaux de CostaRica, des perles qui, dit-on, sont d'une extrême beauté. Malheureusement les requins vivent en si grand nombre dans ces parages, notamment près des côtes de Chirigui, que l'on doute de pouvoir y établir une pêcherie régulière, les plongeurs ne voulant pas s'y aventurer.

LES NIDS DE SALANGANES.

On n'ignore pas que les hirondelles de nos climats, pour construire leur nid, font une espèce de mortier avec du sable ou de la terre qu'elles imprégnent de leur salive, ou, si l'on aime mieux, d'une liqueur qu'elles distillent. Ce mortier ne tarde pas à sécher; il devient dur et imperméable comme du ciment. C'est surtout au moment des amours que l'hirondelle produit cette matière agglutinative, les glandes salivaires de l'oiseau étant plus développées dans cette phase de son existence. Il arrive parfois qu'un couple d'hirondelles ne produit pas en quantité suffisante la substance nécessaire pour la construction de leur nid; dans ce cas les deux époux renonceront au bonheur de la vie domestique, ou, ce qui arrive fréquemment, ils tenteront de s'emparer de vive force du nid d'un couple plus heureux.

Il existe dans les contrées méridionales de l'Asie une espèce d'hirondelle qui ressemble aux nôtres, et chez lesquelles la salivation dont on vient de parler est infiniment plus abondante : c'est l'hirondelle appelée salangane par les indigènes. Elle vit dans l'île de Java et aux Philippines, et choisit pour faire son nid les endroits les plus escarpés de la côte, les rochers que les vagues de l'Océan ont rongés et creusés, et surtout les grottes profondes dans lesquelles la mer pénètre au moment de la marée. Les côtes de Java, qu'habitent les salanganes, s'élèvent perpendiculairement à plus de trois cents pieds, et sont continuellement battues par une mer houleuse, de sorte qu'il n'est point facile de s'approcher des nids placés à une grande hauteur dans les crevasses et les interstices des rochers. Ces nids ont la forme que présenterait la coque d'un œuf, coupée en deux, et l'on reconnaît immédiatement qu'ils se composent d'une substance visqueuse qui s'est durcie à l'air. Autrefois on croyait généralement que la salangane cons

truisait son nid avec une espèce de varech, plante grasse et gélatineuse, qui sert d'aliment aux Javanais et dont ils préparent aussi un vernis très-recherché dans le commerce. Les naturalistes pensaient que l'oiseau, après avoir mangé cette algue, la conservait pendant quelque temps dans l'estomac et la rendait ensuite à moitié digérée pour en construire son nid. On ajoutait que du frai de poisson et une foule de petits mollusques, avalés avec la plante, contribuaient à rendre gélatineuse la substance dont les nids se composent. Toutefois, on a examiné cette matière au microscope, et comme on n'y a découvert aucune trace d'algues ou de mollusques, on en a conclu que la salangane fait son nid entièrement avec sa salive.

Au moment de la ponte, les glandes salivaires de l'oiseau se gonflent outre mesure et ont l'aspect d'une substance blanchâtre et globuleuse. Elles distillent en abondance une liqueur épaisse et visqueuse que l'oiseau laisse échapper par le bec en fils déliés.

Deux fois par an les chercheurs de nids se réunissent sur la côte. Ce sont tous des indigènes habitués dès leur enfance à la périlleuse entreprise. Les dangers qui les menacent sont nombreux; aussi ont-ils recours à toutes sortes d'artifices pour s'encourager mutuellement.

Pour atteindre les nids ils sont forcés de se servir d'une échelle de cent à cent vingt pieds, faite en rotins et dont la partie supérieure seulement est fixée contre le flanc du rocher. Il arrive parfois que les hommes qui se trouvent sur l'échelle disparaissent tout à coup dans le gouffre, soit que les jalons de cette échelle si fragile se rompent ou que les individus soient pris de vertige.

Sur la hauteur se trouvent une série de petites huttes pour abriter les hommes; la plus grande de ces cases sert de magasin pour recevoir les nids. A l'entrée de ce magasin on établit un lit somptueux consacré à la déesse de la mer. On allume des feux pour la rendre favorable; on encense le lit de parfums délicieux, on le couvre de fleurs et de couronnes, on sacrifie un taureau; on chante des hymnes. Puis, au moment de tenter l'entreprise, on s'enivre d'opium, on s'excite par la danse et par des chants guerriers.

On sépare les nids que l'on a trouvés en trois sortes selon leur couleur. Ceux qui sont d'une couleur blanche sont les plus estimés : ce sont probablement des nids construits récemment; les Javanais pensent que ce sont des nids faits par les oiseaux mâles. Les nids d'une teinte jaunâtre forment la deuxième qualité, et enfin la qualité inférieure se compose des nids d'une couleur brune ou noire. On en fait des paquets de cinquante à soixante kilogrammes. Un paquet de nids d'hirondelles de première qualité vaut de 450 à 170 francs. Les grottes de Bolang, dans l'ile de Java, produisent annuellement un million de francs en nids d'hirondelles, et les frais d'exploitation s'élèvent à onze ou douze pour cent de cette somme. Les districts habités par la salangane sont généralement exploités par le gouvernement hollandais.

Les Javanais ne mangent pas le nid de la salangane; les Européens en mangent plutôt par curiosité que par goût. Ce sont les Chinois qui achètent cette denrée. On sait que les mets de prédilection des habitants du Céleste Empire sont

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