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On vous fait confidente, en cent climats divers,
De beaucoup de bonnes affaires;
Et je crois, à parler à sentimens ouverts,
Que nous ne nous en devons guères.

LA NUIT.

Laissons ces contrariétés,

Et demeurons ce que nous sommes.
N'apprêtons point à rire aux hommes,
En nous disant nos vérités.

MERCURE.

Adieu. Je vais là-bas, dans ma commission,
Dépouiller promptement la forme de Mercure,
Pour y vêtir la figure
Du valet d'Amphitryon.

LA NUIT. 1

Moi, dans cet hémisphère, avec ma suite obscure,
Je vais faire une station.

MERCURE.

Bon jour, la Nuit.

LA NUIT.

Adieu, Mercure.

(Mercure descend de son nuage, et la Nuit traverse le théâtre.)

ACTE PREMIER.

SCÈNE I.

SOSIE.

QUI
UI va là? Hé! ma peur à chaque pas s'accroît !

Messieurs, ami de tout le monde.
Ah! quelle audace sans seconde
De marcher à l'heure qu'il est !
Que mon maître, couvert de gloire,

Me joue ici d'un vilain tour!

Quoi! si pour son prochain il avoit quelque amour,
M'auroit-il fait partir par une nuit si noire?
Et, pour me renvoyer annoncer son retour
Et le détail de sa victoire,

Ne pouvoit-il pas bien attendre qu'il fût jour?
Sosie, à quelle servitude

Tes jours sont-ils assujettis!

Notre sort est beaucoup plus rude
Chez les grands que chez les petits.

Ils veulent que pour eux tout soit, dans la nature,
Obligé de s'immoler.

Jour et nuit, grêle, vent, péril, chaleur, froidure, Dès qu'ils parlent, il faut voler.

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1

Vingt ans d'assidu sérvice

N'en obtiennent rien pour nous:

Le moindre petit caprice

Nous attire leur courroux.
Cependant notre ame insensée

S'acharne au vain honneur de demeurer près d'eux,
Et s'y veut contenter de la fausse pensée

Qu'ont tous les autres gens que nous sommes heureux.
Vers la retraite en vain la raison nous appelle,
En vain notre dépit quelquefois y consent;

Leur vue a sur notre zèle

Un ascendant trop puissant,

Et la moindre faveur d'un coup d'oeil caressant
Nous rengage de plus belle.

Mais enfin, dans l'obscurité,

Je vois notre maison, et ma frayeur s'évade.
Il me faudrait, pour l'ambassade,
Quelque discours prémédité.

Je dois aux yeux d'Alemène un portrait militaire
Du grand combat qui met nos ennemis à bas ;
Mais comment diantre le faire,
Si je ne m'y trouvai pas ?

N'importe, parlons-en et d'estoc et de taille,
Comme oculaire témoin.

Combien de gens font-ils des récits de bataille
Dont ils se sont tenus loin!

Pour jouer mon rôle sans peine,

Je le veux un peu repasser.

Voici la chambre où j'entre en courrier que l'on mène, Et cette lanterne est Alcmène,

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