A qui je me dois adresser. (Sosie pose sa lanterne à terre.) Madame, Amphitryon, mon maître et votre époux... (Bon! beau début!) l'esprit toujours plein de vos charmes, M'a voulu choisir entre tous Pour vous donner avis du succès de ses armes << Ah! vraiment, mon pauvre Sosie, « A te revoir j'ai de la joie au cœur. » Madame, ce m'est trop d'honneur, Et mon destin doit faire envie. (Bien répondu ! ) « Comment se porte Amphitryon? » Madame, en homme de courage, Dans les occasions où la gloire l'engage. « Quand viendra-t-il, par son retour charmant Le plutôt qu'il pourra, madame, assurément, Et fait trembler les ennemis. (Peste! où prend mon esprit toutes ces gentillesses ? ) >> Que font les révoltés ? dis-moi, quel est leur sort? » Ils n'ont pu résister, madame, à notre effort; Nous les avons taillés en pièces, Mis Ptérélas leur chef à mort, Pris Télèbe d'assaut ; et déjà dans le port Tout retentit de nos prouesses. «Ah! quel succès ! ô dieux! Qui l'eût pu jamais croire! >> Raconte-moi, Sosie, un tel évènement. » Je le veux bien, madame; et, sans m'enfler de gloire, Je puis parler très-savamment. (Sosie marque les lieux sur sa main.) C'est une ville, en vérité, Aussi grande quasi que Thèbe. La rivière est comme là; Ici nos gens se campèrent ; Sur un haut, vers cet endroit, Et plus bas, du côté droit, Etoit la cavalerie. Après avoir aux Dieux adressé les prières, Voilà notre avant-garde à bien faire animée; Et voicile corps d'armée, (On fait un peu de bruit.) Qui d'abord.... Attendez, le corps d'armée a peur ; J'entends quelque bruit, ce me semble. MERCURE SCÈNE II. MERCURE, SOSIE. sous la figure de Sosie, sortant de la Sous ce minois qui lui ressemble, Dont l'abord importun troubleroit la douceur SOSIE, sans voir Mercure. Mon cœur tant soit peu se rassure, MERCURE, à part. Tu seras plus fort que Mercure, SOSIE, sans voir mercure. Cette nuit en longueur me semble sans pareille. MERCURE, à part. Comme avec irrévérence Parle des dieux ce maraud! Mon bras saura bien tantôt Chatier cette insolence; Et je vais m'égayer avec lui comme il faut, SOSIE, apercevant Mercure d'un peu Ah! par ma foi, j'avois raison : Je veux chanter un peu d'ici. MERCURE. loin. (Il chante.) Qui donc est ce coquin qui prend tant de licence (A mesure que Mercure parle, la voix de Sosie s'affoiblit peu à peu.) Veut-il qu'à l'étriller ma main un peu s'applique ? Cet homme assurément n'aime pas la musique. MERCURE. Depuis plus d'une semaine Je n'ai trouvé personne à qui rompre les Pour me remettre en haleine. SOSIE, à part. Quel diable d'homme est-ce ci! De mortelles frayeurs je sens mon ame atteinte. Peut-être a-t-il dans l'ame autant que moi de crainte, Pour me cacher sa peur sous une audace feinte. Faisons-nous du coeur par raison : Il est seul, comme moi ; je suis fort; j'ai bon maître; Et voilà notre maison. |