Tu triomphes de l'avantage Que te donne sur moi mon manque de courage, Et ce n'est pas en user bien. C'est pure fanfaronnerie De vouloir profiter de la poltronnerie De ceux qu'attaque notre bras. Battre un homme à jeu sûr n'est pas d'une belle ame; Et le coeur est digne de blâme Contre les gens qui n'en ont pas. MERCURE. Hé bien ! es-tu Sosie à présent? qu'en dis- tu? SOSIE. Tes coups n'ont point en moi fait de métamorphose; Et tout le changement que je trouve à la chose, C'est d'être Sosie battu. MERCURE, menaçant Sosie. Encor! Cent autres coups pour cet autre inpudence. SOSIE. De grâce, fais trève à tes coups. MERCURE. Fais donc trève à ton insolence. SOSIE. Tout ce qu'il te plaira : je garde le silence. MERCURE. Es-tu Sosie encor; dis, traître ? SOSIE. Hélas! je suis ce que tu veux, Dispose de mon sort tout au gré de tes vœux ; MERCURE. Ton nom étoit Sosie, à ce que tu disois? SOSIE. Il est vrai, jusqu'ici j'ai cru la chose claire ; M'a fait voir que je m'abusois. MERCURE. C'est moi qui suis Sosie, et tout Thèbes l'avoue: SOSIE. Toi, Sosie? MERCURE. Oui, Sosie; et si quelqu'un s'y joue, Il peut bien prendre garde à soi. SÒSIE, à part. Ciel! me faut-il ainsi renoncer à moi-même, De ce que je suis poltron! Sans cela, par la mort... MERCURE. Entre tes dents, je pense, Tu murmures je ne sais quoi. SOSIE. Non. Mais, au nom des dieux, donne-moi la licence De parler un moment à toi. MERCURE. Parle. SOSIE. Mais promets-moi, de grâce, MERCURE. Passe: Va, je t'accorde ce point. SOSIE. Qui te jette, dis-moi, dans cette fantaisie? Sus, je romps notre trève, et reprends ma parole. SOSIE. N'importe. Je ne puis m'anéantir pour toi, S'avisa-t-on jamais d'une chose pareille? Ne suis-je pas dans mon bon sens? Pour m'empêcher d'entrer chez nous, N'as-tu pas sur mon dos exercé ta furie? Ne m'as-tu pas roué de coups? Cesse donc d'insulter au sort d'un misérable; MERCURE. 'Arrête, ou sur ton dos le moindre pas attire Un assommant éclat de mon juste courroux. Tout ce que tu viens de dire Est à moi, hormis les coups. SOSIE. Ce matin du vaisseau, plein de frayeur en l'ame, Cette rne sait comme je suis parti. Amphitryon, du camp, vers Alcmène sa femme M'a-t-il pas envoyé ! MERCURE. Vous en avez menti. C'est moi qu'Amphitryon députe vers Alcmène, Frère d'Arpage, mort en pays étranger, Dont l'humeur me fait enrager; |