Qui dans Thèbe ai reçu mille coups d'étrivière, Sans en avoir jamais dit rien ; Et jadis en public fus marqué par derrière, Il a raison. A moins d'être Sosie, On ne peut pas savoir tout ce qu'il dit; Et, dans l'étonnement dont mon ame est saisie, Je commence, à mon tour, à le croire un petit. En effet, maintenant que je le considère, Je vois qu'il a de moi, taille, mine, action. Faisons-lui quelque question, Afin d'éclaircir ce mystère. (Haut.) Parmi tout le butin fait sur nos ennemis, MERCURE. Cinq fort gros diamans en noeud proprement mis, Dont leur chef se paroit comme d'un rare ouvrage. SOSIE. A qui destine-t-il un si riche présent? MERCURE. A sa femme ; et sur elle il le veut voir paroître. SOSIE. Mais où, pour l'apporter, est-il mis à présent? MERCURE. Dans un coffret scellé des armes de mon maître. SOSIE, à part. Il ne ment pas d'un mot à chaque repartie; Il pourroit bien encor l'être par la raison. Où puis-je rencontrer quelque clarté fidèle Ce que j'ai fait tout seul, et que n'a vu personne, C'est de quoi le confondre, et nous allons le voir. (Haut) Lorsqu'on étoit aux mains, que fis-tu dans nos tentes Où tu courus seul te fourrer. MERCURE. D'un jambon... SOSIE, bas, à part. L'y voilà! MERCURE. Que j'allai déterrer Je coupai bravement deux tranches succulentes, Et joignant à cela d'un vin que l'on ménage, Pour nos gens qui se battoient. (Haut.) bas, à part. SOŠIE, Cette preuve sans pareille Je ne saurois nier aux preuves qu'on m'expose, MERCURE. Quand je ne serai plus Sosie, Sois-le, j'en demeure d'accord: Mais tant que je le suis, je te garantis mort, SOSIE. Tout cet embarras met mon esprit sur les dents, MERCURE. Ah ! tu prends donc, pendard, goût à la bastonnade? SOSIE, battu par Mercure. Ah! qu'est-ce ci, grands dieux ! il frappe un ton plus fort Et mon dos pour uu mois en doit être malade. Laissons ce diable d'homme, et retournons au port. O juste ciel ! j'ai fait une belle ambassade ! Tome V. D MERCURE, seul. Enfin je l'ai fait fuir; et, sous ce traitement, Reconduit l'amoureuse Alemème. SCÈNE II I. JUPITER, sous la figure d'Amphitryon ; ALCMÈNE, CLÉANTHIS, MERCURE. JUPITER. DÉFENDEZ, chère Alcmène, aux flambeaux d'approcher. Mon amour, que gênoient tous ces soins éclatans Qu'il vient de donner à vos charmes. Je prends, Amphitryon, grande part à la gloire Sait toucher de mon coeur les sensibles endroits : Mais, quand je vois que cet honneur fatal Je ne puis m'empêcher, dans ma tendresse extrême, Et d'opposer mes voeux à cet ordre surprême Un triste coup, De combien de frayeurs a-t-on l'ame blessée Du coup dont elle est menacée ? Et de quelque laurier qu'on courronne un vainqueur, JUPITER. Je ne vois rien en vous dont mon feu ne s'augmente; |