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ALCMÈNE.

Faut-il encor pour vous conserver des bontés,
Et vous voir m'outrager par tant d'indiguités ? ·

JUPITER.

Quelque ressentiment qu'un outrage nous cause,
Tient-il contre un remords d'un cœur bien enflammé ?

ALCMÈNE.

Un cœur bien plein de flamme à mille morts s'expose Plutôt que de vouloir fächer l'objet aimé.

JUPITER.

Plus on aime quelqu'un, moins on trouve de peine...

ALCMÈNE.

Non, ne m'en parlez point; vous méritez ma haine.

Vous me haissez donc ?

JUPITER.

ALCMÈNE.

J'y fais tout mon effort,

Et j'ai dépit de voir que toute votre offense

Ne puisse de mon cœur jusqu'à cette vengeance
Faire encore aller le transport.

JUPITER.

Mais pourquoi cette violence,

Puisque pour vous venger je vous offre ma mort ?
Prononcez-en l'arrêt, et j'obéis sur l'heure.

ALCMÈNE.

Qui ne sauroit haïr peut-il vouloir qu'on meure?

JUPITER.

Et moi, je ne puis vivre à moins que vous quittiez
Cette colère qui m'accable,

Et que vous m'accordiez le pardon favorable
Quelje vous demande à vos pieds.

(Sosie et Cléanthis se mettent aussi à genoux.) Résolvez ici l'un des deux,

Ou de punir, ou bien d'absoudre.

ALCMENE.

Hélas! ce que je puis résoudre

Paroît bien plus que je ne veux.

Pour vouloir soutenir le courroux qu'on me donne,

Mon cœur a trop su me trahir :

Dire qu'on ne sauroit haïr,

N'est-ce pas dire qu'on pardonne?

JUPITER.

Ah! belle Alemène, il faut que, comblé d'allégresse... ALCMÈNE.

Laissez. Je me veux mal de mon trop de foiblesse.

JUPITER.

Va, Sosie, et dépêche toi,

Voir, dans les doux transports dont mon ame est charmée,

Ce que tu trouveras d'officiers de l'armée,

Et les invite à dîner avec moi.

Tome V.

H

(Bas, à part.)

Tandis que d'ici je le chasse,
Mercure y remplira sa place.

SCÈNE VII.

CLÉANTHIS, SOSIE.

SOSIE.

HE BIEN! tu vois, Cléanthis, ce ménage.
Veux-tu qu'à leur exemple ici

Nous fassions entre nous un peu de paix aussi,
Quelque petit rapatriage?

CLEANTHIS.

C'est pour ton nez, vraiment ! cela se fait ainsi !

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SOSIE.

Non, morbleu ! je n'en ferai rien,

Et je veux être, à mon tour, en colère.
CLÉANTHIS.

Va, va, traître, laisse-moi faire;
On se lasse parfois d'être femme de bien.

FIN DU XCOND ACTE.

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SCENE I.

AMPHITRYON.

UI, sans doute, le sort tout exprès me le cache; Et des tours que je fais, à la fin, je suis las.

Il n'est point de destin plus cruel, que je sache.
Je ne saurois trouver, portant partout mes pas,
Celui qu'à chercher je m'attache,

Et je trouve tous ceux que je ne cherche pas.
Mille fâcheux cruels, qui ne pensent pas l'être,
De nos faits avec moi, sans beaucoup me connoitre,
Viennent se réjouir pour me faire enrager.
Dans l'embarras cruel du souci qui me blesse,
De leurs embrassemens et de leur allégresse
Sur mon inquiétude ils viennent tous charger.
En vain à passer je m'apprête
Pour fuir leurs persécutions,

Leur tuante amitié de tous côtés m'arrête;
Et, tandis qu'à l'ardeur de leurs expressions
Je réponds d'un geste de tête,

Je leur donne tout bas cent malédictions.
Ah! qu'on est peu flatté de louange, d'honneur,
Et de tout ce que donne une grande victoire,

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