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que Minerve éleva elle-même à la campagne, et qu'elle donna ensuite aux Atheniens pour leur roi.

Ou plaignez dans vos chants cette amante célèbre...

Phyllis, fille de Lycurgue, roi de Thrace. Sou amant Démophoon, fils de Thésée, fut rappelé à Athènes par des raisons d'état : son absence fut longue; Phyllis le crut infidèle, elle se donna la mort.

Palès ne chérit plus cette vigne déserte.

Déesse champêtre.

Daphnis déifié règne au séjour des astres.

L'apothéose serait un peu outrée si le poète n’en faisait un dieu champêtre : Virgile a suivi l'exemple des poètes grecs, qui avaient ainsi divinisé le Daphnis de Sicile.

Si

ÉGLOGUE VI.

SILÈNE.

PREMIER imitateur du berger dont la muse
Est l'honneur immortel des champs de Syracuse,
Dans un heureux loisir je répète en ce bois
Les airs que les Amours jouaient sur son hautbois.

Pour chanter les combats et le dieu de la Thrace
J'allais rêver un jour au sommet du Parnasse;
Apollon, peu facile à ces hardis projets,
M'ordonna de traiter de plus simples sujets:
Je ne trouble donc plus par l'éclat des trompettes
Des champs accoutumés aux soupirs des musettes.
Si je chante aujourd'hui sur ces paisibles bords,
Muses, ne m'inspirez que d'aimables accords.

Que d'autres, ô Varus, plus chers aux doctes fées,

Au temple de Mémoire érigent vos trophées!
Ma voix, trop faible encor pour chanter les héros,
Apprendra seulement votre nom aux échos.
Mais si ce qu'aujourd'hui j'écris sans impostures,
Vainquant la nuit des temps, passe aux races futures,
On lira que Varus et ses brillants honneurs
Étaient même connus au séjour des pasteurs.

Dans un antre champêtre, orné par la nature,
Sous des pampres fleuris, sur un lit de verdure,
Silène, de Morphée éprouvant la douceur,
A des songes riants abandonnait son cœur ;
On voyait près de lui sa couronne et son verre
Renversés sur un thyrse entouré de lierre;
Un doux jus, bu la veille aux fêtes de Bacchus,
Tenait encor ses sens assoupis et vaincus,
Quand deux jeunes bergers, Silvanire et Mnasile,
Troublèrent à dessein la paix de cet asile.
Depuis long-temps Silène, oracle de ces lieux,
Leur promettait en vain des chants mystérieux;
Il avait jusqu'alors éludé leur poursuite;
Mais leurs efforts enfin empêchèrent sa fuite:
La jeune Églé survient, et se joint aux pasteurs
Pour former au vieillard une chaîne de fleurs.
Captif en ces liens, Silène se réveille;

On voit naître les ris sur sa bouche vermeille :

Vous l'emportez, dit-il, et je suis arrêté;

Je vois bien à quel prix on met ma liberté;

Vous voulez que des temps je vous chante les fastes:
Un jour ne peut suffire à des sujets si vastes;
Commençons cependant, contentons vos désirs :
Pour vous, je vous réserve, Églé, d'autres plaisirs.
Rompez, jeunes pasteurs, cette chaîne inutile,
Et comptez sur la foi de ma muse docile.
Il dit. Tout à l'envi s'apprête à l'écouter;
Ses liens sont brisés : il commence à chanter.
Aux sublimes accents de l'immortel Silène
Les vents, au loin chassés, ne troublaient pas la plaine;
Les ruisseaux s'arrêtaient et n'osaient s'agiter;
Les échos admiraient et n'osaient répéter;

Les Nymphes, les Sylvains,formant d'aimables danses,
Suivaient d'un pas léger ses brillantes cadences.
Le rivage d'Amphrise et le bois d'Hélicon
Furent souvent charmés par le chant d'Apollon;
Le sombre roi du Styx, aux tendres airs propice,
Fut touché des accords de l'époux d'Eurydice:
Mais la voix du vieillard cher au dieu des raisins
Charma bien plus encor les rivages voisins.

Il décrivait d'abord la naissance du monde.
Rien n'existait encore; une masse inféconde
Formait un vaste amas d'atomnes confondus,

Dans les déserts du vide au hasard répandus;

Ce néant eut sa fin; l'univers reçut l'être :
Des atomes unis le concours fit tout naître;
Il fit les éléments, qui, par d'heureux accords,
Formèrent à leur tour tous les lieux, tous les corps;
Les plaines de Cybèle et les champs de Nérée
Occupèrent leurs rangs sous la sphère éthérée,
Et sur ces sombres lieux, muettes régions,
Où le trépas conduit ses pâles légions.

Quel spectacle pompeux ! du monde jeune encore
Quel fut l'étonnement, quand la naissante aurore,
Pour la première fois ouvrant un ciel vermeil,
Fit luire aux yeux charmés l'empire du soleil !
Bientôt ce dieu fécond, ame de la nature,
Du monde, obscur sans lui, fit briller la structure,
Et donna, de son char élevé sur les airs,
Du jour et des couleurs à tant d'êtres divers.
La terre, à son aspect, riche et fertilisée,
Des plus précieux dons se vit favorisée;
Elle enfanta les fleurs, les premières moissons,
La vigne, les vergers, les bois et les buissons;
Un peuple d'animaux erra dans nos montagnes;
Les troupeaux, moins craintifs, peuplèrent les cam-
pagnes;

L'air eut ses citoyens, l'onde ses habitants:

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