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Et de confiance et d'estime,

Le premier nœud des nations.

Voilà, monseigneur, une faible image des sentiments qu'inspire la lecture du Mémoire historique. Si la renommée de la grandeur d'ame et de l'auguste sensibilité du roi pouvait recevoir quelque accroissement dans l'univers, cet exposé lumineux y ajouterait. L'histoire, en transcrivant ce titre immortel, reproduira dans tous les âges la vénération tendre qu'il nous imprime; et la gloire d'un monument si cher sera bien supérieure à la triste célébrité de ces systèmes de discorde, de conquêtes et de calamités, que l'ambition a quelquefois écrits près du trône.

Ces romans du pouvoir, ces projets chimériques,
Du calme des états cet esprit ennemi,
Présentent vainement des rêves despotiques
Sous des noms vainqueurs de l'oubli;
Tous les testaments politiques

(Soit fabriqués, soit authentiques)
De Richelieu, Louvois, Alberoni,
N'auront jamais sur la nature

Ces droits de la raison, cet empire établi,
Ces droits de la vertu, cette autorité pure,

216 LETTRE AU DUC DE CHOISEUL.

Qui consacrent le nom chéri,

Le ton intéressant, la marche noble et sûre,
Et la loyauté de Sulli.

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DANS

ANS un ennuyeux verbiage

Articulant tout, et nommant

Parme, Prague, Dettingue, et le canon flamand,

On ne fait point ici l'ordinaire étalage

Des services, des maux, des blessures, de l'âge
Du très-ruiné suppliant;

Ses titres les plus sûrs sont dans la bienfaisance
De ce génie heureux, ce ministre estimé,
Né pour faire aimer la puissance

Du monarque vainqueur dont il veut être aimé. Quel bienfait briguons-nous? quelle est notre espé

Est-ce quelqu'un de ces objets
De fortune ou de confiance
Où se portent tous les projets

rance?

Des vieux gendarmes de la France,
Et dont tant de majors d'éternelle présence
Composent leurs pesants placets,

Et les ennuis de l'audience?
Non, ce n'est point en vérité
Un emploi de cette excellence
Qui par nous est sollicité;

C'est un poste (on l'avoue en toute humilité)
A qui personne ici ne pense,

Un vieux donjon, un roc, un antre inhabité,
Sans demandeurs, sans concurrence,

Sans arsenal, sans conséquence,

Sans canons, et sans vanité;

C'est la supériorité

D'une maigre communauté
D'invalides presque en enfance,

Qui montent la garde, je pense,
Beaucoup moins pour la sûreté

D'une place où la Paix, le Sommeil, le Silence,
Résident à couvert de toute hostilité,

Que pour épouvanter, par les sons lamentables
D'un tambour enroué de toute éternité,.
Les chats-huants voisins de ces lieux incroyables,
Ou pour bannir des vieux ormeaux,

Abri de leur gazette et de leur triste vie,

Les corneilles et les corbeaux

Qui pourraient quelque jour manger la compagnie,
Et se méprendre à l'air, à la mine flétrie
De ces cadavres de héros ;

Enfin, pour en parler avec plus d'évidence
Et non moins de prolixité,

C'est la très-mince lieutenance

D'un fort d'assez peu d'importance,

Qui ne sera jamais bloqué,

Mais dont le grenadier qui s'offre à sa défense Rendrait bon compte un jour si, contre l'apparence, Il pouvait se voir attaqué

Sur cette chétive éminence.

Encor voulons-nous moins que cette jouissance
Par ce mémoire présenté;

Ce n'est pour le moment qu'un titre sans séance,
Un bien qui n'aura d'existence,
D'actuelle réalité,

Que dans notre reconnaissance,

Jusqu'à l'instant qu'il plaise au maître souverain
De rappeler à lui l'ame du châtelain
Dont nous briguons la survivance.
Mais comme ce vieux paladin,
Quoique goutteux, octogénaire,
S'aime beaucoup dans ce bas hémisphère,
Et n'aima jamais son prochain;

Que sait-on ? hélas ! le vieux reître,
Très-choyé, très-soigneux des restes de son être,
Éternel dans ses bastions,

Empaqueté, fourré, le nez sur ses tisons,
Entre son major et son prêtre,
Ses histoires de garnisons,
Et ses pipes, et ses marrons,
Hélas! enterrera peut-être
Celui pour qui nous demandons.
Dieu lui fasse toute autre grace,
Si dans ce jour nous obtenons
Un coadjuteur de sa place!

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