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de Schamir, ou Schamiréan, riche marchand, né au nou. veau Djoulfah, près d'Ispahan, et établi alors dans l'Inde. Il avoit déjà fait imprimer dans la même ville, en 1772, un petit ouvrage pour exhorter ses compatriotes à secouer le joug des Musulmans, et il y avoit joint un précis trèssuccinct de l'histoire et de la géographie de l'Arménie. Éléazar fut aidé, pour son édition de l'Histoire des Orpélians, par deux autres Arméniens, Moyse Baghraméan et Garabied Mégerdouméan. Ces savans ignoroient le nom de l'auteur de l'ouvrage et son véritable titre; ils l'appelèrent improprement pay, c'est-à-dire, Histoire des Géorgiens. Malgré tous leurs efforts, cette édition contient un grand nombre de fautes que nous avons corrigées dans la nôtre, sans que nous ayons jugé à propos de les indiquer plus particulièrement, à l'exception de quelques-unes, pour ne pas alonger notre travail par des notes indifférentes à nos lecteurs. Nous regrettons cependant beaucoup de n'avoir pas eu entre nos mains un manuscrit, pour pouvoir le faire avec plus de certitude; mais, malgré cela, nous croyons avoir été assez heureux pour faire disparoître toutes les taches qui déparent l'édition de Madras, et pour rétablir le texte dans toute sa pureté.

Nous pensons qu'il doit exister un manuscrit de l'Histoire des Orpélians, dans quelque bibliothèque de l'Allemagne; car il s'en trouvoit un dans celle de Jean Acoluthus, professeur de Breslau, comme on le voit dans une lettre de Lacroze à Théophile, Bayer, datée de Berlin, le 11 mars 1717 (1).

(1) Acoluthi bibliothecam ipsi non invideo: utinam tamen uno aut altero è numero librorum Armenicorum, quos istic perlustravi, mihi per brevissimum temporis spatium usura concederetur. Indè, ut nosti,

Cet Acoluthus savoit un peu d'arménien : il avoit rassemblé plusieurs ouvrages écrits en cette langue, et fait fondre des caractères pour imprimer le prophète Abdias, qu'il publia à Léipsig, en 1680, un volume in-4°, avec une version Latine et des notes. C'est sur le manuscrit de l'Histoire des Orpélians, qui appartenoit à ce savant, que Lacroze a fait la traduction Latine du commencement du sixième chapitre, qui est publié dans sa correspondance avec Théophile Bayer, et auquel il a joint quelques courts extraits du même livre, relatifs aux Tartares (1). Ces divers morceaux ont été réimprimés, sans aucun changement, en 1810, à Saint-Pétersbourg, sous le titre de Excerpta ex libro Stephani, Synensis archiepiscopi, scripto sub finem sæculi XIII, cui titulus est: hire (imhbury [Badmuthiun Orbéleanzz], Historia Satraparum Orbelensium, in majore Armenia; à M. V. LACROZIO, BAYERO transmissa. On les trouve dans le premier et l'unique cahier d'une collection de pièces relatives à l'Orient, que M. Julès de Klaproth se proposoit de publier successivement, et qui étoit intitulé, Archiv für Asiatische litteratur, geschichte sprachkunde, erster band, in-4., p. 114-118.

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On voit, par plusieurs passages de la correspondance de Lacroze avec Théophile Bayer, qu'il attachoit la plus grande importance à la publication de l'Histoire des Orpélians, dont il paroît qu'il avoit fait une traduction complète. Quoique l'auteur n'ait pas mis assez d'ordre dans sa narration, et que la série des faits soit souvent interrompue par

descripsi olim Stephani Synensis historiam Satraparum Orpelensium, libellum quantivis pretii. (Thesaurus epistolicus Lacrozianus, tom. III, P. 24.)

(1) Thesaurus epistolicus Lacrozianus, tom. III, p. 5 et 6, et 11-14.

de grandes lacunes, nous pensons que cet ouvrage mérite de tout point l'estime qu'en faisoit Lacroze: il peut être utile de diverses façons pour l'histoire générale de l'Asie non-seulement par ce qu'il contient sur la famille Orpéliane, qui ne peut se trouver ailleurs, mais encore par ce qu'il rapporte des conquêtes des Mongols, et des révolutions arrivées dans la Géorgie, dont les annales nous sont fort mal connues. Nous croyons donc rendre service aux amateurs des lettres orientales, en donnant le texte et la traduction complète de cette histoire. Ce sera le premier texte original Arménien publié en entier en France, avec une traduction française.

DISSERTATION

SUR L'ORIGINE DE LA FAMILLE

DES ORPÉLIANS,

ET DE PLUSIEURS AUTRES COLONIES CHINOISES

ÉTABLIES EN ARMÉNIE ET EN GÉORGIE.

La famille des Orpélians tiroit son origine d'un vaste pays situé à l'extrémité orientale de l'Asie, qui est nommé par les Arméniens mir Djenasdan, et qui est certainement le même que la Chine. Le nom de Tchin ou

Sin صين Tchinistan chez les Persans, celui de جينستن

chez les Arabes, et de Trinestan chez les Syriens, aussi bien que celui de Djénasdan chez les Arméniens, ont toujours désigné un pays grand, puissant et civilisé, qui, du côté du nord, étoit au-delà des déserts et des peuples barbares qui avoisinent la Perse et l'Inde, et qui, du côté du midi, étoit au-delà des mers les plus reculées de l'Inde. Nous avons dans Masoudy, excellent auteur Arabe qui écrivoit au commencement du X.° siècle, le récit de plusieurs voyages entrepris dans l'intérieur de l'empire de la Chine,

par la route de terre et par celle de mer: on y trouve aussi le détail des guerres civiles qui accompagnèrent la fin de la dynastie des Thang (1). Les guerres entreprises dans l'intérieur de la Tartarie par cette puissante dynastie, avoient donné aux Arabes les moyens de bien connoître les Chinois, dont l'empire étoit alors limitrophe de celui des khalifes. Tous les princes Turks de la Transoxane étoient feudataires des monarques Chinois (2). Les historiens de ce peuple nous attestent que les princes Persans qui, après la destruction de la dynastie des Sassanides, se maintinrent contre les Arabes dans les montagnes du Dilem, du Gilan et du Tabaristan, au sud de la mer Caspienne, et qui résidoient à Sari, envoyèrent de fréquentes ambassades en Chine (3).

(1) Moroudj - eddheheb, mis. venu de Constantinople, tome I.", fol. 56 recto-63 recto. Le morceau relatif aux guerres civiles de la Chine a été publié en arabe, dans les notes de Reiske sur l'Histoire universelle d'Abou'lféda (Annales Moslemici, tom. II, p. 713-716). Le mauvais état du manuscrit de Leyde, dont Reiske a tiré ce fragment, ne lui a pas permis d'en donner une traduction. Abou❜lféda parle aussi (tom. II, p. 250 et 252) des troubles qui agitèrent la Chine sur la fin de la dynastie des Thang; il les place sous l'année 264 de l'hégire [877 et 878 de J. C. ].

(2) Comme on pourra le voir dans un mémoire, aussi reuf qu'intéressant, que M. Abel-Rémusat a lu depuis peu à l'Académie des inscriptions et belles-lettres. Il nous a été fort utile pour la composition de cette dissertation. Les faits curieux qu'il contient, donnent lieu à une foule de rapprochemens, qui tous jettent un grand jour sur la géographie de l'Orient, soit dans l'antiquité, soit dans le moyen âge.

(3) Selon les historiens Chinois, ce pays étoit gouverné, sous les rois Sassanides, par un officier qui portoit le titre de grand général de l'Orient. Nous trouvons dans la traduction Persane de Thabary ( ms. Persan de la B. R. n.o 63, p. 473 ), que tous les petits princes du Gilan, du Tabaristan et du Dilem, dépendoient alors d'un marzban ou commandant

Les

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