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>> quantité d'or et d'argent qui étoit incalculable. Quand les habitans virent les troupes des étrangers, ils se réunirent pour combattre, » et ils engagèrent autour des limites de leur ville une bataille terrible. >> Pendant une heure entière ils soutinrent la mêlée; et les campagnes >>furent couvertes, de sang. Comme il n'y avoit pas moyen de » s'enfuir, ni de secours à recevoir, et qu'on n'avoit d'autre espoir » que la mort, les troupes de la ville furent effrayées de la multitude » des infidèles, et elles tournèrent le dos. Les étrangers fondirent » aussitôt sur la ville l'épée à la main, firent un horrible carnage >>> et massacrèrent cent cinquante mille habitans. Il est impossible de » dire ou de mettre par écrit la quantite d'or, d'argent et de robes » de soie qu'ils prirent. On nous a raconté plusieurs fois, au sujet du » chorévêque de cette ville, nommé Tauthoug, qu'Ibrahim s'empara de son trésor, et qu'il fallut quarante chameaux pour l'emporter, » tandis que des boeufs sortirent hui cent six fois de sa maison. Il y » avoit dans cette ville huit cents églises où l'on disoit la messe. Ce » fut ainsi qu'un horrible carnage, et l'épée, qui portoit par-tout une » cruelle mort, détruisirent la belle et illustre ville d'Ardzen. Comment parlerai-je, en versant des larmes, de la chute de tant de >> princes et de prêtres, qui, privés de sépulture, furent la proie des bêtes » féroces! Que dirai-je des dames illustres qui furent emmenées cap»tives en Perse, avec leurs enfans, pour y subir la servitude, sans espoir d'être rachetés! Ce fut là le commencement de la ruine de » l'Arménie, et l'annonce déplorable de la destruction et de la chute » de l'Orient, peu à peu et année par année; car ce fut la première » ville de l'Arménie prise par la force, et dont les habitans furent » emmenés en captivité. Quand l'empereur Monomaque apprit cette » mauvaise nouvelle, il envoya une armée dans l'Orient, et il en » confia le commandement à Gamen (a), à Grégoire, fils de Vasag, » et à Libarid, frère de Rhad, hommes vaillans, qui s'avancèrent avec beaucoup de troupes dans l'Arménie, pour combattre les Persans. >> Lorsque les troupes Grecques furent arrivées dans l'Orient, Gamen, » Aaron [Arhon], et Grégoire, fils de Vasag, appelèrent avec eux » Libarid, prince Géorgien, et ils s'avancèrent jusqu'à un fort nommé

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(4) Ce général est le même que Caracalon, qui, comme nous l'avons vu dans Cédrénus, étoit surnommé le Brûlé, & Kazavμivos. C'est de ce surnom que les Arméniens ont formé le nom de Gamen qu'ils lui donnent.

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Gaboudhrou, dans le canton d'Ardchovid, dont ils apprirent que » les troupes Turques s'étoient emparées. Cependant, les Romains campèrent dans le canton d'Ardchovid, et aussitôt les étrangers » se portèrent contre le vaillant Libarid, qui avoit confié le soin » de faire la garde, pendant la nuit, au fils de sa sœur, Tchordovanel, >> qui étoit un homme fort et belliqueux. Les infidèles commencèrent » à l'attaquer pendant la nuit, de sorte que le bruit du combat parvint » jusqu'à Libarid, et qu'on vint lui dire que les troupes ennemies >> l'environnoient: C'est aujourd'hui, répondit-il, un samedi, et les »Géorgiens n'ont pas coutume de combattre un tel jour. Malgré cela, » Tchordovanel se jeta comme un lion, au milieu de la nuit, sur les étrangers, et engagea le combat. Au moment qu'il obtenoit l'avan»tage, une flèche vint le frapper à la bouche et lui traversa la gorge : >> c'est ainsi que cet homme fort et vaillant expira. Quand Libarid apprit » la mort de Tchordovanel, il se précipita au milieu du combat comme »une bête féroce, chassa les ennemis du champ de bataille et versa » des torrens de sang. Lorsque les troupes Romaines virent la vail» lance de Libarid, elles se retirèrent, prirent la fuite et le laissèrent » au milieu des ennemis, pour qu'il n'acquît pas une grande répu>>tation par son courage. Les infidèles, en voyant cela, se rallièrent, » et revinrent à la charge contre les Géorgiens. Au moment que le » combat étoit le plus acharné et que Libarid rugissoit comme un » lion dans les rangs des infidèles, un Géorgien qui étoit derrière lui,

coupa d'un coup de sabre les jarrets de son cheval, et il tomba à » terre, dans la mêlée, en criant: Je suis Libarid. Dans le même » moment, beaucoup de Géorgiens furent tués, d'autres prirent la fuite; » et Libarid fut emmené prisonnier, et conduit dans le Khorasan, » vers le sultan Thoghrul-Begh, qui le connoissoit déjà par ce qu'il » avoit appris de sa réputation et de son courage. Libarid resta deux » ans auprès du sultan, et il donna en divers lieux des preuves de sa » valeur : il trouva un Éthiopien (Khap'hschig, en arabe Habesch), » homme fort et vaillant; ils combattirent tous deux en présence du »sultan; Libarid fut vainqueur et tua l'Éthiopien. Thoghrul - Begh >> rendit alors la liberté à Libarid, et le renvoya avec de grands » présens chez les Romains. Quand il arriva à Constantinople, l'empereur Monomaque le revit avec le plus grand plaisir, et le

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>> renvoya aussi avec de grands présens dans son pays, auprès de sa

» femme et de ses enfans. Libarid étoit frère de Rhad et de Zoïad, » issus d'une race célèbre chez les Géorgiens par son courage. »

On voit, par ces diverses relations, que l'historien des Orpélians a cherché à relever la gloire de sa famille, en attribuant à Libarid tout le succès de cette bataille, et en dissimulant sa captivité. Quoi qu'il en soit, en combinant son récit avec ceux que nous avons déjà rapportés, qui sont tous inexacts ou partiaux en quelques points, et en les rectifiant l'un par l'autre, on peut espérer, de connoître, assez bien toutes les circonstances de cette guerre. Il ne nous reste plus maintenant qu'à voir ce que les écrivains Musulmans en racontent de leur côté. L'historien arabe Ibn-alathir est, à notre connoissance, le seul qui en fasse mention, et voici comment son récit est conçu :

في هذه السنة (سنة أربعين واربعماية ( غزا ابراهيم ينال الروم فظفر بهم وغنم وكان سبب ذلك أن خلقا كثيرا من العز بما ورا النهر قدموا عليه فقال لهم بلادى تضيق عن مقامكم والقيام بما تحتاجون اليه والراى ان تمضوا الى غزو الروم وتجاهدوا في سبيل الله وتغنموا وانا ساير على اتركم ومساعد لكم على امركم ففعلوا وساروا بين يديه وتبعهم ووصلوا الى مادز كرد و ارزن الروم وقاليقاد وبلغوا طرابزون وتلك النواحي كلها ولقيهم عسكر عظيم للروم والانجاز يبلغون خمسين الفا فاقتتلوا واشتد القتال بينهم وكانت بينهم على وقايع تارة يظفر هولا وتارة هو لا ثم كان اخر الامر الظفر للمسلمين فاكثروا القتل في الروم وهزموهم واسروا جماعة كثيرة من بطارقتهم وممن أسر فاربط ملك الانجاز فبذل في نفسه ثلثماية الف دينار وهذا ماية ألف فلم يجبه الى ذلك ولم يزل يجوس تلك البلاد وينهبها الى ان بقى بينه وبين القسطنطينية خمسة عشر يوما واستولى المسلمون على تلك النواحى فنهبوها وغنموا ما فيها وسبوا أكثر من ماية الف راس واخذوا من الدواب والبغال والعنايم والاموال مالا يقع عليه الاحصاء قيل ان الغنايم حملت على عشرة الاف عجلة وان في جملة الغنيمة تسعة عشر الف درع وكان قد دخل بلد الروم جمع من الغز يقدمهم انسان ينسب إلى طغرلبك فلم يوثر كثير اثر وقتل من أصحابه جماعة وعاد ودخل بعد ابراهيم ينال ففعل هذا الذي

( Ms. Arabe non coté, tome IV, folio s recto et verso ) ذكرناه

<< En l'an 440 de l'hégire [1048 et 1049 de J. C.], Ibrahim-Inal » fit une expédition contre les Romains, les vainquit et pilla leur

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>>pays. Voici quelle fut la cause de cet événement. Une troupe con»sidérable de Ghozz [les Ouzes] de la Transoxane étoit venue vers » Ibrahim-Inal, qui leur dit: Mon pays ne peut pas suffire pour vos » habitations et pour ce qui est nécessaire à votre consommation; il faut »entreprendre une expédition contre les Romains; vous combattrez dans » la voie de Dieu, et vous pourrez acquérir du butin. Je marcherai sur » vos traces, et je vous soutiendrai dans votre entreprise. Les Ghozz » agirent en conséquence, et se mirent en marche, d'après son avis. » Ibrahim les suivit bientôt. Ils s'avancèrent jusqu'à Melazkerd, Arzen»erroum et Kalikala (a), d'où ils pénétrèrent jusqu'à Trébizonde, >> et dans tout le pays qui en dépend. Une puissante armée de Romains »et ďAbkhaz (b), qui s'élevoit à cinquante mille hommes, s'avança » à leur rencontre. On en vint aux mains, et le carnage fut consi» dérable plusieurs fois on revint à la charge, et la victoire fut long» temps indécise; enfin elle resta aux Musulmans, qui tuèrent un grand »> nombre de Romains, les mirent en fuite et prirent une grande quantité de leurs généraux (,, les patrices), parmi lesquels étoit Libarith, roi des Abkhaz (c), qui offrit trois cent mille dinars » pour sa rançon. Il en présenta sur le champ cent mille, qu'on n'accepta » pas; et Ibrahim-Inal continua de parcourir tout ce pays et de le » ravager, jusqu'à la distance de quinze journées de marche de Constantinople. Les Musulmans se rendirent les maîtres de toutes » ces régions, saccageant et pillant tout ce qui s'y trouvoit; ils y firent >> plus de cent mille prisonniers, et prirent une quantité incalculable » de bêtes de somme, de mulets, de dépouilles et de richesses. On qu'il fallut dix mille chariots pour transporter leur butin,

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>> raconte

(a) Kalikala et Arzen-erroum sont ici deux villes distinctes, quoique nous ayons dit dans notre premier volume, page 69, qu'il paroissoit que ce fût la même chose. Selon les écrivains Arabes, Kalikala est la ville de Garin, et c'est sans doute la corruption du nom Armenien de uppri Punup Garin-k'haghak'h, qu'on donnoit à Théodosiopolis. Après la destruction d'Ardzen, ou Arzen-erroum, ses habitans passerent dans cette ville et lui donnèrent le nom de leur patrie. (*) On voit par plusieurs passages de Cédrénus (tome II, pages 718 et 761.), que les Géor giens etoient alors nommés souvent Abkhaz ou Abasges, 'Abuoyii.

(c) On lit dans le manuscrit byli, nom évidemment corrompu, qui ne peut être que celui

de Libarid, qui, dans cette bataille, commandoit les Géorgiens et fut fait prisonnier. Nous pensons qu'il faut le restituer ainsi by Lefarith. Comme ce prince avoit le suprême commandement des troupes Géorgiennes, que le roi ne se mêloit point de ce qui étoit relatif à la guerre, et que Libarid possédoit réellement la moitié du royaume, ainsi qu'on le verra bientôt, Ibn-atathir a bien pu avec quelque raison lui donner le nom de roi des Abkhaz.

>> dont la longueur occupoit en totalité un espace de dix-neuf mille cou» dées. Une autre troupe de Ghozz étoit entrée avant eux sur le ter»ritoire des Romains; mais le chef (a) qui la commandoit, étoit » revenu auprès de Thoghrul-Begh, sans avoir pu faire grand'chose, » et après avoir perdu une grande partie de ses compagnons. Ce fut » après lui qu'Ibrahim-Inal entreprit son expédition et fit ce que nous

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>> avons raconté. »

Le même auteur raconte ensuite (tom. IV, folio 10 verso) comment Libarid recouvra sa liberté, en l'an 441 de l'hégire [ 1049 et 1050 de J. C.], un an après avoir été fait prisonnier. Le sultan ThoghrulBegh exigea, à cette époque, que son frère Ibrahim-Inal lui livrât la ville de Hamadan et les forteresses qu'il possédoit dans le Kouhistan; celui-ci s'y refusa, et il en résulta une rupture entre eux. Leurs troupes en vinrent aux mains: Inal fut vaincu, et contraint de se réfugier dans la forteresse de Sermadi, zl, où son frère vint l'assiéger. Pendant que Thoghrul-Begh étoit devant ce fort, il envoya demander à Nasir-eddaulah, fils de Merwan, roi du Diarbekr, de faire la prière publique en son nom, pour marque de sa sujétion. Ce prince y consentit. mei d'l Jusly

الدولة بن مروان يطلب منه اقامة الخطبة له في بلاده فأطاعه وخطب له ,Le fils de Merwan possédoit une partie de l'Arménie . في ساير ديار بكر

avec une portion de la Mésopotamie, et étoit feudataire de l'empereur grec. Il paroît, quoique l'auteur Arabe ne le dise pas, que ce monarque profita des rapports que son vassal eut alors avec Thoghrul-Begh, pour faire la paix avec lui; car il dit que, dans ce temps, l'empereur écrivit au sultan, et qu'il lui envoya de grands présens, en demandant de conclure un traité auquel ce dernier consentit. L'empereur alors envoya dire au fils de Merwan de faire tous ses efforts pour obtenir le rachat du roi des Abkhaz (Libarid). Nasir-eddaulah dépêcha aussitôt pour cet objet le docteur de la loi Abou-abd-allah, fils de Mihran; et Theghrul-Begh renvoya son prisonnier sans rançon. Les deux princes rivalisèrent de générosité, et l'empereur envoya de grands présens au sultan pour le prix de la liberté de Libarid, et il fit construire une

(4) Ce chef étoit sans doute Asan le Sourd, dont il est question dans le long morceau de Cédrénus que nous avons rapporté dans cette note; mais, selon cet historien, le général Turk fut tué dans cette expédition.

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