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celle de l'église Romaine, n'a pas fait attention à ce surnom; il a confondu notre auteur avec un autre Étienne, archevêque du même pays, qui vivoit cinq siècles avant, dans le commencement du VIII.° siècle (1), et il lui a attribué des ouvrages composés par ce dernier. Étienne Orpélian est très célèbre chez les Arméniens, tant par l'influence que sa dignité ecclésiastique et la puissance de sa famille lui donnèrent sur les événemens politiques de son siècle, que par sa science et ses opinions théologiques. Pendant toute sa vie, il se montra le zélé défenseur de la doctrine d'Eutychès ou des Monothélites, qui étoit alors et est encore suivie par la plus grande partie des Arméniens; et, dans toutes les occasions, il fut le plus ardent antagoniste des Arméniens qui se réunirent, soit aux Grecs, soit aux catholiques de la communion Romaine.

Il naquit vers le milieu du XIII. siècle de notre ère, dans la province de Siounie, dont il devoit être un jour le chef spirituel. Il étoit le second fils de Darsaïdj, qui étoit prince d'Orodn dans ce même pays, et frère du grand prince Sempad, alors chef de la race des Orpélians. Sa mère se nommoit Arouz Khathoun; elle étoit fille d'un émir Musulman qui habitoit aussi dans le pays de Siounie. Elle avoit embrassé la religion chrétienne, et reçu le baptème en épousant le prince Darsaïdj (2).

Il paroît que, dès son enfance, son père l'avoit destiné au sacerdoce, pour qu'il occupât la première dignité ecclésiastique de ses états. En l'an 1280 de J. C., 729 de l'ère

*

(1) Conciliatio ecclesiæ Armenicæ cum Romanâ, tom. II, pars 11,

p. 136 et passim.

(2) Voyez ci-après, Histoire des Orpélians, chap. VIII.

Arménienne, Darsaïdj rassembla un grand nombre d'évêques, de vartabieds et d'abbés, dans le monastère de Noravank'h [le nouveau monastère ], dans le canton de Vaïots-dsor, pour qu'ils assistassent à l'ordination de son fils comme prêtre; ce qui se fit avec beaucoup de cérémonies (1). Cinq années après, l'archevêque de Siounie mourut; et Darsaïdj, alors prince des princes d'Arménie et chef de la famille Orpéliane, après la mort de son frère Sempad, envoya son fils Étienne en Cilicie, auprès du grand patriarche des Arméniens, qui résidoit à Hrhomgla, sur les bords de l'Euphrate, pour qu'il le sacrât archevêque du siége qui étoit vacant (2).

Peu de temps avant l'arrivée d'Étienne dans la Cilicie, le patriarche Jacques I.", surnommé Kidnagan [ le savant ], étoit mort le dimanche de Quadragésime de l'an 1287 de J. C., 736 de l'ère Arménienne, et il fut reçu par ie roi Léon III à Sis, alors capitale de l'Arménie, avec tous les égards et les marques d'honneur dus à sa haute naissance. Ce prince le retint auprès de lui, jusqu'à ce qu'on eût nommé un autre patriarche, qui pût lui conférer le caractère spirituel qu'il venoit demander. Étienne Orpélian assure même que le roi Léon l'engagea à rester en Cilicie, et lui offrit la dignité patriarcale, qu'il refusa, si nous nous en rapportons à son témoignage, qui ne nous paroît pas mériter en ce point une entière confiance.

On rassembla alors un grand concile, composé d'évêques et de vartabieds, pour procéder à l'élection d'un

(1) Voyez ci-après, Histoire des Orpélians, chap. IX.

(2) Ibid. chap, 1x, et Tchamtchéan, Hist. d'Arm. tom. III, p. 283.

nouveau patriarche. Le roi Léon engagea fortement les pères du concile à choisir Grégoire d'Anazarbe, qui jouissoit d'une très-grande considération en Arménie. Les moines et les abbés le rejetèrent avec emportement, à cause de la fierté et de la hauteur de son caractère, mais bien plus encore à cause de son attachement pour la doctrine de l'église Romaine. D'autres voulurent faire élire Étienne Orpélian; mais on rejeta presque unanimement cette proposition, parce qu'on le regardoit comme un homme extrêmement dur et rempli de vanité (1). Le concile choisit enfin, d'un consentement unanime, un certain Constantin, né dans le bourg de Kadouk en Cilicie, élevé ensuite dans l'église métropolitaine de Sis, et alors archevêque de Césarée en Cappadoce. On le nomma Constantin II. Il fut sacré en grande pompe dans l'église de Sis, où il avoit été élevé, le jour du samedi saint; et, le lendemain, jour de Pâque, il sacra solennellement Étienne métropolitain de Siounie, avec des cérémonies que celui-ci décrit avec complaisance dans son histoire. Étienne s'en retourna bientôt après dans sa patrie (2), où, en présence de tous les évêques du pays, il fut investi par son frère Darsaïdj de sa nouvelle dignité.

Les archevêques ou métropolitains de Siounie [Empu oh, médrabolid] occupoient alors un rang fort distingué en Arménie; ils résidoient dans le bourg de Dathev, ou Sdathev, fondé sur le lieu où furent enterrées, suivant les traditions de l'église Arménienne, les reliques d'Eustathius,

(1) Michel Tchamtchéan, Hist. d'Arm. tom. III, p. 283 et 284. (2) Voyez ci-après, Histoire des Orpélians, ch. IX. - Tchamtch. Hist. d'Arm. tom. III, p. 284.

l'un des soixante-douze disciples de J. C. Cet endroit étoit situé au midi du fort d'Orodn, dans le petit canton de ce nom, dépendant du pays de Sisagan, compris dans la province de Siounie.

Étienne Orpélian fut à peine élevé sur le trône archiépiscopal de Siounie, qu'enorgueilli de la haute dignité qu'il occupoit et de la puissance de sa famille, il se conduisit, envers les évêques qui lui étoient subordonnés, avec la plus grande insolence, de sorte qu'il devint l'objet de la haine universelle. Cette conduite excita de grands troubles dans le pays. De tous les évêques Siouniens qui résidoient alors à Dathev, il y en eut deux, nommés Haïrabied et Jean, qui, dans toutes les occasions, se montrèrent les plus ardens antagonistes d'Étienne, et ne cessèrent de lui susciter des désagrémens, comme on pourra le voir dans l'histoire des Orpélians. Étienne fut même obligé d'avoir recours contre eux à la puissance d'Arghoun Khan, empereur des Mongols de Perse, qui le confirma dans sa dignité ecclésiastique par un iarlikh ou édit suprême. Le caractère dur et orgueilleux de l'archevêque n'étoit pas, à beaucoup près, la seule cause des divisions qui déchiroient alors l'église de Siounie. Depuis plusieurs siècles, la plus grande partie de l'Arménie avoit embrassé le monothélisme ou les erreurs d'Eutychès, et Étienne Orpélian étoit, à cette époque, l'un des plus chauds partisans des opinions de cet hérétique. C'étoit là peut-être une des raisons qui l'avoient empêché d'être choisi patriarche en Cilicie, parce qu'alors la doctrine de l'église catholique étoit professée par les rois Arméniens de ce pays, et qu'elle étoit adoptée par un grand nombre de membres du clergé. Quoique la plus grande partie de l'Arménie fût occupée par les sectateurs du monothé

lisme, la foi orthodoxe comptoit cependant encore un grand nombre de défenseurs dans ce pays, ce qui ne contribuoit pas peu à perpétuer et à augmenter les malheurs de ce royaume, continuellement ravagé par les armées des Grecs, des Géorgiens, des Arabes, des Persans et des Turks.

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Il paroît que les conquêtes que les rois de Géorgie firent dans l'Arménie pendant les XII. et XIII. siècles, contribuèrent puissamment à y ranimer le parti attaché à la doctrine orthodoxe et qui admettoit l'autorité du concile de Chalcédoine, rejetée par ses adversaires; aussi Étienne déplore-t-il avec amertume, dans un ouvrage dont nous parlerons bientôt, le triste état de ce qu'il appelle l'église orthodoxe. Voyez, dit-il, comment sont les membres les plus illustres » et les plus distingués de notre église ; ils languissent dévorés » par la faim: ils ont fait une chute dont ils ne se releveront jamais; ils sont privés des grâces du fils de Dieu. La » Cilicie toute entière est tombée, elle qui étoit le centre » de notre gloire : les grandes villes qui sont au pouvoir » des Romains, sont aussi dans l'erreur; bien plus, elle » s'étend jusque parmi nous; on la prèche publiquement » dans la ville royale de Téflis, dans Ani, l'antique residence » des rois Pagratides, dans le pays de Schirag, jusque dans » Tavrej Schahasdan (Tébriz), et même dans beaucoup » d'autres endroits. Qui d'entre les Arméniens est resté attaché » à la foi de ses pères! il n'y en a plus qu'un très-petit » nombre; encore sont-ils cachés dans quelques lieux obscurs. » O. temps vraiment digne de pitié! nous qui sommes les » ministres de Dieu, nous transgressons ses commande» mens (1)! »

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() Ահա տեսէք ղի դեղեցիկ եւ փառաւոր անգամքն մերայն են,

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