Images de page
PDF
ePub

diens (1). Il ne faut pas nous laisser abuser par cette expression, dont les Grecs et les Latins se sont servis d'une manière aussi erronée que nous l'avons fait quelquefois ; il seroit fort possible que les Indiens de Simocatta ne fussent pas autres que les Chinois. On a pu déjà remarquer qu'on ne parvenoit chez eux qu'après avoir traversé l'Asie centrale. Cet auteur ajoute encore qu'ils habitoient vers le nord, qu'ils étoient blancs, et que c'étoit de chez eux que l'on tiroit les vers à soie, qui s'y trouvoient en grande quantité, et de diverses couleurs, et dont les barbares avoient un soin tout particulier (2). On verra bientôt que la Chine fut toujours classée, chez les occidentaux, parmi les pays du nord, à cause de la direction de la route qu'on tenoit pour y aller; et, d'ailleurs, si Simocatta avoit voulu parler des véritables Indiens, il n'auroit pas remarqué que ceux-ci étoient blancs, puisque le nom d'Indien étoit presque devenu, dans l'usage ordinaire, synonyme de la couleur noire. On a donc tout lieu de croire qu'il s'agit ici des Chinois. Chez les Chinois, la capitale se nomme King-tian [ résidence de la cour ]: pourquoi la ville de Choubdan ne seroit-elle pas la capitale de la Chine, sous la dynastie des Thang? Cette ville est appelée [Koumdan], dans le monument relatif à la religion chrétienne, trouvé en Chine par les Jésuites, qui

......

(1) Ἡ δὲ Χουβδάν, δύο μεγάλοις διείληπται ποταμοῖς... · ἐλέφαντες δὲ τῷ ἔθνε πολλοί. Τοῖς δὲ Ἰνδοῖς κατὰ τὰς εμπορείας συναναμίγνυνται Theoph. Simocatt. lib. VII, cap. 9, p. 177.

(2) Τούπις γδ φασι πει τα βόρεια πεβαμμένες Ινδούς, και λευκές πεφυκέναι. Οἱ δὲ σκώλικες, ἐξ ὧν τὰ σηρώων καθέτηκε νάματα, πάνυ παρὰ τῷ τοιέτῳ ἔθνε πολλοὶ ἐναλλάξ, καὶ ποικίλλω την χροιάν κεκτημένοι, τήν τε περί Τα τοιαυτα ζῶα φιλοτεχνίαν φιλοτίμως ἀσκῖσιν οἱ βαρβάροι. Theoph. Simocatt. lib. VII, cap. 9, p. 177.

date de l'an 782 de J. C. (1), un peu plus d'un siècle après Simocatta (2). On retrouve ce même nom dans les Arabes, pour la capitale de la Chine. Les voyageurs Arabes, publiés par Renaudot (3), Masoudy (4), et d'autres auteurs, l'appellent la Khoumdan. S'il en est ainsi, c'est une preuve sans réplique que les Romains savoient, au commencement du VII. siècle, qu'on pouvoit aller par terre, à travers l'Asie, jusqu'au pays de la soie, à l'extrémité orientale de cette partie du monde.

خمدان

Avant cette époque, ou, comme s'expriment les écrivains Chinois, au temps des trois royaumes, c'est-à-dire, dans le III. siècle, les Asi, ou les Asiens, qui habitoient le territoire de la ville actuelle de Bokhara, et qui sont les mêmes que les Sogdiens, faisoient le commerce exclusif de la soie. Ils cachoient aux Romains la véritable route de la Chine, et ils empêchoient, de tout leur pouvoir, l'établissement des communications que ceux-ci vouloient ouvrir avec les Chinois: ce fut là même, selon ces derniers, le motif qui obligea Marc-Aurèle à envoyer son ambassade par les mers du midi. Tous les faits que nous avons rapportés prouvent donc,

(1) Ce monument a été trouvé à Si-'an-fou, ville de la province de Chen-si, située à l'extrémité N. O. de la Chine. Elle fut longtemps la résidence des empereurs de la dynastie des Thang, et je crois que c'est d'elle-même qu'il est question dans le monument, sous le nom de Choumdan.

(2) Anciennes relations des Indes et de la Chine, traduites de l'arabe par l'abbé Renaudot, p. 237. — Assemani, Biblioth. orient. tom. III, pars 11, p. 55o.

(3) Anciennes relations des Indes et de la Chine, par Renaudot, p. 64, 181 et 182.

(4) Moroudj-eddheheb,

recto et 62 verso.

ms. de Constantinople, tom. 1.", fol. 61

à ce qu'il nous semble, que, depuis le commencement de l'ère chrétienne au moins, les Chinois ont été connus des anciens sous le nom de Sina, et qu'ils l'ont toujours été, depuis cette époque, sous des dénominations à-peu-près pareilles, et évidemment d'une même origine. Si nous ne craignions d'être entraînés trop loin de notre sujet, nous pourrions encore ajouter d'autres preuves à l'appui de notre opinion. Nous croyons en avoir assez dit pour qu'elle soit hors de doute. Nous nous bornerons maintenant à parler de ce qui peut jeter quelque jour sur l'origine de la race des Orpélians: nous nous occuperons pour cela de l'origine même du nom de la Chine, et nous trouverons encore, en discutant ce point, les moyens de reporter jusqu'au III. siècle avant J. C., l'époque où ce pays fut connu pour la première fois dans l'occident.

L'historien des Orpélians ne s'exprime pas avec assez de clarté, pour que nous puissions, d'après son récit, déterminer d'une manière précise l'époque de l'établissement de cette famille en Géorgie. On y voit seulement que les princes de cette race vinrent dans ce pays, sous le règne de Kékaous, l'un des anciens rois de Perse, de la dynastie que les Orientaux appellent des Kéans, ou des Kaïanides; ce qui donne lieu de croire, pour tout renseignement historique, que cet événement arriva avant la conquête de la Perse par Alexandre. Un autre ouvrage nous fournira quelques éclaircissemens sur ce même fait; c'est l'Histoire de Géorgie, composée en géorgien, au commencement du XVIII. siècle, par Vakhtang V, roi de K'harthel (1), dont

(1) Ce prince étoit fils du roi Léon, fils de Vakhtang IV; il succéda en 1703 à Kaïkhosrou, fils de George XII, frère de Vakh

M. de Klaproth a inséré divers fragmens dans son Voyage au Caucase. Comme cet historien a évidemment puisé aux mêmes sources que l'archevêque de Siounie, ils s'expliqueront P'un par l'autre. Vakhtang diffère de ce dernier, en ce qu'il place sous le règne de Kékhosrou l'arrivée des Orpélians: cette contradiction ne vient que de ce que l'auteur que nous publions a confondu le roi Kékaous avec son successeur Kékhosrou, dont il n'a fait qu'un seul prince, auquel il donne les deux noms, comme on peut le voir dans son texte même. Voici ce que dit Vakhtang, après avoir parlé de la conquête de la Géorgie par Kékhosrou. « Peu d'années après, pendant >> que Kékhosrou étoit fort occupé, et qu'il commençoit » contre les Touranians (1) une guerre pour venger le sang » de son père, les Arméniens et les Géorgiens saisirent ce

tang IV, et occupa le trône de ses ancêtres sous la souveraineté du roi de Perse. Comme il ne voulut pas abandonner la religion chrétienne, il fut remplacé, en 1711, par son frère lesseï. En 1719, Vakhtang condescendit aux desirs du roi de Perse; il embrassa le musulmanisme et fut réintégré dans sa dignité: mais, bientôt après, il quitta sa nouvelle religion, ce qui lui attira de grandes guerres avec les Persans. En 1722, il fut détrôné par Constantin III, roi de Kakhéthi, qui professoit la loi de Mahomet, et portoit le nom de Mohammed-Kouly-Khan. Vakhthang implora le secours des Turks, qui chassèrent Constantin du pays de K’harthel, mais sans y rétablir le roi légitime, qui, en 1724, se retira en Russie avec toute sa famille, et mourut à Astrakhan en 1737. Sa Chronique universelle de Géorgie a été composée d'après les manuscrits qui, de son temps, étoient conservés au monastère de Gélathi, dans le royaume d'Imireth, et dans celui de Mtskhétha, auprès de Téflis. Il doit en exister plusieurs exemplaires en Russie; il s'en trouvoit un à Rome.

(1) Dans cet endroit, et dans tous les autres du même ouvrage, où il est question de ces Touranians, l'interprète de M. Klaproth

s'est servi du nom de Turks.

>> moment favorable pour se rendre indépendans, et pour >> tuer les gouverneurs Persans. Dans le même temps, vingt» huit familles de ces Touranians, qui avoient été vaincus » par Kékhosrou, passèrent la mer de Gourgani [ la mer » Caspienne], longèrent le Mtkvari [ le Cyrus], et arri» vèrent à Mtskhétha. Ils y tinrent conseil avec le mama»sakhli (1), et lui promirent du secours contre les Persans. >> Ce prince fit part de leur offre à tous les Géorgiens, qui >> firent alliance avec eux, par la crainte qu'ils avoient des » Persans. Ces Touranians se répandirent ensuite dans le » pays; mais la plus grande partie d'entre eux habita dans » une vallée profonde située près d'une montagne très-escar»pée, dans le voisinage de Mtskhétha. Ils avoient demandé >> cet endroit au mama-sakhli, et ils y construisirent une » forteresse qu'ils appelèrent Sark'hiné, c'est-à-dire, Château. » de fer (2). Its vécurent en bonne intelligence avec les » Géorgiens; et comme les deux peuples craignoient une >>> invasion des Persans, ils fortifièrent leurs châteaux et » leurs villes. Quand il venoit des fugitifs de la Grèce, de » la Syrie, et de Khazarethi, on les recevoit avec bienveillance, pour avoir des auxiliaires contre les Persans (3). » Ces détails nous donnent lieu de croire que les Orpélians

>>

כל

[ocr errors]

(1) C'étoit le titre des anciens princes du pays. Les deux mots asas dsds mama, et bsbmo sakhli, signifient en géorgien,

la maison.

géorgien, Père de

(2) Ce nom est dérivé des deux mots Géorgiens US sa, particule possessive, et mJobs rk'hina, fer. რქინა

(3) Jul. von Klaproth, Reise in den Kaukasus und nach Georgien, tom. II, 1.Te partie, p. 80 et 87.

« PrécédentContinuer »