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raisons au lieu d'une pour demander l'établissement d'un phare à l'entrée de la Gironde; car des marchands venaient à Bordeaux non-seulement y chercher des vins, mais aussi y porter des peaux et des cuirs réputés de tout temps et aujourd'hui encore pour leur finesse et leur bonne qualité. »

Si nous passons du domaine des conjectures dans celui de l'histoire, nous voyons le second phare, bâti au quatorzième siècle (1562-1370) par les ordres du fameux prince Noir. Ce phare s'élevait de 48 pieds au-dessus du sol. Il était terminé par une plateforme sur laquelle on allumait un feu de bois qu'un ermite était chargé d'entretenir. Cet ermite percevait pour sa peine un droit sur chaque navire de << deux gros de sterling. » On croit généralement que le rocher sur lequel la tour se trouvait était encore réuni à cette époque à la côte de Médoc. La configuration du terrain, la distance, la profondeur des passes, les ravages que fait encore la mer à Soulac et à la pointe de Grave viennent à l'appui de cette opinion.

Le phare bâti par le prince Noir n'était pas tout à fait solitaire sur son roc; on lui avait donné pour compagne une chapelle élevée en l'honneur de la vierge Marie, et plusieurs maisons, construites vers le même temps autour du lieu saint, formèrent peu à peu une espèce de village. C'est là qu'habitaient l'ermite, ses aides, et probablement un petit nombre de pêcheurs et de pilotes.

Une gravure qui doit être du treizième siècle représente cette ancienne tour. C'est un édifice de

forme octogonale, à ouvertures quadrangulaires mais allongées. La tour est doublée, si l'on peut dire, jusqu'à la hauteur du premier étage, d'un revêtement extérieur en pierre formant contre-fort. Quelques-unes des maisons qui occupaient jadis cet

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emplacement existaient encore à l'époque où fut exécuté ce dessin.

Le phare qui fait aujourd'hui, et à si juste titre, l'admiration des visiteurs fut construit, non sur les

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ruines de l'ancien, mais à côté. Commencé, en 1584, par Louis de Foix, architecte de Paris, et auquel Philippe II confia plus tard la construction de l'Escurial, il ne fut achevé qu'en 1610, par son fils. La tour avait, y compris le massif de la plate-forme, 60 pieds de haut, 70 pieds en y ajoutant la lanterne en pierre. A cette époque, le terrain était tout à fait, et depuis longtemps sans doute, séparé du continent et formait une île d'une certaine étendue, « l'isle de Cordouan, » dit Louis de Foix lui-même, dans le contrat passé avec les autorités de la Guyenne pour la construction de la tour. Cette île a disparu depuis, ainsi que la chapelle et les maisons dont nous avons parlé; il n'y a plus aujourd'hui, au pied du monument, que le roc nu et quelques langues de sable complétement recouvertes à mer haute.

Le phare, tel qu'il sortit des mains des deux de Foix, se composait d'une plate-forme circulaire que défendait un large parapet, et de la tour, qui était divisée en quatre étages, non compris la lanterne. Le rez-de-chaussée présentait un grand vestibule de forme carrée et quatre petits réduits qui servaient de logements et de magasins. Des escaliers, placés dans les embrasures de la porte d'entrée et des deux fenêtres, conduisaient dans les caves et dans la citerne. A droite et à gauche de cette porte étaient placés, avant la révolution, les bustes de Henri III et de Henri IV. Au premier étage, qui portait le titre, probablement peu justifié, « d'appartement du roy,» était une salle de mêmes dimensions que le vestibule, mais plus richement décorée, d'où l'on

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