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d'acide. Enfin il précipite la matière jaune et verte de la bile.

Analyse. Pour démontrer l'acide hydrochlorique dans ces matières organiques, il faut d'abord constater leur réaction acide par le papier de tournesol, leurs caractères physiques, et si elles donnent ou non des vapeurs blanches à l'air, ou à l'approche d'un bouchon imprégné d'ammoniaque.

Lorsque les matières sont solides comme le tube intestinal ou solides et liquides comme celles des vomissements, ou contenues dans les organes gastriques, on les met à macérer, à deux reprises différentes, dans s. q. d'eau distillée, dans le but de dissoudre, d'en séparer l'acide hydrochlorique. M. Devergie conseille de faire bouillir, et qu'ainsi, on les épuise plus complétement de cet acide. On passe ensuite à travers un linge serré, on filtre même si la filtration en est facile, et l'on soumet le liquide à la distillation. Si on opérait sur des liquides organiques, le vin, le cidre, la bière, on les soumettrait à la distillation sans opération préliminaire.

Manière de procéder. M. Orfila distille les liquides organidans une cornue, ques à feu nu, ou au bain de sable, comme nous l'avons indiqué en parlant de l'acide étendu. M. Christison, ayant remarqué, qu'on n'obtenait ainsi qu'une faible portion d'acide, lequel, en ce cas, est retenu par les matières organiques, fait qui a été confirmé par les expériences de M. Devergie, opère la distillation au bain de chlorure de calcium, c'est-à-dire, à une température de 240 °. A cet effet, on introduit les matières organiques dans un matras, auquel est adapté un tube coudé assez large, communiquant avec un récipient contenant un peu d'eau et constamment entouré d'eau froide. La branche du tube qui communique au matras, offre un renflement en boule. On plonge le matras jusqu'à son col, dans un bain composé de parties égales d'eau et de chiorure de calcium; on le fixe; on chauffe jusqu'à ébullition; on continue la distillation jusqu'à ce que le liquide du matras soit évaporé presque à siccité; on délaie le résidu dans de l'eau distillée, et l'on procède à une nouvelle distillation. On peut aussi opérer la distillation dans une cornue ordinaire.

On reconnaît l'acide hydrochlorique dans le produit de la distillation, par le papier de tournesol qui est rougi, par le nitrate d'argent qui donne un précipité caractéristique: une portion saturée par la potasse ne doit pas donner d'odeur ammoniacale (preuve qu'il n'y a pas d'hydrochlorate d'ammoniaque); évaporéé ensuite jusqu'à siccité, le résidu chauffé dans un tube avec du sesqui-oxyde de manganèse et d'acide sulfurique, dégagera du chlore. Avant de soumettre le liquide à ces expéFiences, on s'assure par l'odeur, s'il ne s'est pas dégagé d'autres produits volatils. (Alcool, éther, acides acétique, hydrocyanique.

Comme le nitrate d'argent est le réactif commun de l'acide kydrochlorique et des chlorures, et que les matières organiques solides et liquides contiennent du chlorure de sodium, on pourrait commettre une erreur, si on les traitait directement par ce réactif. La distillation a pour but de séparer non-seulement l'acide hydrochlorique des matières organiques, mais encore des chlorures non volatils. Quoiqu'on opère à une température très-élevée, on ne parvient pas d'après M. Devergie à les en dépouiller complétement. Dans ces recherches, il y a un certain nombre d'erreurs à éviter et qu'il est bon de signaler.

1o Les liquides organiques tenant en solution du chlorure de sodium, de potassium, etc. et un acide fort, le sulfurique, le phosphorique, donneraient à la distillation un produit qui offrirait les mêmes réactions. Aussi, faut-ils'assurer, si le résidu de la cornue, après avoir été délayé dans de l'eau distillée et filtré, ne contient pas ces acides ou leurs sels, soit par l'eau de baryte, la potasse, l'acide hydrosulfurique, soit en l'évaporant jusqu'à siccité. On constaterait alors la nature et la quantité du précipité.

20 L'hydrochlorate d'ammoniaque est volatil; il existe dans la salive, le suc gastrique et plusieurs autres liquides; il se forme par la décomposition spontanée ou par le feu des matières organiques, surtout en présence du chlorure de sodium; il est d'ailleurs donné comme médicament. Si les liquides renfermaient en même temps un acide volatil, l'acétique par

exemple (le suc gastrique en contient), le produit distillé pré– senterait les mêmes réactions que celui qui proviendrait de l'acide hydrochlorique et des mélanges organiques.

3o L'acide hydrocyanique sert de médicament : il se forme dans quelques circonstances particulières que nous indiquerons plus tard; il est volatil; il donne par l'azotate d'argent un cyanure d'argent analogue au chlorure, mais qui en diffère parce qu'il est soluble à chaud dans l'acide azotique, et qu'il est décomposable par la chaleur : il faudrait donc constater ces caractères distinctifs.

4o L'acide hydrochlorique existe naturellement d'ans l'estomac, ou plutôt, d'après les expériences de Tiedmann, Gmelin, Children, etc., il est sécrété durant l'acte de la digestion, et même en quantité assez notable dans certains états morbides de cet organe. Prout, dans le pyrosis, en a retiré jusqu'à 2 gram. L'estomac et les matières qu'il contient, pourraient donc donner un produit distillé, contenant de l'acide hydrochlorique, quoique cet acide n'ait pas été donné comme poison.

Ces circonstances étant connues, on ne devra se prononcer affirmativement, dans une expertise légale, qu'autant qu'on aura évité ces causes d'erreurs, que les réactions seront très-manifestes, et que, surtout, la symptomatologie et les altérations pathologiques viendront corroborer le résultat des analyses.

Taches d'acide hydrochlorique sur les vêtements.

L'acide hydrochlorique rougit les vêtements verts, bleus, marrons, noirs, etc., dont la couleur n'est point solide. Les taches, si elles sont récentes, donnent des vapeurs à l'air ou avec l'ammoniaque; elles sont d'un rouge plus clair et ne sont point humides comme celles de l'acide sulfurique, et ne deviennent pas jaunes comme celles de l'acide azotique. Les tissus ne sont point corrodés, ne se déchirent pas aussi facilement par l'extension, comme lorsqu'ils ont été atteints par les deux acides précités. Pour démontrer la nature de ces taches, on constate leur réaction acide, leurs caractères physiques; on les sépare des parties non tachées; on les divise par petits morceaux; on les

introduit avec s. q. d'eau, dans un même appareil distillatoire que celui des matières alimentaires et du tube intestinal, pour en retirer l'acide hydrochlorique : les mêmes réflexions leur sont applicables. Comme contre épreuve, il faut soumettre aux mêmes expériences les portions des mêmes tissus non tachés, et pour corroborer les résultats analytiques, agir aussi sur ces tissus qu'on aurait préalablement imprégnés d'acide hydrochlorique.

Effets toxiques. Quoique l'usage de l'acide hydrochlorique soit assez fréquent dans les arts et en médecine, nous ne saVous encore que fort peu de chose sur ses effets toxiques. Les auteurs disent qu'il agit à la manière des autres acides; mais, ils fondent plutôt leurs assertions d'après l'analogie chimique et les expériences sur les animaux que sur l'observation directe, car, nous n'avons à notre connaissance que deux cas d'empoisonnement chez l'homme, dont l'un est même douteux. D'après M. Orfila, l'acide hydrochlorique injecté dans les veines, produit immédiatement la mort en coagulant le sang. 4 à 8 gram. de cet acide fumant étant introduit dans l'estomac d'un chien; aussitôt, grand malaise, expiration de vapeurs blanches par les narines et par la bouche; au bout de quelques minutes, vomissement de matières d'un brun verdâtre, filantes; cris plaintifs; mort en quatre ou six heures, précédée de mouvements convulsifs très-violents, surtout des muscles du cou et de l'épine; la tête se renverse fortement en arrière. Autopsie muqueuse gastrique enflammée, d'un rouge cerise dans toute son étendue, surtout aux environs du pylore; en cet endroit, elle offre des taches noires ou d'un rouge excessivement foncé, qui sont des véritables escarres, et qu'on pourrait prendre pour du sang extravasé. Dans quelques cas il y a eu perforation de l'estomac. Les matières des vomissements celles contenues dans l'estomac ou épanchées dans le péritoine, répandaient des vapeurs blanches à l'air et offraient une réaction très-acide. Quant aux effets toxiques et aux altérations pathologiques chez l'homme, nous ne croyons mieux faire que de rapporter les deux observations suivantes :

Observ. Ire, Louis Grenier, scieur de pierre, agé de trente-sept

ans, fait une chute sur la tête, le 7 juillet 1805, et reste nutête plusieurs heures au soleil : le soir, violente céphalalgie, délire, grande agitation; le 10, délire furieux. Transporté le 13 à l'Hôtel-Dieu; face animée, yeux rouges, étincelants, délire, agitation, pouls développé, fréquent, tendu : saignée du pied, petit lait pas de soulagement. Le 13, délire plus violent, pouls moins fort et moins fréquent : saignée de la jugulaire, eau de veau. Le 14, même état : sangsues au cou, bain de pieds avec 45 gramm. (1 once et 112) d'acide hydrochlorique. Cette quantité d'acide est administrée par erreur par la bouche, pour du petit lait. Le soir, agitation plus grande; peau brûlante et aride; pouls petit, concentré; langue d'un rouge de feu, lèvres noirâtres; hoquet, effort de vomissements; épigastralgie des plus vives: magnésie, gomme édulcorée. Dans la nuit, vomissements de matières jaunes. Le 15, peau froide, gluante; épigastralgie violente; pouls extrêmement fréquent; délire continuel; mort à 3 heures de l'après midi. Autopsie : lèvres noires, langue brune, épaissie, dure, sèche; pharynx et œsophage d'un rouge pourpre, excorié en deux ou trois endroits; estomac épaissi enflammé à l'extérieur; sa muqueuse se détache par lambeaux dans la plus grande partie de son étendue, et avec la plus grande facilité; elle offre des taches gangreneuses dans le grand cul-de-sac; duodenum un peu épaissi; jejunum perforé par un ver lombricoïde; arachnoïde épaissie, opaque, injectée ainsi que la pie-mère et le cerveau; sérosité abondante entre les circonvolutions et dans les ventricules. (Observation communiquée à M. Orfila par M. Serres.)

Il est de toute évidence que, les symptômes cérébraux, les lésions du cerveau et de ses membranes n'appartiennent pas à l'acide hydrochlorique, et, qu'au contraire, les symptômes gastriques, les altérations du tube en sont le résultat. Il n'est pas possible, en raison des circonstances particulières qu'offre cette observation, d'apprécier l'effet éloigné de ce poison. On ne peut douter cependant de l'extrême analogie qu'il offre avec les acides sulfurique et azotique, quant aux effets et aux altérations pathologiques.

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