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mort-aux-rats, récemment sublimé, est en masses transparentes comme du cristal, incolore ou faiblement coloré en jaune; mais il perd assez promptement sa transparence de l'extérieur à l'intérieur, et on le trouve, dans le commerce, en morceaux irréguliers, durs, pesants, opaques, d'un blanc laiteux, ou ayant l'aspect et la cassure de la porcelaine, parfois transparent à l'intérieur, ou offrant des veines vitreuses d'arsenic non devenu opaque, ou de veines jaunâtres de sulfure jaune d'arsenic. Cependant, on distribue ordinairement l'acide arsénieux en poudre plus ou moins fine, ressemblant par son aspect et sa blancheur, à du sucre pulvérisé ou à de la farine; mais son poids est relativement plus grand, et, vue à la loupe, cette poudre se compose de petits fragments durs, anguleux. L'oxyde d'arsenic est inodore. Sa saveur, d'après la plupart des chimistes, serait âcre, acide, métallique, ou celle des pommes sûres. Christison, qui a expérimenté à cet effet, avec plusieurs de ses amis, dit qu'il est insipide, et qu'il laisse un goût douceâtre dans l'arrière-gorge. Les auteurs s'accordent sur cette dernière impression. Ce qui tendrait à faire croire à son peu de sapidité, c'est que, des personnes l'ont croqué sous la dent comme du sucre, et avalé dans les aliments, sans s'en douter. La facilité avec laquelle on peut masquer ces qualités et se le procurer, est probablement, la cause principale de la fréquence de cette espèce d'empoisonnement. L'acide arsénieux est composé de 24,19 oxygène et de 76,81 d'arsenic. La densité de l'acide transparent est de 3,7585, et celle de l'opaque de 3,699.

Car. chim. 10 L'acide arsenieux, en fragments ou en poudre, déposé sur un charbon ardent, se décompose et se vaporise complétement en vapeurs brunâtres, qui blanchissent à mesure qu'elles s'élèvent dans l'atmosphère, et répandent l'odeur alliacée. Un corps qu'on interpose dans ces vapeurs les condense en poudre brune (arsenic métal) tout près du charbon, et en poudre blanche, granuleuse, à une distance d'environ dix à vingt millimètres et plus. Le charbon agit comme corps désoxydant ou en s'emparant de l'oxygène de l'acide arsénieux.

L'arsenic réduit,forme les vapeurs brunes, lesquelles, deviennent blanches en se combinant avec l'oxygène de l'air, ou parce que l'arsenic passe de nouveau à l'état d'oxyde. L'odeur alliacée, attribuée d'abord à l'acide arsénieux, puis à l'arsenic, se produit au moment même où l'arsenic réduit s'oxyde de nouveau, et résulte évidemment de cette oxydation, comme cela a lieu avec le phosphore; car cette odeur ne se manifeste qu'au bout de quelques instants et à une certaine distance du charbon, par conséquent du lieu de réduction; et, si l'on chauffe l'acide arsénieux sur un fragment de verre, de porcelaine ou de tout autre corps non oxydable, il se vaporise en vapeurs blanches dans toute leur étendue, sans répandre d'odeur alliacée. Lorsque l'oxyde d'arsenic est volatilisé lentement dans un tube de verre fermé à une de ses extrémités, ses vapeurs se condensent sur les parois du tube en petits cristaux, vitreux, brillants, octaédriques, visibles à la vue simple, et surtout à la loupe. Ces divers caractères font bien supposer que c'est de l'oxyde blanc d'arsenic, mais n'en sont pas une preuve directe, comme le procédé de réduction suivant, procédé capital, puisqu'il s'applique à toute préparation arsénicale solide, et auquel on doit recourir dans toute expertise légale.

2o L'acide arsénieux, pulvérisé, mêlé avec deux ou trois parties de flux noir (mélange de charbon et de carbonate de potasse, voyez page 35), chauffé dans un tube de verre fermé à l'une de ses extrémités et effilé à l'autre, est décomposé, réduit en arsenic métal, qui, se volatilise et se condense sur les parois du tube, et offre les caractères suivants.

par

Caractères de l'arsenic. 1° L'arsenic (métal), ainsi obtenu, forme, sur les parois du tube, des anneaux, des croûtes, des incrustations plus ou moins épaisses et étendues, qui, vues leur face externe ou adhérente au tube, sont miroitantes, d'un gris bleuâtre, et, par leur face interne ou libre, d'un gris d'acier, brillantes, granuleuses. Grattées avec la pointe d'un canif, ces incrustations se détachent par petites lamelles friables, pulvérisab'es, dont les deux faces offrent l'aspect que nous venons d'indiquer; 2o déposées sur un charbon ardent,

ces lamelles se vaporisent complétement en vapeurs brunâtres d'abord, puis blanches, et avec odeur alliacée; 3o chauffées à une douce chaleur, dans une petite capsule de verre, de porcelaine, sur un fragment de fiole, avec un peu d'acide azotique ou d'eau-régale, ces lamelles se dissolvent avec légère effervescence. Le soluté, évaporé lentement jusqu'à siccité, laisse un résidu blanc d'acide arsénique, qui, touché avec quelques gouttes d'un soluté de nitrate neutre d'argent, se colore en rouge-brique (arséniate d'argent). L'acide azotique ou l'acide azoteux de l'eau-régale font passer l'arsenic à l'état d'acide arsenique, en lui cédant de l'oxygène. L'eaurégale est préférable, parce que l'acidification de l'arsenic est plus prompte et plus complète; mais alors, il faut assez chauffer le résidu, pour en dégager complétement l'acide hydrochlorique, autrement le nitrate d'argent donnerait un précipité rouge brique mélangé de blanc, ou formé d'arséniate et de chlorure d'argent. Lorsqu'on se sert de l'acide azotique, l'arsenic n'est souvent qu'en partie acidifié, et le résidu, formé d'acide arsénique et arsénieux, se colore, par le nitrate d'argent, en rouge brique mélangé de jauue (arséniate et arsénite d'argent); quelquefois même une portion de métal reste sans être oxydée; en ce cas, il faut chauffer le résidu avec une nouvelle quantité d'acide azotique. On peut, par ce procédé de réduction, avec 1160me, 1190me de grain, ou environ 112 milligr. d'acide arsénieux, obtenir des croûtes métalliques assez épaisses pour constater ces caractères. Lorsque la quantité de poison est excessivement faible, l'arsenic se condense sous forme de poudre brune-noirâtre et sans aspect métallique. Alors on casse le tube, après en avoir retranché la partie inférieure, et on traite les fragments sur lesquels la poudre est déposée, comme il a été dit pour les incrustations. Il faut même en agir ainsi dans la plupart des cas, parce que, par le grattage, on ne peut détacher complétement tout l'arsenic.

Ces divers caractères, c'est-à-dire, l'aspect physique de l'arsenic, l'odeur alliacée, et surtout, les réactions fournies par l'acide nitrique ou l'eau-régale, et le nitrate d'argent, sont

considérés, par les toxicologistes français, comme suffisants, pour affirmer qu'on a opéré sur une préparation arsénicale. En effet, dans l'état actuel de la science, on ne connaît pas de corps métallique qui offre ces caractères réunis. Berzelius, pour caractériser l'arsenic ainsi obtenu, retranche la partie inférieure du tube, chauffe ensuite à la lampe à alcool la partie sur laquelle est déposé le métal; celui-ci se vaporise, passe à l'état d'oxyde blanc, lequel se condense un peu plus haut en cristaux octaédriques, brillants, très-appréciables, lorsque le tube est placé entre l'œil et la lumière, et surtout avec une loupe de quatre puissances. En approchant le nez de la partie effilée du tube, on perçoit l'odeur alliacée. Christison, dans des cas d'expertise légale, ou les caractères physiques du métal étaient douteux, a pu le reconnaître, en le faisant passer à l'état d'oxyde. Pourquoi ne pas constater en même temps les réactions indiquées par les chimistes français et suédois? On aurait ainsi un caractère de plus, celui de l'oxydation, et on ne perdrait pas la portion d'arsenic destinée à constater l'odeur alliacée.

Nous indiquerons encore quelques autres réactions propres à l'arsenic, mais beaucoup moins importantes, et que, par conséquent, on ne doit employer que lorsqu'on a obtenu une quantité suffisante de métal; 3o l'arsenic ou les portions du tube sur lesquelles il est déposé, étant pulvérisés et suspendus dans de l'eau, si on fait bouillir ce liquide, ou si l'on fait passer au travers un courant d'air, ou mieux encore d'oxygène, à l'aide d'une vessie qui en est remplie, passe, aux dépens de l'oxygène et de l'hydrogène de l'eau, à l'état d'hydrate d'arsenic, qui se dépose en poudre noire, et d'acide arsénieux, qui se dissout dans l'eau. Le soluté, filtré, offre toutes les réactions des dissolutions d'oxyde blanc d'arsenic; 2o l'arsenic, ou les portions du tube sur lesquelles il est incrusté, grossièrement pulvérisés, et placés dans un soluté de sulfate de cuivre ammoniacal, étendu de trois ou quatre parties d'eau, devient grisâtre, le liquide se décolore, et, au bout d'un certain temps, il se forme un précipité vert-pré (arsénite d'oxyde de cuivre). L'arsenic passe à l'état d'acide arsénieux aux dépens de l'oxy

gène de l'air et de l'eau, et se combine ensuite avec l'oxyde de cuivre. Comme cet arsénite est soluble dans l'ammoniaque, le précipité n'aurait pas lieu, si l'ammoniaque était en excès dans le sulfate; aussi, par ce motif et par d'autres que nous indiquerons ci-après, ce réactif est-il infidèle. 30 M. Bontigny propose de placer les incrustations arsénicales dans de l'acide chlorique étendu d'eau. L'arsenic se combine avec l'oxygène de cet acide, devient acide arsénieux, lequel se dissout dans l'eau, et le soluté offre les caractères des dissolutions d'oxyde d'arsenic.

Manuel opératoire pour réduire l'acide arsénieux. Mêlez exactement, dans un mortier d'agate, de porcelaine ou de verre, l'acide arsénieux en poudre avec 2 ou 3 parties de flux noir bien sec. Introduisez le mélange dans un tube de verre blanc, parfaitement transparent, de 30 à 35 centimètres de long, de 4 millimètres de diamètre, et garni à l'intérieur d'un tuyau en papier collé et lisse, afin de ne pas en salir les parois; ajoutez ensuite une légère couche de flux noir ou de charbon bien desséchés. Enlevez le tuyau en papier, et, si quelque peu de mélange arsénical ou de charbon salissent les parois du tube, on les en détache et on les pousse au fond, à l'aide d'une plume. Chauffez graduellement le mélange à la lampe à alcool pour le dessécher sans cependant le décomposer, et absorbez l'humidité au fur et à mesure qu'elle se forme, à l'aide d'une languette de papier non collé et roulée, qu'on promène dans l'intérieur du tube. Le mélange étant bien desséché, effilez la partie supérieure du tube, en la chauffant au rouge blanc, soit à la lampe à émailleur, soit entre des charbons, et étirant cette extrémité en sens inverse à l'aide de pinces; donnez ensuite plus d'étendue à la flamme de la lampe à alcool; chauffez au rouge, d'abord la portion du tube correspondante au charbon, puis celle qui correspond au mélange arsénial, et continuez ainsi jusqu'à ce qu'il ne se dégage plus d'arsenic. Si le tube est tenu, soit verticalement, soit obliquement ou horizontalement, mais alors tourné entre les doigts, l'arsenic se condense en anneaux, et au contraire en incrustations déjetées d'un seul côté, si le tube

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