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2o Les sulfhydrates d'ammoniaque, de soude, de potasse, non sulfurés, colorent en jaune les solutés arsénieux, et donnent immédiatement, par l'addition de quelques gouttes d'acide chlorhydrique, un précipité jaune (sulfure d'arsenic ), offrant les mêmes caractères que celui obtenu par l'acide sulfhydrique. Réflexions. L'acide sulfhydrique est préférable, aux sulfhydrates. Les résultats en sont plus nets et le précipité se forme et se sépare plus facilement en flocons. Pour peu que ces sulfhydrates soient sulfurés, ce qui arrive assez souvent, le sulfure d'arsenic est mêlé à du soufre. Si l'ammoniaque est en excès dans le sulfhydrate, le précipité ne se forme pas, puisque le sulfure d'arsenic est soluble dans cet alcali et même aussi dans les sulfures alcalins. C'est pour cela qu'on rend les liqueurs arsénicales neutres ou acides avant de faire agir ces réactifs.

3o Le nitrate d'argent ammoniacal (qui s'obtient en précipitant le nitrate d'argent par l'ammoniaque, et ajoutant ensuite un léger excès d'ammoniaque pour dissoudre le précipité), donne, avec les solutés arsénieux, un précipité jaune-citron (arsenite d'argent), qui, brunit à la lumière. Ce réactif est très-délicat, puisqu'il peut déceler 1,800,000 p. d'acide arsénieux (Devergie).

Réflexions. La réaction est empêchée par les acides sulfurique, azotique, acétique, tartrique, citrique, et par l'ammoniaque, si elle est en excès dans le réactif. Si le soluté renfermait des chlorures, le précipité serait blanc-jaunâtre ou mêlé à du chlorure d'argent. Les phosphates solubles précipitent aussi en jaune par ce réactif. Les matières organiques, comme nous le verrons ci-après, empêchent ou modifient cette réaction. Le nitrate neutre d'argent donne aussi une réaction analogue, mais moins caractéristique.

40 Le sulfate ou nitrate de cuivre ammoniacal précipite en vert-pré ou vert-pomme (arsénite de cuivre, vert de schéele) le soluté d'acide arsénieux. Ce réactif peut déceler 115,200 d'acide arsénieux.

Réflexions. Ce réactif est infidèle. La nuance de précipité en est très-variable. La réaction est empêchée par les acides

sulfurique, azotique, chlorhydrique, tartrique, citrique, par un excès d'ammoniaque et l'hydrochlorate de cette base. Plusieurs liquides organiques, que nous indiquerons ci-après, quoique ne contenant pas d'acide arsénieux, peuvent donner des réactions analogues. Les autres sels de cuivre, le sulfate, l'acétate, etc., précipitent aussi en vert-pré l'acide arsénieux, et sont sujets aux mêmes erreurs.

5o L'eau de chaux précipite en blanc (arsenite de chaux) les solutés d'acide arsénieux. Le précipité est soluble dans un excès d'acide. Ce réactif s'arrête à 172,000.-Les carbonates, les phosphates, les borates solubles précipitent aussi en blanc par le même réactif.

Réflexions générales. Il résulte de ces détails, que l'acide sulfhydrique, quoique moins délicat que le nitrate d'argent ammoniacal, mérite cependant la préférence sur tous ces réactifs, non-seulement parce qu'il donne des réactions plus nettes et moins sujettes à erreur, mais encore parce que, lorsqu'on a retiré l'arsenic du sulfure, par le procédé de réduction, on peut affirmer qu'on a opéré sur un liquide arsénical. Cependant, si l'on a assez de soluté, il convient d'essayer aussi les autres réactifs, en évitant toutefois les causes d'erreur que nous avons signalées. Tout l'acide arsénieux n'est point précipité par ces réactifs, puisque le soluté donne encore de l'arsenic à l'appareil de Marsh. Les divers précipités arsénicaux, préalablement chauffés avec de l'acide azotique, dans le but de les oxyder ou de les rendre solubles, donnent aussi des taches arsenicales à cet appareil. Si donc, les résultats étaient incertains, douteux, si, dans la réduction du sulfure, on n'obtenait pas de croûtes arsénicales bien caractéristiques, on soumettrait, soit les matières, soit les précipités, soit les fragments du tube avec lequel on a opéré, à l'appareil de Marsh, après avoir oxydé toutefois le métal ou les précipités par l'acide azotique; mais, en ce cas, on ne se prononcerait qu'avec les réserves qu'il convient, quand on emploie cet appareil, et que nous ferons connaître ci-après.

Jæger, Fischer, Edmon Davy ont conseillé aussi la pile ou

l'action électrique, pour reconnaître l'acide arsénieux dissous. Dans ce procédé, on a pour but de précipiter l'arsenic sur un fil de platine, formant l'un des pôles de la pile et plongeant dans le soluté arsénical, et de dégager ensuite l'arsenic à l'état d'oxyde, en chauffant le fil de platine dans un tube. Edmon Davy, après avoir acidulé la dissolution arsénicale avec de l'acide hydrochlorique, y plonge un fil de platine en communication avec une plaque de zinc. D'après ce chimiste, l'arsenic se déposerait après un temps très-court, et ce procédé serait à la fois délicat et caractéristique; mais il n'en précise pas la délicatesse. Fischer dit avoir découvert 1160e de grain, ou 112 milligr. d'acide arsénieux, avec une pile de 50 paires. Christison et Pleich n'ont pas trouvé la même sensibilité. Un fil d'or, de cuivre, placés au pôle résineux de la pile, pourraient remplacer le fil de platine.

Murray, pour reconnaître l'acide arsénieux en poudre, propose de l'appliquer sur un morceau de papier, à l'aide d'une baguette en verre, de l'humecter d'une gout'e de soluté de sulfate de cuivre ou de nitrate d'argent, et d'exposer le papier aux vapeurs ammoniacales. La tache se colore en vert-pré avec le premier réactif, et en jaune avec le second. On obtient une réaction analogue avec une goutte d'acide arsénieux et des solutés de sulfate de cuivre ou de nitrate d'argent ammoniacaux, versées et rapprochées sur du papier. Ces réactions, bien moins probantes que le procédé de réduction, doivent être comparatives, c'est-à-dire faites d'abord à blanc ou sans acide arsénieux.

Nous signalerons encore, mais comme des réactifs fort peu importants de l'acide arsénieux, 1o le bichromate de potasse, qui donne un précipité vert d'oxyde de chrome; 2o le manganesiate rouge de potasse, qui passe au jaune; 3o l'iodure bleu d'amidon, qui est ramené au rouge.

Acide arsénieux et matières organiques.

L'acide arsénieux est, de tous les poisons minéraux, celui qui modifie le moins les matières organiques et qui en est le

moins modifié; ainsi, il n'altère pas dans leur couleur, leur consistance, etc., le vin, le cidre, la bière, les liquides albumineux, gélatineux, caséeux, le lait, le bouillon, les matières alimentaires, celles des vomissements; il n'est pas non plus altéré par les substances minérales que renferment habituellement les matières organiques. Comme il est peu soluble dans l'eau, et surtout dans les liquides organiques, d'après les expériences de Schéele, de Guibourt, etc., et qu'il est presque toujours donné en poudre assez grossière, on le trouvera en nature dans les parties solides et liquides, et, dans la majorité des cas, dix-neuf fois sur vingt, en poudre ou en petits fragments, dans les dépôts, dans les matières solides, ou à la surface du tube intestinal; c'est du moins ce qui résulte de la plupart des expertises légales. Cependant, par l'altération spontanée des matières organiques, il peut se former, soit de l'hydrogène sulfuré, qui transforme l'acide arsénieux en sulfure insoluble, soit de l'ammoniaque, qui le fasse passer à l'état d'arsénité d'ammoniaque soluble, soit de l'hydrogène, qui le dégage à l'état d'hydrogène arséniqué; mais ces cas sont excessivement rares, et ne se présentent guère que dans les exhumations longtemps différées, ou par un contact assez prolongé de mélanges organiques avec l'acide arsénieux.

Analyse. Des considérations précédentes, il résulte que, dans tous les cas d'expertise légale, il faut examiner si les matières organiques solides ou liquides, ne sont point surnagées par une poudre blanche, qui quelquefois est en petits pelotons; si, dans les dépôts, sur les parois ou au fond des vases, n'existe pas de l'acide arsénieux en poudre ou en petits fragments, qu'on isolerait par des lavages, comme il sera indiqué ci-après, pour en constater les caractères. Quant à l'acide arsénieux dissous ou en poudre trop fine pour être séparé ainsi, il faut soumettre les matières organiques à l'un des procédés suivants. Comme nous l'avons fait jusqu'ici, pour les poisons importants, nous considérerons les matières organiques arsenicales d'après leur état d'agrégation.

A. Liquides organiques. Après avoir séparé les liquides des

dépôts, des précipités, et examiné si ceux-ci ne contiennent pas d'acide arsénieux solide, on soumet les premiers aux réactions suivantes : 1° si les liqueurs sont incolores et peu chargées de matière organique, ce qui est indiqué par leur peu de consistance, de viscosité, après les avoir acidulés par quelques gouttes d'acide chlorhydrique, on précipite l'acide arsénieux, à l'état de sulfure, en faisant passer à travers un excès de gaz sulfhydrique, et on réduit le sulfure par le flux noir, comme nous l'avons déjà indiqué, ou comme nous l'indiquerons ci-après, si le sulfure était mêlé à des matières organiques; 2o si les liquides sont colorés, tel que le vin, il convient de les décolorer préalablement par le charbon, le chlore ayant pour inconvénient, d'après Devergie, de transformer l'acide arsénieux en acide arsénique, lequel est moins facilement précipité à l'état de sulfure par l'acide sulfhydrique; 3o si les liquides sont albumineux ou caséeux (le lait, les solutés d'albumine), on les coagule par la chaleur et quelques gouttes d'acide acétique ou hydrochlorique, et on soumet les coagulés et les liquides aux mêmes analyses que les parties solides et liquides des matières des vomissements, etc. C'est ce qu'on ferait aussi pour les liquides chargés de beaucoup de matière organique, le bouillon, les consommés, les solutions de gélatine, etc. Dans tous ces cas, il faut peu compter sur les autres réactifs des solutés d'acide arsénieux, parce que les matières organiques, les sels qu'elles renferment habituellement, s'opposent à ce que les réactions soient nettes, caractéristiques, et même, dans quelques cas, donnent lieu à des réactions qui peuvent induire en erreur. Ainsi, le sulfate de cuivre ammoniacal colore en vert les liquides organiques jaunes ou jaunesbrunâtres, et surtout les décoctés de café non brûlé, d'oignons, et y produit des précipités de la même couleur. Le nitrate d'argent ammoniacal donne aussi, avec le décocté d'oignons, un précipité jaune, qui ressemble beaucoup à l'arsénite d'argent. D'ailleurs, comme nous l'avons déjà dit, si les liquides renfermaient des chlorures, le précipité, au lieu d'être jaune, serait blanc-jaunâtre, et les phosphates précipitent aussi en jaune

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