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des doigts, comme l'effet consécutif le plus constant. Dans les Éphémérides allemandes, il est question d'une cuisinière, qui, après avoir éprouvé les effets de l'empoisonnement aigu, fut atteinte d'une paralysie complète des membres qu'elle conserva toute sa vie. Une femme prend de l'arsenic par inadvertance, éprouve les symptômes habituels, se trouve bien le 3e jour; mais, le 4e, elle a des crampes, des douleurs, de la faiblesse dans les jambes et dans les bras, jusqu'à ce que toutes les extrémités deviennent graduellement paralysées, la peau se desquama; le mouvement revint d'abord aux mains, puis aux bras; elle ne se rétablit complétement qu'au bout de onze mois. Les autres fonctions restèrent intactes (Dehaen). Un homme,eut, le 5 jour de l'intoxication, une éruption de pustules blanches, isolées ou confluentes, analogues, par leur forme et leur marche, à celles de la petite vérole, et une impuissance presque absolue des membres avec diminution de la sensibilité. La mobilité revint peu à peu dans les bras et les jambes, mais elle était encore impossible le 53 jour dans les doigts, les orteils et les mains, qui, étaient toujours fléchis (Dr Coqueret). Nous rapportons un cas (observation XV ), dans lequel les muscles fléchisseurs l'emportaient tellement sur les muscles extenseurs, que les doigts des mains étaient fortement fléchis contre la paume; il en était de même des doigts des pieds, ce qui rendait la marche trèspénible et même impossible. La malade était dans un état complet d'émaciation. Christison cite quelques cas où les désordres nerveux ont revêtu un caractère épileptiforme, tætanique, hystérique, maniaque; mais ces cas sont si rares et si peu connus que nous nous dispenserons d'en parler. Cet auteur parle aussi de l'insensibilité presque générale de la peau.

Empoisonnement lent. L'acide arsénieux peut-il produire un empoisonnement lent ; c'est-à-dire, peut-il, étant donné à dose minime et fréquemment répétée, amener un dépérissement progressif suivi de mort? Cette question, à priori, peut être résolue affirmativement. 1o Ce poison, donné à dose médicamenteuse et trop longtemps continuée, amène le dérangement des organes gastriques, pervertit la digestion, les phénomènes

d'assimilation, conduit à l'hydropisie, à la phthisie d'après quelques auteurs, détermine la chute de l'épiderme, des ongles, des cheveux, etc. M. Devergie, dans les affections chroni ques du système cutané, dit n'avoir jamais pu dépasser la dose de 20 gouttes de liqueur de Fowler, que l'organisme était alors saturé d'arsenic, qu'il survenait de la toux, de l'oppression, de l'épigastralgie, de la diarrhée. 2o Il est un fait historique qui a été contesté par quelques toxicologistes, et qui cependant ne nous paraît pas dénué de fondement. Nous voulons parler de laqua toffana, aquetta de Napoli, composée, d'après Garelli, médecin de Charles VI d'Autriche, d'acide arsénieux dissous dans de l'eau distillée de cymbalaire. Cette liqueur, limpide, incolore et sans goût, était un poison redoutable au seizième siècle, et, le monstre qui l'inventa avoua avoir fait périr pour sa part plus de six cents Napolitains. Ce poison, administré tous les jours à la dose de 5 à 6 gouttes, produisait, d'après Behrends et Hannemann, un état de malaise général indéfinissable qui s'aggravait de plus en plus, du dégoût pour les aliments. Les personnes tombaient dans un état de langueur, dépérissaient graduellement, et, malgré les secours de la médecine, impuissante par l'ignorance de la cause, succombaient, après avoir mené une vie languissante pendant des mois, des années, etc. Des hydropisies, une diarrhée colliquative, etc., fermaient quelquefois la scène.

il

Altérations pathologiques. L'acide arsénieux appliqué sur la peau, sur une plaie, sur une muqueuse externe, laisse toujours des traces très intenses de son action locale, parce que constamment en contact avec le même tissu, ainsi peut produire complétement son effet caustique. Ces parties sont fortement enflammées, ulcérées, scarifiées; le tissu cellulaire sousjacent et des parties environnantes est infiltré d'un liquide sanguinolent, et les glandes non éloignées sont tuméfiées : Dans tous ces cas, on a trouvé dans le tube intestinal, des lésions de même nature, et quelquefois aussi intenses que dans l'empoisonnement par ingestion. Ces lésions sont dues probablement à l'arsenic absorbé éliminé par cette voie. Il

est à remarquer que, dans l'empoisonnement, soit externe, soit interne, presque constamment, quelques parties du corps sont cyanosées, offrent des lividités cadavériques, qui, par leur position, ne paraissent pas dépendre de la pesanteur, mais bien de la liquéfaction du sang. Notons encore que la rigidité cada vérique a été aussi très fréquemment observée, ainsi que la dilatation des pupilles.

Les diverses parties du tube intestinal, et surtout l'estomac, le duodénum, peuvent offrir des lesions, qui, dans la plupart des cas, n'intéressent que la muqueuse, et consistent en des modifications de coloration, de consistance, et plus rarement de structure. La bouche, l'œsophage, le pharynx, ne sont pas souvent lésés, du moins les auteurs sont fort peu explicites à cet égard, ce qui dépend peut-être du séjour peu prolongé du poison sur ces parties. Cependant, l'observation première nous en offre un exemple très-remarquable. A la vérité, le poison avait été pris en poudre et non suspendu dans un liquide, par conséquent, dans les conditions les plus favorables au développement de son effet caustique. La lèvre inférieure était violemment enflammée, comme cautérisée par un acide, la langue tuméfiée, etc. Campbell, Wilber, etc., ont trouvé aussi chez les animaux l'œsophage rouge, injecté, enflammé.

L'estomac, est, de toutes les parties du tube intestinal, celle qui offre le plus souvent des altérations. Sa muqueuse a été rencontrée d'un rouge cerise ou brun rouge foncé, ecchymosée, plus ou moins injectée, sans cependant être altérée d'une manière remarquable dans sa texture, sa consistance. D'autres fois elle est épaissie, ramollie, se laisse facilement déchirer par l'ongle, ou se détache par petites plaques. Dans quelques cas plus rares encore, elle est plus ferme, plus consistante, comme tannée en quelque sorte. Rarement elle est scarifiée, si ce n'est lorsque l'acide arsénieux a été pris en poudre et en grande quantité, et que les vomissements n'ont pas eu lieu immédiatement, comme chez Soufflard, et, d'après MM. Flandin et Danger, sur les moutons. Nous avons aussi observé ce genre de lésion sur les chevaux, qui, comme on sait, n'ont pas

la faculté de vomir. Très-rarement les membranes musculaire et péritonéale sont altérées dans leur texture. Cependant Christison dit avoir trouvé l'estomac perforé comme un crible, perforation qu'il attribue à une espèce de gélatinisation. La sécrétion muqueuse est souvent modifiée. Le mucus plus abondant, est ordinairement plus épais, comme gélatineux, et quelquefois transformé en pseudomembranes qui peuvent faire croire à une exfoliation de la muqueuse. Enfin, du sang en plus ou moins grande quantité, de couleur brun-noirâtre, liquide ou en caillots, est épanché dans l'estomac; c'est surtout lorsque l'intoxication s'est prolongée pendant 4, 6, 8 jours ; ce qui tendrait à faire croire que ce n'est point par suite de l'inflammation locale, mais plutôt par exsudation, en raison de la liquéfaction de ce liquide. Le duodenum, est, après l'estomac, l'organe le plus souvent lésé. Ces lésions qui intéressent le plus ordinairement la membrane muqueuse et ses villosités, sont aussi de même nature que celles de l'estomac. M. le docteur Riche a trouvé dans un cas la muqueuse et la musculeuse sacrifiées dans l'étendue d'une pièce de 5 francs, le duodénum largement corrodé et perforé en plusieurs endroits; le bord de ces ulcérations était tumefié et fortement enflammé. Il est à remarquer que les petits intestins ainsi que le colon, offrent bien rarement des traces d'altération, tandis que le rectum, surtout dans les empoisonnements externes, l'est presque aussi souvent que l'estomac. Ce qui viendrait encore confirmer, ce que nous avons déjà avancé, que c'était à tortqu'on attribuait beaucoup d'altérations du tube intestinal à l'action locale et directe de l'acide arsénieux. La membrane péritonéale est rarement lésée, quelquefois elle est injectée, ou d'un rouge-brun, mais non enflaminée. Le tube intestinal dans quelques-unes de ses parties, peut être diminué de calibre. Dans un cas, l'estomac était ratatiné, raccorni.Dans l'observation XIII, les petits intestins étaient rétrécis, mais ce genre d'altération s'observe bien plus souvent dans les gros intestins. Un auteur, cité par Christison, en rapporte plusieurs cas. Lui-même, dans quatre cas, a trouvé le colon fortement contracté. L'observation de Scufflard en est un exemple très

remarquable. (Observ. 4re) Ce genre d'altération n'appartient pas exclusivement à l'acide arsénieux, puisqu'on l'observe dans d'autres empoisonnements, et surtout dans ceux par les acides. Dans les cas où on a rencontré cette lésion, elle résultait probablement d'un état organique antérieur à l'empoisonnement; car l'acide arsénieux arrive rarement jusqu'au colon, et ensuite il n'augmente que très faiblement la contractilité des tissus.

Telles sont les lésions qu'offrent en général les organes gastro-intestinaux. Elles sont ordinairement en rapport avec les symptômes d'irritation qui se sont manifestés pendant la vie, et d'autant plus intenses que le poison a séjourné plus longtemps dans ces organes, que la mort a été moins prompte. Quelquefois cependant elles sont nulles, comme dans les cas cités par Chaussier et Ettmuller, quoique dans celui relaté par ce dernier, l'individu eût pris 12 gram. (3 gros) d'acide arsénieux, ou peu marquées comme dans l'observ. XIIe, et celle du Dr Missa. A la vérité, dans ces 4 cas, la mort est survenue en moins de 12 heures.

Quant aux lésions des parties autres que le tube intestinal, le sang est le liquide qui offre les altérations les plus constantes. Le système veineux, en général, et surtout celui des cavités splanchniques, est distendu, plein d'un sang noir, violacé, diffluent, incoagulable, mou comme de la gelée de groseille. Ce genre d'altération a paru si caractéristique aux médecins rasoriens que Capsoni,Cerati, etc.,disséquant un cadavre, et ayant trouvé le sang ainsi modifié, soupçonnèrent un empoisonnement arsenical. Ce soupçon fut confirmé par l'analyse. Cette liquéfaction du sang, qui s'observe aussi pendant la vie, surtout vers la fin de l'intoxication, mérite de fixer l'attention des toxicologistes. Cependant, il ne faut pas oublier qu'elle se rencontre dans certains états morbides, dans le choléra ple, ainsi que dans d'autres empoisonnements; qu'elle n'est point constante, et quc, la consistance du sang varie selon la période de l'intoxication. Campbell a trouvé le sang coagulé sur quelques chiens. On cite encore comme lésions propres à

par exem

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