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ganiques jusqu'à ce que le poison soit éliminé et de combattre en même temps l'inflammation du tube intestinal.

M. Orfila, après avoir expulsé, neutralisé le poison, propose d'administrer par verres assez rapprochés, le mélange diurétique suivant (eau, 3 litres; vin blanc, 1/2 litre; eau de seltz, 1 litre; nitrate de potasse, 30 ou 40 grammes), dans lė but de provoquer la sécrétion urinaire qui est en général suspendue et de faciliter ainsi l'élimination du poison. Il dit avoir appliqué sur le tissu cellulaire des chiens, des doses suffisantes d'acide arsénieux pour les empoisonner, et les avoir sauvés par ce mélange diurétique, lorsqu'il était assez heureux de provola sécrétion urinaire. Dans l'azotate de potasse seul ne paraît pas résider la propriété diurétique, car il n'a pas obtenu les mêmes effets avec le sel dissous dans l'eau pure. Le vin, l'eau de seltz agiraient donc probablement par leur propriété légèrement tonique-stimulante et diurétique.

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Les médecins rasoriens, et en particulier M. Rognetta, ayant égard surtout aux effets dynamiques, qui, pour eux, constituent l'intoxication, prescrivent les huileux comme vomitif, parce qu'ils n'ont pas l'inconvénient de dissoudre le poison et de faciliter son absorption; ils rejettent les contre-poisons et les antiphlogistiques et préconisent le traitement tonique-stimulant. M. Rognetta a expérimenté le mélange suivant sur les chiens et les chevaux (bouillon, 128 grammes; vin ou eau-devie, 64 grammes), qu'il donne par tasses par la bouche ou en lavement. Il dit, par cette méthode, avoir sauvé un bien plus grand nombre d'animaux que par la saignée et les antiphlogistiques. M. Orfila qui a expérimenté comparativement sur les chiens le traitement par les saignées, par la boisson diurétique et par le tonique-stimulant de M. Rognetta, dit au contraire avoir obtenu, dans les deux premiers cas, et surtout avec son diurétique, bien plus de guérison, et que la méthode de M. Rognetta a été le plus souvent funeste. Enfin, M. Orfila dans son ouvrage, et M. Rognetta dans un aperçu historique remarquable sur les poisons, énumèrent chacun un certain nombre de guérisons obtenues chez l'homme, le premier par l'emploi des sai

gnées, et le second par les toniques, le vin, la thériaque, etc. Mais ce n'est point de la bonne statistique médicale que d'apporter seulement les faits en faveur d'une méthode de traitement. Que conclure en présence de faits aussi contradictoires? Ajoutons ensuite que le traitement exclusif, préconisé par ces deux médecins, a été seulement expérimenté sur les chiens et n'a point encore reçu sa sanction chez l'homme. Nous comptons peu sur les expériences faites avec des idées préconnues. et instituées dans le but de défendre un système. Malheureusement alors les discussions scientifiques ne deviennent que trop souvent personnelles, et il est difficile de commenter, d'interpréter les faits avec cette impartialité qu'on doit apporter dans toute discussion scientifique, surtout dans une science d'application comme la toxicologie légale. En toxicologie médicale, il ne faut pas être plus exclusif qu'en pathologie. L'empoisonnement arsenical est une maladie qui a son début, sa marche, sa terminaison, ses variétés comme les autres maladies; par conséquent le traitement doit être modifié selon ces diverses circonstances. Une jeune personne prend environ 20 grammes d'acide arsénieux en poudre, on lui donne d'abord 10 centigrammes d'émétique, un lavement émollient et huileux, et, après les premiers vomissements, de l'oxyde de fer en magma ( la quantité dépassa un kilogramme). Le soir on ajouta une boisson émolliente additionnée de 2 grammes d'azotate de potasse; il y eut une selle très-abondante, émission d'une quantité assez considérable d'urine. Les accidents diminuèrent peu à peu, et, huit jours après, la malade était convalescente. (Chappuis. ) Nous terminerons en répétant qu'il faut avoir égard non-seulement aux lésions locales, mais encore aux effets constitutionnels, et que ceux-ci doivent surtout fixer l'attention du médecin. Une saine thérapeutique consiste dans l'association bien dirigée des moyens propres à remplir ce double but.

Quant aux effets consécutifs, à l'empoisonnement lent, il faut diriger le traitement d'après les systèmes d'organes ou fonctionnels spécialement lésés. Si c'est le tube intestinal, le

médecin doit apporter la plus grande attention dans le genre d'alimentation (voyez acides). Si c'est le système nerveux, qu'il y ait par exemple insensibilité, paralysie, contracture, etc., les bains simples, ou sulfuro-gélatineux, les frictions légèrement stimulantes sur la colonne vertébrale, sur les membres affectés, l'électricité, etc., sont les moyens convenables. Si enfin ces deux systèmes se trouvent affectés, ainsi que les phénomènes d'assimilation, il doit combiner ensemble les moyens médicamenteux et hygiéniques. Comme la persévérance dans l'emploi de ces moyens est une condition de réussite, il ne doit pas trop brusquer le traitement, mais attendre beaucoup du temps.

Résumé sur les préparations arsenicales. 1° Toute préparation arsenicale solide donne l'odeur alliacée sur les charbons ardents, et de l'arsenic métal par la réduction au flux noir. 2o Les solutés arsenicaux donnent des taches arsenicales à l'appareil de Marsh, et précipitent en jaune par l'acide sulfhydrique et quelques gouttes d'acide ch loi hydrique. Ce précipité est complétement soluble dans l'ammoniaque et réductible au flux noir. 5° Pour décéler l'arsenic dans les matières organiques solides ou liquides, il faut d'abord chercher à l'isoler par les lavages, carboniser, détruire ensuite les matières organiques, soit par l'acide sulfurique, soit par le nitrate de potasse, et soumettre le produit à l'appareil de Marsh, ou bien encore employer le procédé de Reinch ou de Jacquelain, p. 465.

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Les sulfures naturels sont les préparations arsenicales les plus anciennement connues. Pline, Hippocrate, Celse en ont parlé et les ont employés même comme médicament. Galien en formait la base de sa poudre épilatoire. Oribase, Aetius paraissent avoir connu l'acide arsenieux ; cependant, Avicenne (treizième siècle) est le premier qui en ait traité d'une manière explicite sous le nom d'arsenic blanc. L'arsenic métal a été obtenu par Scheele en 1777. La découverte des arsenites, des arseniates, remonte à peu près à cette époque. Nous ne trouvons rien de précis dans les auteurs, relative.

ment à celle des sulfures artificiels. C'est vers la fin du dernier siècle et surtout dans celui-ci, que l'étude des préparations arsenicales s'est perfectionné sous le point de vue de toxicologie chimique. Nul doute que leur effet toxique ne fût connu des médecins grecs, et, s'il n'en est pas question à cet égard depuis Hippocrate jusqu'à Dioscoride, c'est peut être parce que le père de la médecine s'était imposé le serment et l'avait imposé à ses élèves de ne pas parler des poisons. Dioscoride en a traité sous ce dernier point de vue. Plusieurs auteurs après lui n'ont fait en quelque sorte que le copier. C'est surtout depuis le seizième siècle que les arsenicaux ont été étudiés sous le point de vue médical et ont acquis toute l'importance toxicologique qu'elles occupent dans la science médicolégale.

L'empoisonnement par les préparations arsenicales et surtout par l'acide arsenieux a été observé par presque toutes les voies, mais le plus ordinairement par les voies gastriques. C'est l'un des poisons les plus fréquemment usités pour commettre les homicides par empoisonnement. Dans un relevé, fait en Angleterre, de 1838 à 1839, sur quatre cent quatre-vingt-dix-neuf cas, cent vingt sont dus à ce poison, et sur cent quatre-vingt-quatorze, extraits des journaux judiciaires en France, cent vingt appartiennent aussi à l'acide arsénieux. Dans ces relevés ne se trouvent pas compris la plupart des empoisonnements par suicide et par imprudence. Ce poison est donc le plus important sous le point de vue médicolégal. Plusieurs auteurs, afin de rendre ces empoisonnements moins fréquents, ont proposé de colorer l'arsenic avec des matières colorantes, le bleu de Prusse, l'indigo, le sulfate de fer, etc., de lui donner de la saveur par la noix vomique, l'aloès, l'alun, etc. 11 serait à désirer que le gouvernement adoptât ces mesures ou en surveillât plus attentivement la vente; car, il est d'observation que plusieurs homicides par empoisonnement n'ont pas eu leur accomplissement par suite de la couleur, de la saveur des poisons. Nous traiterons d'abord des voies diverses par lesquelles l'intoxication arsenicale

peut s'opérer, en rapportant des faits à l'appui, et nous terminerons par les rapports médico-légaux.

a. Empoisonnement par la peau non dénudée.

D'après les expériences de Saæger, de Renault, sur les animaux, l'acide arsénieux en poudre, et même en frictions sur la peau non dénudée, aurait un effet exclusivement local. Plusieurs médecins pensent que chez l'homme l'intoxication arsenicale ne peut se produire par cette voie, à moins que la peau ne soit dénudée ou excoriée par l'effet du poison. Cette assertion est probablement la vraie, mais il n'en est pas moins certain, sous le point de vue de toxicologie légale, que l'acide arsénieux en poudre, en soluté, cn pommade ou sous forme de bains, de frictions sur la peau saine, puisse occasionner des accidents locaux et constitutionnels très-graves et même mortels. C'est ce que démontrent les faits suivants.

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Observation I. Le 5 thermidor, an IV, une jeune femme, ayant d'ailleurs la tête très-saine et sans écorchure, eut l'imprudence de se la frotter avec de la pommade arsenicale, pour se faire passer les poux. Point d'accidents les 6 ou 7 premiers jours; mais alors, douleurs des plus cruelles avec gonflement de toute la tête et des oreilles, parties qui se couvrirent de croûtes. Engorgement des glandes salivaires et du cou; tuméfaction érysipélateuse du visage; yeux étincelants et gros; pouls dur, tendu; langue aride; soif; peau sèche; chaleur vivé sur tout le corps avec sensation d'un feu dévorant; vertiges; faiblesses syncopales, cardialgie; vomissements de temps à autre; ardeur en urinant; constipation; tremblement des membres avec impossibilité de se soutenir; délire par moments. Saignée copieuse sur-le-champ (7 heures du soir). Pour la nuit, saignée du pied; boisson d'eau de poulet émulsionnée et nitrée; lavements fréquents avec la graine de lin et le miel mercuriel; pédiluves avec les cendres; mélange de magnésie calcinée de gomme arabique et de sirop de tussilage, administré par cuillerées à café toutes les 2 ou 3 heures, dans le but de relâcher doucement le ventre; graisser la tête avec la pommade à la craie de Baumé. Le lendemain, peu d'amendement; assoupissement. 8 sangsues aux cuisses. Nuit agitée. L'enflure de la tête parut s'être accrue, et, sur le matin, tout le corps se couvrit de boutons mi

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