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grammes d'acide sulfurique. La carbonisation s'est faite avec régularité et rapidité; le charbon était sec et friable. On l'a réduit en poudre, puis traité par l'acide chloro-nitrique et ensuite par l'eau, d'après la méthode déjà suivie. Introduit dans l'appareil de Marsh (procédé de l'Institut), tenu en activité depuis trois quarts d'heure sans qu'il se fut produit de dépôt dans le tubé, le liquide a donné, au bout de quelques minutes, un anneau miroitant, peu intense il est vrai, mais auquel on á reconnu les propriétés de l'arsenic. 1o Cet anneau était déplacé dans le tube par l'approche de la flamme d'une lampe à alcool; 2o en contact de l'air chaud il a été transformé dans le tube même en une poudre blanche volatile (acide arsénieux); 3° après le refroidissement du tube, l'acide arsénieux a été dissous instantanément par le gaz dégagé d'un flacon de chlore; 4o le contact du gaz acide sulfhydrique a transformé le chlorure en sulfure jaune d'arsenic volatil; 5o le sulfure jaune repris avec du flux noir dans le tube effilé à lá lampe a été ramené à l'état d'arsenic métallique (Voir le tube n°5). Répétée sur les 145 grammes d'intestins restants, la même opération a donné des résultats identiques, mais mieux tranchés encore, l'anneau métallique étant plus considérable, en raison de la plus grande quantité de matières brûlées. Analyse de la chair musculaire. « On a carbonisé en deux fois, par l'acide sulfurique, 250 grammes des muscles de la cuisse. Au terme de l'opération, qui a été conduite absolument comme l'avaient été les opérations précédentes, on a obtenu dans le tube à condensation (appa reil de l'Institut) un anneau métallique très-apparent, très-caractéristique. Cet anneau, déplacé dans le tube à l'aide de la flamme d'une lampe à alcool, a passé, au contact de l'air chaud, à l'état d'acide arsénieux qui, dissous par l'eau, à été transformé par le gaz acide sulfhydrique en sulfure jaune d'arsenic. Ce sulfure jaune a été décoloré et rendu soluble par l'ammoniaque.

Analyse des terres du cimetière. -« Pour nous conformer à l'ordonnance de M. le juge d'instruction, nous avons procédé à l'analyse des terres recueillies soit au-dessus soit au-dessous de la bière de Henry Lacoste. Il a été pris, dans chacun des deux bocaux qui nous avaient été remis, un kilogramme de matière que l'on a traitée isolément dans une grande capsule en porcelaine dure de Sèvres, par 20 grammes d'acide nitrique et 210 grammes d'acide sulfurique, légèrement étendu d'eau. L'effervescence produite par la décomposition des sels calcaires étant apaisée, et la masse restant fortement acide, on l'a fait chauffer à petit feu pendant un quart-d'heure, après quoi on l'a étendue d'eau et

maintenue à l'ébullition pendant une heure, en ayant soin de remplacer de temps en temps l'eau évaporée. Après la filtration, les liqueurs étaient limpides, d'un jaune-rougcâtre. Elles ont été rapprochées par concentration. Un appareil de Marsh (procédé de l'Institut) a été mis en activité et essayé. Le tube à condensation restant pur de toute tache, on a introduit par fractions l'un des liquides dans le flacon à hydrogène, et l'on a entretenu le dégagement du gaz durant une heure,

Aucun dépôt ne s'est formé dans le tube à condensation; le charbon retiré, le gaz n'a exhalé aucune odeur d'arsenic; l'hydrogène enflammé, la flamme n'a pris aucune coloration, et elle n'a donné aucune tache. — Traité dans le même appareil et pendant un temps égal, le second liquide n'a pas donné non plus la moindre tache d'arsenic.

« Il nous a paru démontré par cette double analyse que la terre du cimetière, prise soit au-dessus soit au-dessous de la bière de Henry Lacoste, ne récélait aucune trace d'un composé arsenical.

«Bien qu'il ne nous restât aucun doute sur les résultats de nos analyses, nous avons jugé convenable de mettre en regard de l'expérience capitale de notre expertise une opération faite absolument dans les mêmes conditions. A cet effet, il a été pris 77 grammes de foie d'un cadavre humain, que l'on a carbonisés avec 30 grammes d'acide sulfurique. Le charbon, réduit en poudre, a été humecté par 15 grammes d'acide chloro nitrique, desséché an feu, puis repris par l'eau qu'on a portée à l'ébullition, lavé à diverses reprises, et le liquide convenablement concentré a été introduit dans un appareil de Marsh (procédé de P'Institut). L'appareil a été maintenu en activité pendant une heure, sans qu'il se déposât la plus légère trace d'arsenic dans le tube à condensation. Le charbon retiré, le gaz n'exhalait que l'odeur d'hydro gène; enflammé, il n'a pris aucune couleur, ni donné aucune tache sur la porcelaine.

« CONCLUSIONS. Les analyses dont nous venons de rendre compte se prêtent un mutuel contrôle, nous en concluons:

1° « Que la partie du foie de Henry Lacoste sur laquelle nous avons opéré contenait une quantité très-notable d'arsenic si nous avions à évaluer cette quantité en poids, nous ne craindrions pas de la porter à plus de cinq milligrammes;

2o« Que les portions d'intestins et de chair musculaire soumises à notre examen en contenaient également des traces appréciables, quoique en proportions moindres que le foie, ce qui s'accorde, du reste," avec ce que l'on sait d'un empoisonnement par l'arsenic ;

3« Qu'il n'existait aucune apparence de cet élément toxicologique dans les terres recueillies, soit en dessus, soit en dessous de la bière dudit Lacoste.

&

«Nous joignons à ce rapport, comme pièces de conviction : sous le no 1, un tube de verre dans lequel se voit un dépôt d'arsenic métallique extrait du foie; sous le n° 2, une soucoupe de taches d'arsenic provenant de la même source; sous le no 3, un petit tube de verre contenant un anneau d'arsenic également retiré du foie, mais réduit à l'état métallique après avoir subi diverses réactions successives; les numéros 4 et 4 bis, deux soucoupes de taches d'arsenic recueillies dans les mêmes conditions que le petit anneau précédent;

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Sous

sous le

5, un petit tube renfermant un anneau d'arsenic provenant des intestins, mais ramené à l'état de métal pour la seconde fois, après une série de réactions intermédiaires. Nous croyons devoir annexer~ à ces pièces un échantillon, ou les restes mêmes des divers réactifs employés dans nos recherches. En voici l'énumération : Un flacon contenant de l'acide sulfurique; idem, de l'acide azotique; idem, de l'acide chlorhydrique; idem, de l'eau distillée; idem, du zinc; quelques feuilles de papier Berzelius, Nous remettons également à M. le juge d'instruction les quatre bocaux en verre noir renfermant les restes des matières dans lesquelles nous avons opéré...

« Fait à Paris, dans le laboratoire de chimie du Collège de France, le 26 mars 1844.

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«Les soussignés réclament pour le temps employé à ladite expertise, et pour chacun d'eux, la somme de 255 fr., montant de trentesix vacations de jour et de dix vacations de nuit; en outre, les dépenses faites par l'un d'eux pour achat de réactifs, capsules en porcelaine, tubes en verre des appareils, etc., s'élevant à 60 fr. »

EMPOISONNEMENT PAR LES PRÉPARATIONS ANTIMONIALES.

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Il n'est pas de préparations aussi nombreuses, aussi variables dans leur composition que les antimoniales. Les plus importantes à connaître sont: l'antimoine, les oxydes, les sulfûres, les ́oxy-sulfures, les chlorures, et surtout l'émétique.

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Emélique,

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Le tartre émétique ou stibié, tartrate de potasse et· d'antimoine, tartrate antimoniaco-potassique, peut être, 10 à l'état solide 29 dissous, 5 mêlé ou combiné avec les

matières organiques, celles des vomissements, le tube intestinal, etc.; 40 absorbé et démontré dans le foie, la rate, les reins, les urines, etc.

EMÉTIQUE SOLIDE. En cristaux octaédriques ou tétraédriques, semi-transparent, incolore, inodore, d'une saveur métallique et nauséabonde; composé de tartrate de potasse 32, 57; tartrate d'antimoine, 60, 20; eau, 5, 14; il s'effleurit à l'air, se réduit en poudre, et c'est ordinairement ainsi qu'on le distribue dans les pharmacies.

Caractères chimiques. Un fragment d'émétique, chauffé entre deux charbons ardents, décrépite, noircit, dégage l'odeur du tartre brûlé, et laisse un résidu gris-noirâtre, dans lequel sont incrustés de petits globules métalliques. Ce résidu, délayé dans l'eau, se dissout en partie, laisse au fond du vase les globules métalliques mêlés à des parcelles de charbon. Ces globules, isolés de l'eau par décantation et des parcelles charbonneuses à l'acide d'une baguette, offrent les caractères suivants. 1o D'un blanc et brillant argentin sans réflet irisé verdâtre comme le bismuth, ils ne se laissent point couper par la pointe d'un canif. 2° Ils se dissolvent à chaud dans l'eau régale; le soluté ou chlorure d'antimoine précipite en blanc par l'eau (sous-oxychlorure), précipité qui, ainsi que le liquide surnageant, se colore en jaune-orange-rougeâtre (oxysulfure d'antimoine) par l'acide sulfhydrique.

La réduction de l'antimoine a lieu surtout par l'hydrogène et le carbone de l'acide tartrique. Elle pourrait donc s'opérer dans un tube de verre. Il se forme du carbonate de potasse, dans lequel sont incrustés les globules. Afin de les obtenir plus gros, il faut déposer l'émétique dans la cavité d'un charbon, le couvrir ensuite d'un morceau de braise incandescente. L'antimoine, privé ainsi du contact de l'air, ne s'oxyde pas de nouvean, surtout si l'on maintient le morceau de braise appliqué jusqu'à refroidissement. On entretient la combustion du charbon en soufflant avec la bouche ou le chalumeau.

La couleur noire que prend l'émétique, l'odeur du tartre brûlé qu'il dégage, les caractères chimiques des globules métal

liques sont des preuves suffisantes pour affirmer que c'est une préparation antimoniale, et même de l'émétique, puisque c'est la seule qui se comporte ainsi, surtout si, à ce caractère, on ajoute que l'eau qui a servi à laver le résidu, filtrée et suffisamment concentrée, offre les réactions des sels de potasse.

2o L'émétique, introduit dans l'appareil de Marsh, donne des tâches arsenicales.

ÉMÉTIQUE DISSOUs. Le tartre stibié se dissout dans environ le double de son poids d'eau bouillante et quatorze parties d'eau froide. Le soluté, dépose, au bout d'un certain temps, de l'oxyde blanc d'antimoine s'il est fait à froid, et presque immédiatement si c'est à chaud. D'après M. Gueranger, ce précipité est dû à la décomposition de l'émétique par les carbonates de chaux et de magnésie que contient l'eau ordinaire, lesquels saturent l'acide tartrique. Les chlorures, les sulfates, ainsi que le peu de matière organique qui se trouve dans l'eau seraient sans action sur ce sel. La dissolution rougit légèrement le pier tournesol et offre les réactions suivantes.

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1° Acide sulfhydrique. La colore d'abord en jaune-rougeâtre, et, au bout d'un certain temps où immédiatement par l'addition de quelques gouttes d'acide chlorhydrique, donne un précipité de même couleur (protosulfure d'antimoine hydraté), incomplétement soluble dans l'ammoniaque (ce qui le distingue de celui d'arsenic), qui, lavé, desséché et décomposé dans la cavité d'un charbon ardent, ou dans un tube avec du flux noir, laisse des globules d'antimoine faciles à caractériser. Ce sulfure pourrait encore être réduit par le gaz hydrogène ou procédé de Turner (voyez ci-après), ou bien encore, comme l'indique M. Orfila, par l'appareil de Marsh, après l'avoir ramené à l'état d'oxyde par l'acide azotique à chaud. Ces deux derniers moyens de réduction et surtout l'appareil de Marsh, doivent être employés, lorsqu'on opère sur des quantités minimes. Les sulfhydrates d'ammoniaque,de potasse, de soude, donnent la même réaction que l'acide sulfhydrique, et sont aussi délicats; le précipité est soluble dans un excès de réactif. 2° Teinture de noix de galles. Précipité blanc-jaunâtre

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