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NOBLESSE.

que les divers peuples du monde furent régis des lois sociales, il devint nécessaire de confier l'administration de la justice, du gouvernement et la conduite des armées à des hommes qui, par leur intégrité, leur sagesse et leur bravoure, s'étaient placés au-dessus de la masse commune, et, par conséquent, s'étaient rendus dignes d'être les chefs de ceux qui avaient été leurs égaux.

Il se forma donc chez toutes les nations policées une classe première qui constitua les notables, et servit de souche à ce qu'on appela depuis noblesse. Les peuples les plus anciens: les Hébreux, les Grecs, les Romains, les Gaulois eurent une noblesse, et c'était à elle qu'était confié le soin de défendre l'état et de rendre la justice. Les Francs étaient tous nobles, parce qu'ils étaient tous libres, et faisaient profession des armes. Les compagnons de Clovis et de ses successeurs reçurent en récompense de leurs services, des terres franches où ils exerçaient toute

souveraineté sans être tenus à d'autres charges que le service militaire, et la foi au prince. Voilà l'origine de la première classe de la nation, sous le titre de noblesse territoriale ou féodale héréditaire, régie par la loi salique. Plus tard, on recruta la noblesse, soit au moyen d'inféodations, soit par lettres-patentes, ou l'exercice de certains emplois. Avant la révolution, on reconnaissait en France plusieurs classes de noblesse. En voici les principales divisions: 1° La noblesse de race, que l'on appelait aussi noblesse chevaleresque ou d'ancienne extraction, parce qu'elle prouvait une existence antérieure aux anoblissements, et son origine toute militaire et féodale, se perdant dans la nuit des siècles, on pouvait la croire issue des Gentils, c'est-à-dire des premiers hommes libres, possesseurs de terres; 2o la noblesse inféodée : c'est-à-dire les familles devenues nobles par la possession de fiefs nobles, et moyennant paiement de certaines taxes, en conformité des instituts de Saint-Louis et de la charte de Louis XI, du 5 novembre 1470; 3° la noblesse de robe: celle qui s'acquérait par l'exercice de la haute magistrature dans les cours supérieures de justice civile;

TOME I.

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4° la noblesse d'échevinage, dite aussi noblesse de cloche celle attachée aux fonctions municipales de certaines villes, auxquelles le souverain avait accordé ce privilége; 5° la noblesse par lettres-patentes: ceux que le souverain appelait au rang de nobles, en récompense de services rendus à l'état, ou bien moyennant finance.

La première de ces classes était la plus considérée, soit que ses services fussent plus anciens, soit qu'aucun souvenir ni trace de roture ne vint altérer sa pureté; d'ailleurs, elle était historique.

Les principales prérogatives de la noblesse étaient la jouissance des droits seigneuriaux plus ou moins étendus dans les fiefs qu'elle possédait le droit d'avoir un sceau, de porter des armes, de porter des armes, des insignes et des vêtements interdits aux autres classes de la société; d'approcher plus facilement la personne du prince, et enfin l'exemption des charges publiques ordinaires; nous disons ordinaires, car en temps de guerre, la noblesse payait non-seulement de sa personne, en combattant presque seule, mais encore elle contribuait de sa fortune, par une rétribution volontaire ou imposée à titre de subside.

Dans les derniers temps, on a calomnié la noblesse; on a fait peser sur le corps entier les écarts de quelques-uns de ses membres. On a méconnu le mérite de son institution dans un état monarchique, on a oublié ses services, on ne s'est pas souvenu que pendant plusieurs siècles, elle a fait la principale force, comme la principale gloire de la France. On peut encore revendiquer en sa faveur la large part qu'elle a prise à la civilisation du monde, soit en cultivant, soit en encourageant les arts et les sciences. Combien d'hospices fondés, de colléges établis, de monuments pieux élevés par ses soins ! N'était-il pas juste que, dans le système d'alors, le souverain la récompensât de son dévouement à la patrie, en l'appelant auprès de sa personne, en lui accordant des distinctions, des honneurs que sa vaillante épée lui avait mérités, et en lui réservant l'entrée exclusive de certaines institutions où elle trouvait une espèce d'indemnité aux sacrifices qu'elle avait souvent faits de sa vie et de sa fortune pour soutenir la gloire du nom français.

La noblesse d'Auvergne, plus qu'aucune autre, était digne de ces faveurs. Pas un champ de bataille

qu'elle n'ait arrosé de son sang; pas une victoire ou une défaite qu'elle n'ait illustrée par l'éclat de ses talents ou de sa bravoure; pas une carrière qu'elle n'ait semée de souvenirs glorieux. De ses rangs, sont sortis près de vingt maréchaux de France, plus de trois cents officiers généraux, dont un grand nombre furent revêtus de commandements supérieurs.

A cette liste, on peut ajouter au moins quarante cardinaux, une foule d'évêques, vingt chanceliers ou gardes des sceaux de France, et une multitude de magistrats honorables. En 1789, cette noblesse n'avait pas dégénéré d'Estaing, Lafayette, Bouillé la représentaient avec honneur dans les armées de terre et de mer.

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De tels antécédents n'auraient-ils pas dû lui faire trouver grâce devant les passions populaires. Il y avait sans doute des réformes à opérer, et l'on peut s'applaudir de quelques-unes des conquêtes de la révolution.

Les lois de la révolution abolirent la noblesse ; celles des 19 juin 1790, et 27 octobre 1791, surtout, lui portèrent le dernier coup, et l'on eût pu croire que c'en était fait pour toujours de toute es

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