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Art. 3.

La présente loi est applicable dans les colonies où le

code de procédure a été promulgué.

4. Au cours de la discussion, on avait pensé à modifier en même temps les dispositions du décret du 14 juin 1813, qui imposent aux huissiers, sous des peines que les tribunaux correctionnels sont chargés d'appliquer (art, 45). l'obligation d'assurer par eux-mêmes, et sans le concours de qui que ce soit, la délivrance des actes aux parties intéressées. Tel qu'il avait été transmis par la Chambre des députés au Sénat, le projet autorisait, en conséquence, les huissiers, à s'adjoindre pour leur confier la délivrance des actes, concurremment avec eux-mêmes, des clercs assermentés. Mais le Sénat ayant trouvé que cette création des clercs assermentés soulevait de très graves difficultés, dont il convenait d'ajourner la solution, la disjonction de la disposition projetée, qui y était relative, fut votée dans la séance du 24 novembre 1898, et le projet, en tant que relatif au secret des actes, a seul été définitive ment adopté.

5.

Le législateur, d'ailleurs, en modifiant comme il vient de le faire, l'art. 68 du code de procédure civile, n'a touché, il convient avant tout de le faire observer, à aucune des formalités que l'ancien texte imposait déjà, et qui ont pour but d'assurer que la copie de l'exploit parvienne bien à la partie, à qui elle est destinée, et qui ne peut connaître, que par la remise de cette copie, l'objet de la signification (sommation, ajournement, ajournement, commandement de payer, opposition, etc., etc.),qui lui est faite. L'intention du législateur de ne rien changer à ce qui existait déjà à cet égard ne pouvait se manifester d'une façon plus claire, qu'en laissant subsister en entier, en ce qui concerne ces formalités, l'ancien texte de l'art. 68. C'est, en effet, ce qu'il a fait : le nouvel art. 68 reproduit textuellement,et sans aucun changement dans son 1er, toutes les dispositions de l'ancien, jusqu'à celle imposant à l'huissier l'obligation de mentionner dans son acte que les formalités ont été accomplies.

6. Ce qu'il faut nécessairement conclure de là, c'est que toutes les solutions, qui avaient cours en doctrine et en jurisprudence antérieurement à la loi nouvelle, relativement: 1o à la nécessité de la signification de tous exploits d'huissier à personne ou à domicile; 2° aux personnes ayant qualité pour recevoir la copie, à défaut de la partie elle-même; 3o aux lieux dans lesquels la remise de la copie peut être faite à ces personnes; 40 au nombre des copies à remettre; 5o à la signature sur l'original, qui doit être exigée du voi

sin, qui consent à recevoir la copie, et à qui elle est remise; 6o au visa du maire ou adjoint, ou au magistrat du parquet, quand c'est à ces fonctionnaires, qu'au refus ou à défaut d'autre, l'huissier est obligé de remettre la copie; n'ont point cessé d'être exactes, et doivent continuer à recevoir aujourd'hui leur application.

7. Le but, l'unique but de l'œuvre du législateur de 1899, a été d'assurer le secret des actes d'huissier. « La remise à découvert des actes d'huissier ne présente aucun inconvénient, disait M. Lebret, dans son premier rapport sur le projet de M. Gamard à la Chambre des députés, lorsqu'elle a lieu aux mains de la partie elle-même, ou des maires, adjoints, procureurs de la République ou fonctionnaires publics; elle peut, au contraire, avoir les conséquences les plus graves, donner naissance aux indiscrétions les plus fâcheuses, lorsque la copie est délivrée à un parent, à un serviteur ou à un voisin ». Ce sont ces inconvénients signalés par l'honorable rapporteur, et que personne ne pouvait méconnaître, que la modification introduite à l'art. 68 du code de procédure civile a eu pour seul but de faire cesser.

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8. Pour cela et en laissant, on ne peut que justement le répéter, subsister pour l'huissier, chargé de la signification d'un acte, toutes les obligations que lui imposait déjà l'ancien art.68, il a imposé à cet officier ministériel une obligation de plus, une obligation nouvelle, résultant de l'addition, au texte ancien dudit article, d'une nouvelle disposition ainsi conçue: Lorsque la copie sera remise à toute autre personne que la partie elle-même ou le procureur de la République, elle sera délivrée sous enveloppe fermée, ne portant d'autre indication d'un côté que les noms et demeure de la partie, et de l'autre, que le cachet de l'étude de l'huissier apposé sur la fermeture de ce pli. »

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9.

D'ailleurs, comme on l'a fait plusieurs fois observer dans les rapports écrits, et dans la discussion orale, devant le Sénat et devant la Chambre des députés, la loi nouvelle ne fait ainsi que généraliser l'application d'une disposition de l'art. 237 nouveau du Code civil, introduite par la loi du 18 avril 1886, sur la procédure en matière de divorce et de séparation de corps. Ledit article contenait, en effet, déjà une disposition exigeant qu'en matière de divorce, la citation à l'époux défendeur à comparaître pour la tentative de conciliation devant le président, fût délivrée par l'huissier ‹ sous pli fermé » ; mais cette disposition avait un caractère tout à fait exceptionnel, et on allait même jusqu'à soutenir (Dalloz, Suppl. au rép., vo Divorce, no 223) qu'elle s'appliquait uniquement à la citation en conciliation, sans pouvoir être étendue

aux autres actes du ministère de l'huissier dans une procédure de divorce.

Aujourd'hui, sous l'empire de la loi du 15 février 1899, ce qui était auparavant l'exception, est devenu le droit commun, et ce ne sont plus seulement les citations en conciliation en matière de divorce, ni même tous les actes d'huissier dans une procédure de cette nature, qui doivent être délivrés << sous pli fermé », ce sont tous actes en général du ministère des huissiers, se rattachant à une procédure quelconque, quel qu'en soit l'objet, qui doivent être délivrés « sous enveloppe fermée », d'après l'art. 68 nouveau du Code de procédure.

10. Au surplus, le laconisme de l'art. 237 du Code civil avait laissé la porte ouverte à plusieurs controverses, qui ne paraissent plus pouvoir aujourd'hui s'élever, en présence des termes beaucoup plus explicites de la nouvelle loi.

En premier lieu, en effet, l'art. 237 se bornant à énoncer que la citation devait être délivrée « sous pli fermé », on s'était demandé comment il devait être satisfait à ce vœu de la loi l'acte devait-il être placé sous enveloppe ou sous bandes entrecroisées? Ces deux formes de fermeture du pli, pour la remise de la copie de l'exploit, pouvaient-ils être indifféremment employés ? On pouvait hésiter à répondre. On ne le peut plus maintenant, le nouvel art. 68 du Code de procédure est formel; c'est sous enveloppe fermée que la copie d'un exploit d'huissier doit, en principe, être délivrée. La copie d'un exploit délivrée sans enveloppe, sous de simples bandes entrecroisées, serait incontestablement irrégulière.

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11. Une autre controverse, en ce qui concerne l'application de l'art. 237 du Code civil, était née sur le point de savoir, si la formalité de la délivrance« sous pli fermé » était obligatoire dans tous les cas, quelle que fût la personne à qui la copie était remise. On faisait observer, notamment et avec juste raison, que cette formalité, ayant pour but d'assurer le secret des actes pour éviter certaines indiscrétions et leurs conséquences regrettables, était bien inutile, lorsque la copie était remise à la partie elle-même, à laquelle elle était destinée.

Le nouveau texte répond encore à cette préoccupation, en énonçant clairement dans quel cas la formalité de la remise de la copie «< sous enveloppe fermée » est ou non obligatoire. Il résulte des termes du nouvel art. 68, que c'est « sous enveloppe fermée » que la copie doit être délivrée dans tous les cas, autres que ceux où elle est remise à la partie elle-même, ou au procureur de la République.

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12. Cette formule implique d'ailleurs l'obligation de

la formalité de l'enveloppe fermée, même au cas où la copie est remise au maire ou à l'adjoint Si un certain passage, mentionné plus haut, du rapport de M. Lebret à la chambre des députés, paraissait mettre en doute l'existence des inconvénients auxquels le législateur se proposait d'obvier, au cas où la copie est remise au maire ou à l'adjoint, cette opinion du rapporteur n'a, en tout cas, pas prévalu: le texte adopté ne laisse place à aucune équivoque; la partie elle-même et le procureur de la République sont les seules personnes, auxquelles l'art. 68 nouveau n'exige pas que la copie de l'exploit soit remise sous enveloppe fermée.

13. L'enveloppe fermée, sous laquelle la copie doit être remise, doit porter certaines indications: elle doit porter, d'un côté, les nom et demeure de la partie, et de l'autre le cachet de l'étude de l'huissier apposé sur la fermeture du pli. On avait fait observer, au Sénat, que cette apposition du cachet de l'étude de l'huissier sur l'enveloppe nuira nécessairement au secret de l'acte, en révélant à la personne qui la recevra la nature du pli qu'elle sera chargée de remettre à la partie destinataire. Mais il parut qu'il était cependant utile d'attirer par ces mentions révélatrices de la nature du pli à elle confiee, l'attention de la personne chargée de le remettre; elle saura ainsi l'importance et l'urgence qu'il y a à le transmettre sans retard. D'ailleurs si le tiers, a-t-on dit encore, peut pénétrer ainsi la nature de l'acte contenu sous le pli qui lui est confié, il n'a pas le moyen de connaître son objet, c'est-à-dire le fait même qu'il importe de mettre à l'abri de sa curiosité, et de placer sous la sauvegarde du secret le plus absolu. Il n'aura pu ni recevoir, ni prendre copie de l'acte; le but que le législateur s'est proposé se trouvera ainsi suffisamment atteint. Mais les mentions des noms et demeure de la partie, d'un côté, le cachet de l'étude de l'huissier, de l'autre côté, sont les seules indications que l'enveloppe doive porter: le paragraphe 2 du nouvel art. 68 dit expressément : « ne portant d'autre d'autre indication ».

14. Le paragraphe final de l'art. 68 nouveau dit encore que « l'huissier fera mention du tout tant sur l'original que sur la copie ». La même recommandation, formulée dans les mêmes termes figurait déjà dans l'ancien texte; mais aujourd'hui bien entendu, elle s'applique aussi bien aux nouvelles formalités exigées qu'aux anciennes, dont l'huissier est obligé rigoureusement de constater, des unes comme des autres, l'accomplissement. Il ne lui suffira donc plus, comme autrefois, de constater dans le parlant à... de son acte, que la copie a été remise par lui, .« en parlant (par exemple) à la concierge ainsi déclarée »; il lui faudra ajouter une mention

relative au mode de cette remise, et il ne saurait, semble-t-il
mieux faire que d'emprunter à la loi elle-même, pour la cons-
tatation de la formalité de la remise 'sous enveloppe fermée,
les termes mêmes, dans lesquels elle en prescrit l'accomplisse-
ment, en ajoutant après l'indication de la qualité de celui qui a
reçu la copie, la mention: «à qui j'ai remis la copie du présent
(ou la présente copie) sous enveloppe fermée portant d'un côté
les noms et demeure de M. (nom de la partie destinataire de la
copie) prénommé, qualifié et domicilié et de l'autre sur la ferme-
ture, le cachet de mon étude. >>

15.
Quelle sera la sanction en cas d'inobservation des
formalités nouvelles imposées à l'huissier par la loi du 15
février 1899 ?

Le texte de l'art. 68 nouveau lui-même est muet, il est
vrai, sur ce point, et il n'a été que peu ou point parlé de sanc-
tion au cours des travaux préparatoires. M. Gamard avait
seulement dit à cet égard en terminant son exposé des mo-
tifs: «En cas de manquement à cette prescription (c'est-à-
dire en cas de remise d'un exploit à découvert), les huissiers
seront passibles de l'amende édictée par l'art. 1030 du Code
de procédure civile; ils pourront aussi être poursuivis par la
partie lésée, conformément à l'art. 1382 du Code civil. >>

Cependant il paraît difficile de ne pas appliquer à l'inobservation des nouvelles formalités prescrites par le législateur, la sanction de la nullité des actes, pour lesquels elles auront été omises. Si, en effet, la nullité n'est pas prononcée par l'art. 68 lui-même, elle l'est par l'art. 70, que la loi nouvelle a laissé subsister, et qui déclare formellement que « ce qui est prescrit par les deux articles précédents (l'art. 68 est, par conséquent, du nombre) sera observé à peine de nullité. « Si le législateur avait voulu soustraire à la rigueur de cette sanction l'inaccomplissement des nouvelles formalités édictées par le nouvel art. 68 pour assurer le secret des actes d'huissiers, il aurait dû s'en expliquer en introduisant à cet égard dans le texte de l'art. 70 une distinction, que le juge ne peut suppléer. 16. Dès lors, il semble que le juge ne pourra se dispenser de prononcer, quand il en sera requis in limine litis, la nullité d'un ajournement, qui ne mentionnera pas, qu'il a été, dans les cas où il aura été délivré à autre que la partie elle-même ou le procureur de la République, remis sous enveloppe fermée; l'emploi du mot enveloppe » lui-même, dans la formule de constation de l'accomplissement de la formalité, sera même, si on ne voulait pas aller jusqu'à le considérer comme sacramentel, tout au moins prudent; la constatation de la remise sous pli fermé pourrait peut-être rigoureusement paraître équivoque. On s'était autrefois, en effet, demandé, on

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