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struction de l'escalier de notre demeure J'avais fait choix du figuier le plus haut et le plus touffu, et, en attendant le dîner, je fis faire à mes fils des essais pour jeter des pierres et des bâtons par dessus les branches inférieures; je l'essayai aussi moi-même; mais les plus basses étaient encore à une telle hauteur que nous ne pûmes y parvenir ni les uns, ni les autres : il fallut inventer un autre moyen d'y réussir, car sans cela il me devenait impossible de pouvoir attacher une échelle de corde à ces branches. En attendant que j'eusse donné l'essor à mon imagination, j'allai avec Jack et Fritz porter les peaux de nos bêtes dans la ruisseau voisin où elles furent assujetties avec de grosses pierres; puis on nous rappela pour le dîner, et nous vînmes manger avec plaisir notre porc-épic bouilli, qui se trouva très bon, quoique un peu dur, et qui nous avait fait surtout une excellente soupe. Ma femme ne put se résoudre à en manger, ce qui chagrina un peu notre petit chasseur Jack, qui en faisait les honneurs : elle s'en dédommagea en dînant avec du fromage et du jambon; et, sous ces beaux arbres, qu'elle avait tant désirés, ce premier repas lui parut delicieux.

CHAPITRE X.

Construction d'une échelle.

Après le repas, je dis à ma femme que je ne croyais pas possible de nous nicher ce soir-là sur l'arbre, et que nous serions obligés de coucher à terre; cependant je la priai de se mettre tout de suite à coudre les courroies pour atteler nos bêtes, et d'aller chercher au bord de la mer le bois de construction qui nous était nécessaire pour monter sur l'arbre, si j'en trouvais les moyens. Elle alla sur-le-champ se mettre à l'ouvrage, et moi, pendant son travail, je suspendis nos hamacs à des branches, pour pouvoir au moins nous gîter en sûreté pour la nuit ; j'étendis ensuite une grande toile de voile au dessus pour nous couvrir tous, et nous garantir de la rosée et des insectes. Je me hátai après d'aller, avec mes deux fils aînés, au bord de la mer, pour examiner les bois que les vagues y avaient jetés, et choisir celuiqui serait propre à faire des échelons: je n'osais me fier, pour cet objet, aux branches sèches

du figuier, qui me paraissaient trop fragiles, et il ne croissait aucune broussaille dans le voisinage. Sur le rivage il y avait sans doute une quantité de bois échoué de toute espèce, et cependant je n'en trouvai point qui n'eût demandé beaucoup de travail pour le rendre propre à mon but, et ma bâtisse aurait été fort retardée, si par hasard Ernest n'avait découvert un nombre de cannes de bambous presque couvertes de sable et de boue: je les tirai de là, et je les nettoyai avec le secours de mes fils; lorsqu'elles furent dépouillées de leurs feuilles, je les examinai et je trouvai à ma grande joie, qu'elles étaient exactement ce qu'il me fallait. Je commençai donc à couper avec ma hache ces longs bâtons en pièces de quatre à cinq pieds de long; mes fils les lièrent en trois faisceaux, proportionnés aux forces de chacun, pour que nous pussions les porter à la place de notre demeure. J'en choisis ensuite de plus minces; je voulais en faire des flèches, dont j'avais besoin pour arriver sur notre arbre. A quelque éloignement j'aperçus un buisson vert dont les branches pouvaient m'être utiles; mais il fallait l'examiner : nous nous dirigeâmes de

ce côté, et, comme il pouvait servir de repaire à quelque ennemi dangereux, nous préparâmes nos armes à feu. Bill, qui nous avait suivis par hasard, prit les devans et alla à la découverte : à peine étions-nous près du buisson qu'elle fit quelques sauts, entra comme une furieuse dans la fourrée, et mit en fuite une troupe de flammans 1, qui, avec un élan bruyant, s'élevèrent en l'air. Fritz,

1. Espèce d'oiseaux de la race des palmipèdes on oiseaux maritimes; ils doivent leur nom à la belle couleur de feu de leurs ailes. Ils se trouvent dans l'ancien et dans le nouveau continens : dans le premier, ils ne s'avancent pas au delà des contrées méridionales; dans le second, on ne les voit pas au delà de la Caroline. Les Flammans ont des mœurs qui leur sont particulières ; ils vivent en famille, fréquentent les bords de la mer ou des marais qui l'avoisinent. On les voit presque toujours en troupes, et, lorsqu'ils veulent pêcher, ils se rangent en file, ce qui, de loin, les ferait prendre pour un escadron en uniforme rouge, rangé en bataille. Ce goût de s'aligner leur reste même lorsqu'ils se reposent sur la plage; cependant il arrive aussi qu'on en voit qui sont isolés, ou seulement avec un compagnon, surtout lorsqu'ils s'avancent dans l'intérieur des terres. Soit qu'ils pêchent ou qu'ils se reposent, ils établissent des sentinelles qui font une espèce d'avant garde, et si quelque chose les alarme, ils jettent un cri bruyant, qui s'entend de très loin, et qui ressemble assez au son d'une trompette : la sentinelle s'envole la première, et tous les autres la suivent; mais, lorsqu'on n'est pas vu ou entendu par celui qui est en vedette, il est très facile d'en approcher et d'en tuer un grand nombre. Le bruit du fusil ne les fait point changer de place, il les rend plutôt immobiles ou stupéfiés ; ils demeurent les yeux fixés sur le chasseur, et sans bouger. Partout ils fuient les lieux habites; ils vivent de petits poissons, de coquillages, ou d'insectes qu'ils trouvent dans la où ils enfoncent leur gros et singulier bec. Ces oiseaux font leur nid à terre, et presque toujours dans les marais; ils amon

vase,

toujours prêt à tirer, fit promptement feu sur cette troupe aérienne, et il en tomba deux dans le buisson : l'un était mort, l'autre, légèrement blessé à l'aile, fut bientôt sur ses pieds; et après s'être secoué, voyant qu'il ne pouvait voler, il fit usage de ses hautes jambes, et courut avec une telle vitesse dans le marais que nous vîmes le moment où il allait nous échapper. Fritz, dans la joie de son cœur,

celent la fange avec leurs pieds, et en font de petits monticules d'un pied et demi de haut, fort élargis à la base, et allant en diminuant jusqu'au sommet, où ils pratiquent un petit trou, dans lequel la femelle dépose deux ou trois œufs au plus, qu'elle couve debout: ses janibes très longues sont à terre, ou plutôt dans l'eau, se reposant contre le nid qu'elle couvre de sa queue. Ses œufs sont blancs, gros comme ceux de l'oie, mais plus allongés. Les petits courent avec une singulière vitesse peu de jours après leur naissance, et ne commencent à voler que lorsqu'ils ont acquis toute leur grandeur. Leur plumage est d'abord gris-clair, presque blanc; il rougit à mesure qu'ils avancent en âge : il leur faut presque une année pour l'entier accroissement de leur corps, et ce n'est qu'alors qu'ils commencent à prendre leur belle couleur de feu. Elle paraît d'abord sur l'aile, où elle est toujours plus éclatante; s'étend ensuite sur le croupion, puis sur le dos et la poitrine, et jusqu'au cou, qui est d'une belle couleur rose. Leur chair est un mets recherché, et que l'on compare au goût de la perdrix; la langue surtout, qui est fort grosse, passe pour le morceau le plus friand. Ils varient en grandeur, grosseur et couleur, mais cette différence tient à l'âge. Lorsqu'ils sont dans leur état parfait, ils ont plus de quatre pieds du bec à la queue, et près de six pieds jusqu'à l'extrémité des ongles. Leur cou et leurs jambes sont d'une extrême longueur: tout leur plumage est dans la nuance du rouge vif au rose tendre, et cette teinte se retrouve encore dans les jambes et les pieds: quelques plumes de l'aile sont noires. Les uns ont le bec rouge, d'autres jaune, et tous l'extrémité noire (Nouv. Dict. d'Hist. nat. ).

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