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ACTEURS.

SIDNEI.

ROSALIE, amante de Sidnei.
HAMILTON, ami de Sidnei.

DUMONT, valet-de-chambre de Sidnei.

HENRI, jardinier.

MATHURINE, fille de Henri.

La scène est en Angleterre, dans une maison de campagne.

COMÉDIE.

ACTE PREMIER.

SCÈNE I.

DUMONT.

Il falloit, sur ma foi, que le mauvais poëte
Qui chanta le premier l'amour de la retraite
Fût un triste animal : quel ennuyeux séjour
Pour quelqu'un un peu fait à celui de la cour!
Depuis trois mortels jours qu'en ce manoir cham-
pêtre

Je partage l'ennui dont se nourrit mon maître,

J'ai vieilli de trois ans. Est-il devenu fou,
Monsieur Sidnei? quoi donc ! se nicher en hibou!
Lui riche, jeune, exempt de tout soin incommode,
Au milieu de son cours des femmes à la mode,
A la veille, morbleu! d'avoir un régiment,
Planter là l'univers, s'éclipser brusquement,
Quitter Londre et la cour pour sa maudite terre!
Si je savois du moins quel sujet nous enterre
Dans un gîte où jamais nous ne sommes venus !
Mais j'ai beau lui parler, il ne me répond plus ;
Depuis un mois entier c'est le silence même :
Oh! je saurai pourquoi nous changeons de système;
Il ne sera pas dit que nous nous ennuierons
Sans que de notre ennui nous sachions les raisons.
(revenant sur ses pas.)

Allons... J'allois me faire une belle querelle!
Il m'a bien défendu d'entrer sans qu'il appelle.
Il n'a point amené seulement un laquais ;

Il faut qu'en ce désert je sois tout désormais,
Et qu'un valet-de-chambre ait la peine de faire
Le service des gens outre son ministère.

Ah! la chienne de vie!... Encor si dans ces bois,
Pour se désennuyer, on voyoit un minois,
Certain air, quelque chose enfin dont au passage
On pût avec honneur meubler son ermitage,

On prendroit patience, on auroit un maintien :
Mais rien n'existe ici, ce qui s'appelle rien ;
C'est pour un galant homme un pays de famine.
J'ai pourtant entrevu certaine Mathurine,
Fille du jardinier, gentille; mais cela

M'a l'air si sot, si neuf !... Ah! parbleu ! la voilà.
Bon jour, la belle enfant.

SCÈNE II.

DUMONT, MATHURINE, faisant plusieurs

révérences.

DUMONT.

Point de cérémonie ;

Approchez... Avez-vous honte d'être jolie ?
Pourquoi cette rougeur et cet air d'embarras ?

MATHURINE.

Monsieur...

DUMONT.

Ne craignez rien: où portiez-vous vos pas?

MATHURINE.

Monsieur, je vous cherchois.

DUMONT, à part.

Ceci change la note:

Me chercher ! mais vraiment elle n'est pas si sotte.

MATHURINE.

Vous êtes notre maître ?

DUMON T.

A-peu-près; mais voyons

Comme au meilleur ami, contez-moi vos raisons.

MATHURINE.

Pour une autre que moi, monsieur, je suis venue.

DUMONT.

Oh! je vous vois pour vous.

MATHURINE.

Une dame inconnue,

Depuis quatre ans entiers toujours dans le chagrin, Demeure en ce pays dans un château voisin.

DUMONT.

Achevez, dites-moi, que veut cette inconnue ?

MATHURINE.

Vous voudrez l'obliger dès que vous l'aurez vue:
Je ne sais quel service elle espère de vous ;
Mais sitôt qu'elle a su que vous étiez chez nous,
J'étois près d'elle alors, j'ai remarqué sa joie ;
Et si je viens ici, c'est elle qui m'envoie

Vous demander, monsieur, un moment d'entretien

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