Images de page
PDF
ePub

Qui?

SIDNEI.

DUMONT.

Lui; c'est mon commis.

SCÈNE X.

SIDNEI, DUMONT, HENRI.

SIDNEI.

Faquin, quel est le maître?

DUMONT.

Monsieur, je sais fort bien que c'est à vous à l'être;
Mais enfin dans la vie il est de certains cas...
Battez-moi, tuez-moi, je ne partirai pas ;

Je ne puis vous quitter dans l'état où vous êtes,
Et plus vous me pressez, plus mes craintes secrètes...

SIDNEI.

Henri, partez pour Londre, et portez dans l'instant A mylord Hamilton ce paquet important;

Vous, sortez de chez moi; faites votre mémoire, Après quoi partez.

(Il sort.)

DUMON T.

Bon! me voilà dans ma gloire :

Vous me chassez ? tant mieux : je m'appartiens ; ainsi
Je m'ordonne séjour, moi, dans ce pays-ci...
Il n'aura pas le cœur de me quitter; il m'aime,
Et je veux le sauver de ce caprice extrême.
Les maîtres cependant sont des gens bien heureux
Que souvent nous ayons le sens commun pour eux.

FIN DU PREMIER ACTE.

ACTE SECOND.

SCÈNE I.

HAMILTON, DUMONT.

DUMONT.

Vous me tirez, monsieur, d'une très grande peine,
Et je bénis cent fois l'instant qui vous amène.
Voyez mon pauvre maître, et traitez son cerveau:
Peut-être saurez-vous par quel travers nouveau
Lui-même se condamne à cette solitude,

Et s'il veut malgré moi s'en faire une habitude.
Il vient de vous écrire, et sans doute ici près
Vous aurez en chemin rencontré son exprès.

HAMILTON.

Non: mais j'ai remarqué, traversant l'avenue,

Deux femmes, dont je crois que l'une m'est connue. Mais ma chaise a passé, je n'ai pu les bien voir : T'a-t-on dit ce que c'est ? pourroit-on le savoir?

DUMONT.

Je devine à-peu-près : au pays où nous sommes
Il faut, monsieur, qu'il soit grande disette d'hommes!
Dès qu'on a su mon maître établi dans ces lieux,
Ambassade aussitôt, sans prélude ennuyeux :
Mais lui, comme il n'est plus qu'une froide statue,
Il a tout nettement refusé l'entrevue;

Moi, qui ne suis point fait à de telles rigueurs,
Je prétends m'en charger ; j'en ferai les honneurs;
Je les prends pour mon compte; et je sais trop le
monde:

Si le cœur vous en dit...

HAMILTON.

Va, fais qu'on te réponde; Instruis-toi de leurs noms... Mais est-il averti ?

DUMONT.

Oui, j'ai fait annoncer que vous êtes ici;

Il promène ici près sa rêverie austère.
Vous l'avez vu là-bas changer de caractère,
De ses meilleurs amis éviter l'entretien,

Tout fuir jusqu'aux plaisirs : tout cela n'étoit rien.

HAMILTON.

Mais que peut-il avoir ? quelle seroit la cause...

DUMONT.

Il seroit trop heureux s'il avoit quelque chose:
Mais, ma foi, je le crois affligé sans objet.

HAMILTON.

De ce voyage au moins dit-il quelque sujet ?

DUMONT.

Bon! parle-t-il encor ? se taire est sa folie;
Ce qu'il vient d'ordonner, sur-le-champ il l'oublie :
Il m'avoit chassé, moi, malgré notre amitié,
Et j'enrageois très fort d'être congédié;
Quelques moments après je sers à l'ordinaire,
Il dîne, sans me dire un mot de notre affaire :
Voilà ce qui m'afflige, et non sans fondement.
Je l'aimerois bien mieux brutal, extravagant;
Je lui croirois la fièvre ; et, puisqu'il faut le dire,
Je voudrois pour son bien qu'il n'eût qu'un bon dé-

lire,

On sauroit le remède en connoissant le mal;
Mais, par un incident et bizarre et fatal,
Grave dans ses revers, tranquille en sa manie,
Il est fou de sang froid, fou par philosophie,
Indifférent à tout comme s'il étoit mort :

« PrécédentContinuer »