M'a cueilli ces poisons nés du sein des tombeaux. Souvent au fond des bois, par leur vertu suprême, Charmes impérieux, puissance enchanteresse, Ramenez mon berger, ou chassez ma tendresse. » Le cruel ne vient point. Que servent mes accents? Un dieu plus fort rend-il mes efforts impuissants? Tentons un dernier charme : Isis, prends cette cendre; Dans le ruisseau voisin nous devons la répandre : Répands-la loin de toi, sans y porter les yeux : Ici peut-être enfin le ciel m'aidera mieux. « Charmes impérieux, puissance enchanteresse, Ramenez mon berger, ou chassez ma tendresse. » Que vois-je? dieux du Styx, seriez-vous moins cruels? Quel présage brillant embellit ces autels! La cendre de ces fleurs se ranime elle-même ; Dois-je m'en croire? Hélas! on croit tout, quand on aime! Non, ce n'est point l'erreur d'un trop crédule amour; NOTES. Soutiens mes foibles chants, ô toi que la Victoire... Octavien-César ; il venoit de la bataille de Philippe, dans laquelle il avoit défait l'armée de Brutus et de Cassius, meurtriers de Jules-César. Mais avant que sa voix sur de plus nobles airs... Il annonce l'Énéide. J'ai cru pouvoir mettre ici Homère, au lieu de Sophocle que porte le texte. Il répéta ces vers qu'avoit dits la bergère. Cette pièce a beaucoup de l'air de la seconde idylle de Théocrite, où Siméthée, abandonnée aussi de son amant, pratique dans un sacrifice nocturne les mêmes cérémonies à-peu-près que la magicienne de Virgile. ÉGLOGUE IX. MOERIS. LYCIDAS, MOERIS. LYCIDAS. UEL sujet, cher Moris, vous conduit à la ville? QUEL M OE RIS. Hélas! ici bientôt je n'aurai plus d'asile. Ciel ! à tant de malheurs si j'étois réservé, A des ans si nombreux pourquoi suis-je arrivé? « Fuis, m'a dit un cruel, fuis, cherche une autre terre; « Ton champ devient le mien par les lois de la guerre.» Berger, tel est mon sort: vous voyez ces chevreaux, Malgré moi je les porte à l'auteur de mes maux; Mais plaise aux dieux pasteurs, souverains des prai Que ce présent forcé nuise à ses bergeries! LYCIDAS. Un berger m'avoit dit qu'en faveur des beaux vers, Par votre fils Ménalque au dieu de Rome offerts, On vous laissoit un champ depuis cette colline Jusqu'à ce plant d'ormeaux que le fleuve termine. M OER IS. Il est vrai; mais tout change, et nos vers sont perdus; Et l'aimable Ménalque eût eu le même sort. IYCIDA S. O dieu! Mais, cher Moris, cet étranger féroce Ménalque, cher pasteur, délices de nos champs, Tels que ceux qu'en secret tu m'appris l'autre jour, Quand tu quittas ces lieux pour retourner aux rives Dont le dieu recueillit tes muses fugitives? Mais insensiblement mon troupeau reste au loin : Jusques à mon retour, Tityre, ayez en soin; Quand vous le conduirez au bord de la rivière, Évitez du belier la corne meurtrière. M OER IS. Les beaux vers qu'en partant Ménalque vous a lus Sont un essai de ceux qu'il fera pour Varus. Je veux t'offrir des vers que Phébus même avoue, Varus, si nous restons dans nos champs de Mantoue. ‹O déplorable ville! ô champs abandonnés ! «Ne vous verrai-je plus féconds et fortunés? Vous seriez moins en proie aux horreurs de Bellone, Si vous étiez, hélas ! moins voisins de Crémone. » LYCIDAS. De votre docte fils j'aime toujours les vers. |