ÉGLOGUE X. 00-0000.00. GALLUS. m NYMPHE, autrefois propice au pasteur de Sicile, Chantons tout s'attendrit ; mes brebis attentives Semblent s'intéresser à mes chansons plaintives, L'amante de Narcisse, oubliant ses malheurs, Dans ses antres profonds redira nos douleurs. Des secrets de Phébus, Nymphes, dépositaires, Sur quels bords étiez-vous, dans quels bois solitaires, Quand l'aimable Gallus, prêt à perdre le jour, Dans un triste désert exhaloit son amour? Ah! d'Aganippe alors vous aviez fui les rives; Sans doute, au bruit des eaux tristement fugitives, Vous eussiez reconnu dans le sacré vallon Que tout plaignoit le sort d'un ami d'Apollon; Les lauriers languissoient sous leurs tiges flétries; Les fleurs mouroient autour des fontaines taries; Et des bois d'Hélicon les sensibles échos En sons entrecoupés répétoient des sanglots. Seul, et de Lycoris pleurant la perfidie, Gallus sut émouvoir les rochers d'Arcadie: Un troupeau, près de lui languissamment errant, Partageoit la douleur de son berger mourant (Souffre ce nom champêtre, ingénieux poëte; Vouloit rendre le calme à ton ame agitée : Eut peine à consoler son premier favori. Cher Gallus, dit le dieu, quel fol amour t'enchante! Ta Lycoris te fuit; cette volage amante, Fidèle à ton rival, brave en d'autres climats Les périls de la guerre, et l'horreur des frimas. Avec Faune et Silvain, Pan, le dieu des campagnes, Pour soulager Gallus, vint du fond des montagnes : Quel désespoir, dit-il, berger infortuné! A perdre ainsi tes jours es-tu donc obstiné? L'Amour n'est point sensible à tes vives alarmes ; C'est un enfant cruel, il se plaît dans les larmes ; Nos malheurs sont ses jeux, nos peines ses plaisirs : L'abeille vit de fleurs, l'Amour vit de soupirs. De sa peine, à ces mots, calmant la violence, Gallus rompit enfin un lugubre silence; D'une voix presque éteinte il dit en soupirant: Derniers témoins des maux d'un berger expirant, Pasteurs de l'Arcadie, arbitres des airs tendres, Bientôt vous donnerez un asile à mes cendres; Mon ombre chez les morts descendra sans regrets, Si vous éternisez mon nom dans vos forêts. Hélas! de mon destin que n'ai-je été le maître ! Sous vos paisibles toits si le ciel m'eût fait naître, Je chérirois encor le lieu de mon berceau Dans nos champs où l'Amour a creusé mon tombeau : Heureux, j'eusse trouvé dans vos plaines chéries Que n'es-tu, Lycoris, sur ces charmants rivages! Vains souhaits! tu me fuis. Où pourrois-je encor Aux fureurs des combats faut-il que je me livre ? N'empêchez point les fleurs d'éclore sous ses pas; Et vous, Zéphyrs, Amours, suivez-la sur ces rives, Des chaînes de l'hiver tirez leurs eaux captives; Que la riante Flore établisse sa cour Par-tout où Lycoris fixera son séjour. Pour moi, traînant par-tout ma triste léthargie, Que jamais nul troupeau, nul berger n'a foulées ; Mais que veux-je? pourquoi changer mes jours en |