SCENE VIII. LEONOR, LISETTE, SGANARELLE, ARISTE. LEONOR. O l'étrange martire! Que tous ces jeunes foux me paroiffent fâcheux! Je me fuis dérobée au Bal pour l'amour d'eux. LISETTE. Chacun d'eux près de vous veut se rendre agréable. LEONOR. Et moi je n'ai rien vû de plus infupportable, A tous les contes bleus de ces difcours de rien; Que tous les beaux transports d'une jeune cervelle : SGANARELLE. Oui, l'affaire eft ainfi : Ah! je la vois paroître, & fa Suivante auffi. ARISTE. Léonor, fans courroux, j'ai fujet de me plaindre, LEONOR. Je ne fais pas fur quoi vous tenés ce discours; Mais croyés que je fuis la même que toûjours; Deffus quel fondement venés-vous donc, mon frere? SGANARELLE. Quoi! vous ne fortés pas du Logis de Valère ? Vous n'avés point conté vos amours aujourd'hui? Et vous ne brûlés pas depuis un an pour lui? LEONOR. Qui vous a fait de moi de fi belles peintures, SCENE IX. ISABELLE, VALERE, LE COMMISSAIRE, LE NOTAIRE, ERGASTE, LISETTE, LEONOR, SGANARELLE, ARISTE. ISABELLE. MA. fœur, je vous demande un généreux pardon, Si de mes libertés j'ai taché votre nom; Le preffant embarras d'une furprise extrême Pour vous, je ne veux point, Monsieur, vous faire excufe, Je vous fers beaucoup plus que je ne vous abuse; Et j'ai bien mieux aimé me voir aux mains d'un autre, VALERE. Pour moi, je mets ma gloire & mon bien fouverain, A la pouvoir, Monfieur, tenir de votre main. F 4 ARIS ARISTE. Mon frere, doucement, il faut boire la chofe, LISETTE. Par ma foi, je lui fais bon gré de cette affaire, LEONOR. Je ne fais fi ce trait fe doit faire estimer, ERGASTE. Au fort d'être cocu fon afcendant l'expofe, SGANARELLE, Non, je ne puis fortir de mon étonnement, Bon. ERGASTE. ARISTE. Allons tous chez moi. Venés, Seigneur Valère; Nous tâcherons demain d'appaiser fa colère. LISETTE. Vous, fi vous connoiffés des maris loups-garous, FIN. 3. LES FACHEUX, COMEDIE, Faite pour les divertiffemens du Roi, Et représentée pour la première fois en Puclic à Paris fur le Théâtre du Palais Royal, le 4 de Novembre de la même année 1661. Par la Troupe de Monfieur Frere AU ROI. SIRE, Pajoûte une Scène à la Comédie, & c'est une espèce de Facheux affez infuportable, qu'un homme qui dédie un Livre. VOTRE MAJESTE en fait des nouvelles plus que perfonne de fon Royaume, & ce n'eft pas d'aujourd'hui qu'Elle fe voit en bute à la furie des Epîtres dédicatoires. Mais bien que je fuive l'exemple des autres, & me mette moi-même au rang de ceux que j'ai joüés; j'ofe dire toutefois à VOTRE MAJESTE', que ce que j'en ai fait, n'eft pas tant pour lui préfenter un Livre, que pour avoir lieu de lui rendre graces du fuccès de cette Comédie. Je le dois, SIRE, ce fuccès qui a passé mon attente, non-feulement à cette glorieufe approbation, dons VOTRE MAJESTE bonora d'abord la Pièce, & qui a entraîné fi hautement celle de tout le monde ; mais encore à l'ordre qu'Elle me donna d'y ajoûter un caractère de Fâcheux, dont elle eut la bonté de m'ouvrir les idées Elle-même, & qui a été trouvé par tout le plus beau morceau de l'Ouvrage. Il faut avouer, SIRE, que je n'ai jamais rien fait avec tant de facilité ni fi promptement que cet endroit, où VOtre mafestE' me commanda de travailler. J'avois une joie a lui obéir, qui me valoit bien mieux qu'A. |