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Quelques autres à la vérité, ajoute-t-il, renferment des dispositions qui seraient très préjudiciables à l'Église, si elles étaient exécutées à la rigueur. On a tout lieu de croire qu'elles ont été ajoutées au concordat comme des règlements de circonstance, comme des ménagements jugés nécessaires pour aplanir la voie au rétablissement du culte catholique; et nous espérons de la justice et de la religion de Sa Majesté, qu'elle daignera les révoquer ou les modifier de manière à dissiper les inquiétudes qu'elles ont fait naître.

Le conseil en indique trois: Le premier, sur les bulles, brefs... qui ne devaient être reçus, ni mis à exécution, sans l'autorisation du gouvernement. Il désire qu'on excepte les brefs de pénitencerie, qui étaient formellement exceptés par les parlements. Le vingt-sixième sur la fixation à trois cents francs du titre ou revenu exigé des ecclésiastiques, pour être ordonnés par l'évêque; tandis qu'il n'était que de cent cinquante francs avant la Révolution où les aspirants, pris pour la plupart dans des classes élevées, étaient bien plus riches. Le trente-sixième sur les vicaires généraux qui devaient, par cet article, continuer leurs fonctions, même après la mort de l'évêque, tandis qu'il est de principe que les pouvoirs du grand vicaire expirent avec celui qui les a donnés, que le chapitre se trouve de plein droit investi de la juridiction épiscopale, et que c'est par lui que sont nommés les vicaires généraux qui gouvernent pendant la vacance du siège.

Il est juste de remarquer que ces trois demandes furent accordées par décret, le 28 février 1810.

DEUXIÈME QUESTION. L'état du clergé de France est-il, en général, amélioré ou empiré depuis que le concordat est en vigueur ?

La réponse est ici la plus affirmative, la plus détaillée, la plus riche en faits. Outre la liberté du culte catholique qui est, à elle seule, le plus grand des bienfaits dus au concordat, que de nouveaux bienfaits depuis cette époque! Dotation des chapitres; trente mille succursales pensionnées; quatre cents bourses et huit cents demi-bourses pour les séminaires; exemption de la conscription pour les étudiants présentés par l'évêque; invitation aux conseils généraux de département de suppléer aux dotations des évêques, des chapitres, et de pourvoir aux besoins du culte; rétablissement des congrégations religieuses vouées à l'enseignement gratuit, au soulagement des pauvres et des malades, etc... Tous ces faits sont évidents. TROISIÈME QUESTION. Si le gouvernement français n'a point violé le concordat, le pape peut-il, arbitrairement, refuser l'institution aux archevêques et évêques nommés, et perdre la religion en France, comme il l'a perdue en Allemagne, qui, depuis dix ans, est sans évêques ?

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Réponse. Le concordat est un contrat synallagmatique entre le chef de l'État et le chef de l'Église, par lequel chacun d'eux s'oblige envers l'autre... C'EST AUSSI un traité public par lequel chacune des parties contractantes acquiert des droits et s'impose des obligations. Le droit réservé au pape ne doit pas être exercé arbitraire ment. Par le concordat entre le roi François 1er et Léon X1 (1515), le pape était tenu d'accorder les bulles d'institution aux sujets nommés par le souverain, ou

1. Ce concordat dont les bases furent jetées le 10 décembre 1515, dans une entrevue entre les deux souverains, ne fut signé que le 18 août 1516. Il abolissait la pragmatique sanction, abandonnait au pape le revenu des annates et reconnaissait la supériorité du pape sur les conciles. Par contre, il donnait au roi le droit de nommer à toutes les prélatures de France.

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d'alléguer les motifs canoniques de son refus. Pie VII est également lié envers l'empereur et la France par le concordat qu'il a solennellement ratifié.

Le Saint-Père ayant écrit de Savone, le 28 août 1809, une lettre au cardinal Caprara pour exposer les motifs de ses refus, le conseil ne croit pas s'écarter du profond respect dont il est pénétré pour la personne et la dignité suprême du chef de l'Église, en mettant sous les yeux de l'empereur les réflexions qu'il oserait présenter à Sa Sainteté elle-même, s'il était admis à l'honneur de conférer avec elle.

Le pape donnait trois motifs de refus dans sa lettre : 1o Les innovations religieuses introduites en France depuis le concordat, et cependant il n'en articulait aucune qui fut une atteinte essentielle portée à ce concordat. Les innovations. connues avaient été en France des bienfaits pour la religion. Le gouvernement avait fait droit aux représentations sur les articles organiques, et, d'ailleurs, cette plainte déjà ancienne, en ce qui concerne la France, n'avait point été suivie, jusqu'alors, d'un refus de bulles de la part du pape. 2o Le second motif était fondé sur les événements et les mesures politiques qu'il ne lui appartenait pas de juger. - L'événement principal, dit le conseil, est le décret de 1809, portant réunion de l'État romain à l'empire français Ce motif est-il canonique ? Est-il fondé sur les principes et sur l'esprit de la religion? Le conseil répond: La religion nous apprend à ne pas confondre l'ordre spirituel et l'ordre temporel; la juridiction que le pape exerce essentiellement de droit divin est celle que saint Pierre a reçue de Jésus-Christ, la seule qu'il ait pu transmettre à ses successeurs; et celle-ci est purement spirituelle. La souveraineté temporelle n'est pour les papes qu'un accessoire

étranger à leur autorité. La première durera autant que l'Église, autant que le monde; et l'autre, d'institution humaine, n'étant point comprise dans les promesses divines qui ont été faites à l'Église, peut être enlevée, comme elle a été donnée, par les hommes et les événements. Dans toutes les suppositions à cet égard, et quelle que soit la position politique du pape, son autorité dans l'Église universelle et ses relations avec les Églises particulières doivent être toujours les mêmes, et comme il n'a reçu ses pouvoirs que pour l'avantage des fidèles et le gouvernement de l'Église, le conseil se persuade que le Saint Père mettrait un terme à ses refus, s'il était convaincu, comme eux qui voient les choses de près, que ce refus ne peut être que très préjudiciable à l'Église.

D'après le conseil, l'invasion de Rome ne peut donc être un motif pour refuser l'institution canonique aux évêques nommés. Cette invasion n'est pas une violation du concordat. Le concordat n'a rien stipulé, rien garanti du temporel; et tant que la juridiction du pape sur l'Église de France est reconnue, les liens qui attachent cette Église à la chaire de saint Pierre ne sont point relâchés, et le concordat subsiste dans son intégrité.

Le pape reconnaît cette distinction dans sa lettre, mais il ne pouvait, dit-il, sacrifier la défense du patrimoine de l'Église. Cela n'est point contesté: il pouvait réclamer avec toute la force de ses moyens. Mais comment le refus des bulles serait-il un de ces moyens ? Si l'empereur exigeait et obtenait des évêques nommés quelque déclaration contraire à l'autorité du SaintSiège, ou relative à l'invasion des Etats romains, le pape serait dans son droit pour leur refuser l'institution canonique; mais il n'y a rien de semblable dans la circonstance. Comment donc

pourrait-il vouloir ou croirait-il pouvoir les punir pour un événement qui ne peut leur être imputé? Lorsque Rome fut prise d'assaut par les troupes de Charles-Quint, Clément VII, pour se venger de ce prince, a-t-il abandonné toutes les Églises à l'anarchie? 3o Le troisième motif de refus dans la lettre du Saint-Père est pris dans sa situation actuelle. Dieu sait, dit le pape, si nous désirons ardemment donner aux églises de France vacantes leurs pasteurs, et si nous désirons trouver un expédient pour le faire d'une manière convenable; mais devons-nous agir dans une affaire de si haute importance sans consulter nos conseillers naturels? Or, comment pourrionsnous les consulter, quand, séparé d'eux par la violence, on nous a ôté toute libre communication avec eux, et, en outre, tous les moyens nécessaires pour l'expédition de pareilles affaires, n'ayant pu même, jusqu'à présent, obtenir d'avoir auprès de nous un seul de nos secrétaires ?

L'objection était forte, et le conseil se vit réduit à faire la réponse suivante: A ces dernières plaintes, nous n'avons d'autre réponse à faire que de les mettre nous-mêmes sous les yeux de Sa Majesté, qui en sentira toute la force et toute la justice.

Cette phrase n'était peut-être pas sans quelque courage, car c'était justifier le refus du pape, et montrer clairement à l'empereur son injustice et son inconséquence.

QUATRIÈME QUESTION. Le gouvernement français n'ayant point violé le concordat, si, d'un autre côté, le pape refuse de l'exécuter, l'intention de Sa Majesté est de regarder le concordat comme abrogé, mais, dans ce cas, que convient-il de faire pour le bien de la religion?

Réponse. Si le pape persistait à se refuser à l'exécution

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