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Le roi Louis XVIII, ainsi qu'on l'a vu par la dépêche de M. de Talleyrand, reçut une copie de la convention du 3 janvier, et l'original de cette convention restée secrète avait été déposé au ministère des affaires étrangères à Paris. Lorsque l'empereur Napoléon revint de l'île d'Elbe, on assure qu'un employé supérieur de ce ministère, voulant se faire valoir près de lui, porta à l'empereur la convention en question. Une autre version voudrait que c'eût été dans le secrétaire même de Louis XVIII que Napoléon trouva la convention. Quoi qu'il en soit sur le plus ou moins de vraisemblance de ces deux versions, il reste certain que Napoléon eut connaissance de la convention, et ne perdit pas un instant pour essayer d'en tirer parti.

Tout le corps diplomatique étranger accrédité près de Louis XVIII avait quitté Paris bientôt après l'entrée de l'empereur Napoléon dans cette capitale. Un employé de la légation de Russie, M. Butiakin, celui même dont il est fait mention dans une des dépêches de M. de Talleyrand, y avait prolongé son séjour. Le duc de Vicence, devenu ministre des affaires étrangères, le fait appeler, lui dit qu'il a une communication importante à faire parvenir à l'empereur de Russie, et lui demande s'il voudrait s'en charger, mais à la condition de la porter sans retard. M. Butiakin accepta, et, peu d'heures après, le duc de Vicence lui remit un paquet qui contenait une copie de la convention et une lettre par laquelle il cherchait à enflammer l'empereur Alexandre contre les alliés perfides qui le trompaient. Napoléon avait cru par ce moyen rompre la coalition.

M. Butiakin arriva à Vienne dans les premiers jours du mois d'avril 1815. Peu après son arrivée, l'empereur Alexandre invita M. de Metternich à se rendre chez lui et lui montra la copie de la convention en lui disant : « Connaissez-vous cela? » Après avoir joui pendant quelque temps de l'embarras du ministre autrichien, il lui dit avec douceur: «Mais oublions tout cela; il s'agit de renverser notre ennemi commun, et cette pièce que lui-même m'a envoyée prouve combien il est dangereux et habile. Et, en même temps, l'empereur Alexandre jeta la pièce au feu. Il fit aussi promettre à M. de Metternich de ne rien communiquer à M. de Talleyrand de ce qui venait de se passer, et M. de Metter

nich, heureux d'échapper à si bon marché de ce méchant pas, promit et se fut.

L'empereur Alexandre croyait avoir encore besoin de M. de Metternich et il le ménagea dans cette circonstance critique. Mais il n'en fut pas de même avec M. de Talleyrand, auquel il ne dit pas un mot de la convention du 3 janvier, réservant, sans doute, sa vengeance pour une autre occasion. En effet, après la bataille de Waterloo et la rentrée du roi à Paris, les plénipotentiaires russes, qui, l'année précédente, s'étaient montrés si conciliants, et qui avaient toujours travaillé à amoindrir les exigences de leurs collègues envers la France, devinrent aussi difficultueux que ceuxci, et ce n'est qu'après la retraite de M. de Talleyrand et l'entrée du duc de Richelieu au ministère, que les plénipotentiaires russes prirent, dans une certaine mesure, le parti de la France contre les prétentions exorbitantes des autres puissances. (Note de M. de Bacourt.)

FIN DU TOME DEUXIÈME

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