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de plus ofé dire qu'il n'y a que des infenfez qui AN.1239. croient que Dieu createur de tout ait pû naître d'une vierge qu'un homme ne peut être conçû que par l'union des deux fexes; & qu'on ne doit croire que ce qu'on peut montrer par la raison naturelle. On pourra prouver en tems & lieu tous ces blasfêmes; & qu'il a combattu la foi en plufieurs autres manieres, tant par les paroles que par les actions. La lettre finit en ordonnant aux évêques de la rendre publique. Elle eft datée du premier de Juillet Rain. n.26. 1239. & n'eft pas moins remplie d'injures que celle de l'empereur.

408.

Quant au blasfême touchant les trois impofteurs, Matt Parif.p. Mathieu Paris le raporte, mais comme une calomnie imputée à Frideric par fes ennemis, dont la reputation ne laissa pas d'être obfcurcie. Ils difoient auffi, ajoûte-t-il, qu'il avoit proferé des blasfêmes abominables & incroïables touchant l'eucharistie, & qu'il croïoit plus à la religion de Mahomet qu'à celle de J. C. enfin le bruit fe répandit parmi le peuple qu'il étoit depuis long-tems allié aux Sarrafins & les aimoit plus que les Chrétiens. Dieu fait fi les auteurs de ces mauvais difcours pechoient ou non. Ainfi parle Mathieu Paris. L'auteur de la vie de Gregoire IX. ap.Rain 1239.m qui eft contemporain, dit en parlant de cette erreur de Frideric: Il l'a prife par le commerce avec les Grecs & les Arabes', qui lui promettoient la monarchie univerfelle par la connoiffance des aftres ; & l'ont tellement infatué, qu'il fe croit un dieu fous l'apparence d'un homme, & dit hautement, qu'il eft venu trois impofteurs pour féduire le genre humain. Il ajoûte qu'il doit détruire une quatriéme impofture

281

AN.1239.

XXIV.
Réponse.
Petr de Vin, 1.

epift.31.

XXV.

tolerée par
pape.

de

les hommes fimples, qui est l'autorité du Frideric aïant vû cette lettre ne demeura fans pas réponse. Il en fit écrire une adreffée aux cardinaux, où d'abord il établit l'allegorie des deux grands luminaires, pour signifier le facerdoce & l'empire : ce qui fait voir que c'étoit alors un principe convenu part & d'autre. Enfuite il rend au pape injures pour injures, emploïant de même des figures tirées des livres facrez. C'eft, dit-il, le grand dragon qui féduit l'univers, l'Ante-Chrift, un autre Balaam & un prince de tenebres. Pour fe juftifier touchant les trois féducteurs, il fait fa profeffion de foi correcte & catholique fur la divinité de J. C. & le mystere de l'incarnation; & parle de Moïfe & de Mahomet comme doit faire un Chrétien. Il reproche aux cardinaux de n'avoir pas retenu les emportemens du pape, qu'il attribuë à la jaloufie de ses bons fuccés contre les Lombards. Il foûtient que le pape a perdu sa puisfance en perdant la vertu, il tient fes cenfures pour nulles & pour des injures dont il doit tirer vengeance même par le fer, fi les cardinaux ne ramenent le pape à la raison, & n'arrêtent le cours d'un procedé si

violent,

La guerre étant ainfi déclarée de part & d'autre, contre le pape. l'empereur Frideric fit publier au mois de Juin 1239.

Ordonnances

1931.

Ric. S. Germ.p. dans fon roïaume de Sicile les articles fuivans. Les freres Prescheurs & les Mineurs originaires des lieux rebelles de Lombardie feront chaffez du roïaume, & on fe gardera des autres, afin qu'ils ne fassent rien contre l'empereur. Il en fera de même des autres religieux. On levera fur les églises cathedrales un sub

fide pour l'empereur felon leurs facultez; de même fur les chapitres, fur le reste du clergé, & les moines noirs ou blancs. Ceux qui font en cour de Rome reviendront, fous peine de confifcation de leurs biens. Les biens & les benefices que les clercs étrangers poffedent dans le roïaume feront auffi confifquez. On ne permettra à perfonne d'aller en cour de Rome ni d'en revenir, fans ordre de la cour imperiale. On pofera des gardes pour empêcher que perfone, homme ni femme, n'apporte dans le roïaume des lettres du pape contre l'empereur : quiconque en fera trouvé porteur fera pendu; & fi ce font lettres de creance, il fera tenu d'en declarer la teneur, & puni de même si elles font contre le prince.

y

AN. 1239.

ep. 23.

A cette ordonnance de l'empereur fe rapporte une e'. de Vin. xi lettre adreffée au capitaine du roïaume, par laquelle il dit que le pape y avoit envoïé des lettres par des freres Prefcheurs & Mineurs, & par d'autres religieux pour faire obferver l'excommunication & l'interdit qu'il avoit fulminé contre lui. L'empereur ordonne donc au capitaine de condamner au feu toute perfone de quelque condition, de quelque âge ou fexe que ce foit, qui aura prefenté ou reçû de telles lettres, ou déferé a ces ordres du pape. Il veut même qu'il foit permis à toute persone d'en faire justice, quand elle les dra fur le fait. L'empereur maltraita auffi les moines, ap.Rain.n.zo. particulierement ceux du Mont-Caffin. Dès le mois d'Avril il fit mettre des gardes à l'abbaïe, il la chargea d'impofitions & chaffa les moines de tems en tems; de forte qu'au mois de Juillet il n'en laissa pour faire le fervice divin. Cependant le pape fachant l'extrêmité où les

huit

Tome XVII.

Dd

pren

que

Ric. S. Germ 1239.vita Gregi

AN.1239.

XXVI.

terre fainte re

taidée.

François étoient réduits dans CP. s'efforçoit de tourner à leur fecours toutes les forces des croisez : non Croifade de la feulement de ceux qui avoient pris la croix pour y aller avec l'empereur Baudouin, mais encore de ceux qui s'étoient croisez pour aller droit en Syrie, & qui étoient les plus confiderables. A leur tête étoit Thibaud VI. comte de Champagne devenu roi de Navarre par le decés de Sanche le fort fon oncle maternel. Il étoit fils poftume de Thibaud V. qui s'étant croifé Supliv Lxxv.n. aux prédications de Foulques de Neüilli mourut en 1201. lorfqu'il fe préparoit au voïage. Ainsi Thibaud VI. étoit âgé de trente-trois ans quand il fut couronné roi le fecond dimanche après Pâques septiéme jour de Mai 1234. & l'année fuivante il le croifa pour accomplir le vœu de fon pere. Avec lui fe croiferent Pierre de Dreux duc de Bretagne furnommé Mauclerc, Hugues IV. duc de Bourgogne, l'un & l'autre de la maifon de France, Henri comte de Bar, Amauri comte de Monfort, le comte de Vendôme & plufieurs. autres nobles François.

10.

Alberic. 1234.

3235.

xií ep.399.ap. Rain.n.79.

Comme ils virent que le pape retardoit leur voïage & détournoit une partie des legs pieux & des autres aumônes deftinées au fecours de la terre fainte, qu'il avoit ordonné de leur remettre entre les mains: ils lui écrivirent pour lui témoigner leur étonement & leur embarras. Le pape leur répondit : Vous ne devez point douter que nous n'aïons principalement à cœur l'affaire de la terre fainte, mais võïant la ruïne prochaine dont eft menacé l'empire de Romanie, nous fommes obligez de travailler foigneufement à le fecourir, puifque le foutien de la terre finte en dépend entierement: C'est pourquoi après

en avoir déliberé avec nos freres les cardinaux, nous AN. 1 239. avons réfolu d'envoïer à l'empire de Romanie le fecours destiné à la terre fainte. Ce qui ne doit point vous troubler, au contraire nous vous exhortons à vous tenir prêts pour le paffage que nous dénonçons pour la S. Jean prochaine. La lettre eft adreffée aux feigneurs que j'ai nommez, excepté le duc de Bretagne, & dattée de Rome le neuvième de Mars 1239.

Les feigneurs croisez s'assemblerent en effet à Lion pour regler leur voïage; mais comme ils tenoient leur conference il vint un nonce de la part du pape en grande hâte, pour leur défendre de paffer outre, & leur ordonner de retourner promptement chez eux, montrant la commiffion qu'il avoit pour ce fujet. Les croifez répondirent tout d'une voix : D'où vient cette variation dans la cour de Rome ? N'est-ce pas ici le terme & le lieu qui nous ont été prefcrits depuis long-tems par les legats & les prédicateurs du pape Suivant leur promeffe nous fommes disposez au voïage pour le service de Dieu : nous avons préparé nos vivres, nos armes, & tout ce qui nous eft neceffaire: nous avons engagé ou vendu nos terres, nos maifons & nos meubles, nous avons dit adieu à nos amis : nous avons envoïé devant nôtre argent à la terre fainte & annoncé nôtre arrivée, nous fommes près du port; & maintenant nos pafteurs changent de langage & veulent empêcher le fervice de J. C. Leur indignation étoit telle, qu'ils fe feroient jettez fur le nonce du pape, fi les prélats n'avoient moderé l'emportement de la multitude.

Incontinent après vinrent des envoïez de l'empereur qui representerent fortement aux croifez, qu'ils

Matth. Parif. 39. p. 461.

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