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l'églife. L'année suivante 1240. duc Jean de Breta- AN. 1239

gne à la priere des évêques & des feigneurs chaffa les
Juifs abfolument de toutes les terres de fon obéïffan-
ce, par
édit du mardi avant Pâques, c'est-à-dire, du
dixième jour d'Avril.

XXIX.

Manichéens

Alberic. p.

Cette année 1239. le treiziéme de Mai qui étoit le vendredi avant la Pentecôte, on fit une execution brûlez, celebre des Bulgares ou Manichéens à Monthemé 69. en Champagne diocese de Châlons, en presence du roi de Navarre & des barons du païs, de l'archevê

que

de Reims & de dix-fept evêques; favoir de Soiffons, de Tournai, de Cambrai, d'Arras, de Teroüane, de Noyon, de Laon, de Senlis, de Beauvais & de Châlons, ces deux feulement élûs, d'Orleans, de Troyes, de Meaux,.de Verdun & de Langres : de plufieurs abbez, prieurs, doïens & autres ecclefiaftiques: le peuple qui vint à ce fpectacle étoit estimé à cent mille ames. On y brûla cent quatre-vingt-trois heretiques, qui fut un holocauste agréable à Dieu, dit le Moine Alberic auteur du tems. Il ajoûte qu'ils avoient entre eux une vieille de grande réputation nommée Gifle native de Provins, qu'ils qualifioient l'abbeffe, dont l'execution fut differée, parce qu'elle promit à frere Robert d'en découvrir encore une ap. Echard. pa grande quantité. Frere Etiene de Bourbon ou de Bel- $60. leville Jacobin dit avoir affifté au jugement de ces heretiques.

Frere Robert qui poursuivoit la condamnation de Alber p. sooth ces heretiques étoit auffi Jacobin, & on l'avoit furnommé le Bulgare, parce qu'il avoit été de leur fecte. Car vers le tems du grand concile de 1215. une femme Manichéene l'avoit amené à Milan, où il Tomé XVII.

Ee

AN. 1239.

1238. p. 407

avoit embrassé cette heresie, & y étoit demeuré pendant vingt ans, passant pour un des plus parfaits. S'étant converti il entra dans l'ordre des freres Pref cheurs ; & comme il étoit favant & parloit avec force & facilité, il s'acquit une grande réputation. Il témoignoit un grand zele contre ces heretiques, qu'il Matth. Parif. Connoifsoit parfaitement par le long tems qu'il avoit paffé avec eux, & prétendoit les reconnoître à leur langage & à leurs geftes. Il en découvrit grand nombre particulierement en Flandres, & les faifoit brûler fans mifericorde, appuyé de la protection de faint Louis, auquel il impofoit par la vertu apparente. Mais enfuite abufant de l'autorité d'inquifiteur qu'il avoit receuë, & ne fongeant qu'à fe rendre formidable, il ne gardoit plus de mefure & confondoit les innocens avec les coupables. C'est pourquoi le pape lui ôta la commiffion d'inquifiteur; & enfin il fut convaincu de tant de crimes, qu'il fut condamné à une prison perpetuelle.

XXX.

la province de

Reims.

lib. 3. c. 32. p.

Henri de Braine archevêque de Reims avoit interCenfures dans dit les églifes de la ville & excommunié les bourgeois, pour s'être foulevez contre fon bailli & fes officiers, Marlot. tom. 2. qui levoient avec trop de rigueur les fommes aufquelles les bourgeois avoient été condamnez envers l'archevêque. Le pape Gregoire confirma ces cenfures par fa bulle du 11. Juin 1239. qui porte que fi les Sup. liv. 1xxx bourgeois n'obéïffent, on faifira leurs revenus & leurs dettes actives dans les foires & par tout ailleurs.

$26.

a. sa.

ap. Rain. n. 76.

Marlot. p. 547.

Thomas de Beaumez,dont il a déja été parlé, étoit un gentilhomme d'Artois fils de Gilles Seigneur de Beaumez & chatellain de Bapaume, & d'Agnés de Couci : ainfi Thomas étoit parent de l'archevêque

567

Henri. Il fut dès sa premiere jeunesse chanoine d'Ar- AN.1239, ras, puis l'archevêque le fit chanoine & prevôt de Reims. A l'occafion du differend entre le roi & l'évêque de Beauvais Thomas fut chassé de Reims, & n'y étoit pas encore rentré quand il fut pris & retenu en prison, on ne fait pourquoi, par trois Gentilshommes du païs, Nicolas de Rumigni & Collard fon fils & Hugues Grifondel. C'eft pourquoi l'archevê- to. XI. cone. p. que Henri tint un concile à S. Quentin au mois de 18. Marlor. po Novembre 1239. où furent faits trois decrets : le premier ordonne que les trois Gentilshommes seront admonestez de mettre en liberté Thomas de Beaumez, & de fatisfaire à lui & aux églifes dont il eft chanoine pour l'injure qu'ils lui ont faite. S'ils ne le font ils seront dénoncez excommuniez de l'autorité du pape, & par celle du present concile. S'ils foûtiennent l'excommunication pendant quinze jours,les terres qu'ils ont dans la province de Reims feront en interdit, jufques à ce qu'ils aïent rendu le prevôt Thomas & reparé les dommages. Quinze jours après la publication de l'interdit, les enfans de ces gentilshommes ne feront admis à aucun benefice dans la province de Reims pendant vingt ans. Si ces moïens ne suffifent, on implorera le fecours des feigneurs temporels dont leurs biens relevent; & fi ces feigneurs dans le terme qui leur fera prefcrit ne font pas leur devoir pour contraindre les trois gentilshommes de recourir à l'églife, ils feront excommuniez & leurs terres mifes en interdit. Enfin nous fupplions, dit le concile, le fouverain seigneur temporel, c'est-à-dire le roi, d'interpofer fon autorité pour la délivrance du prevôt & la conservation du droit de l'église. Je n'ai

AN.1239. point encore vû de cenfures ecclefiaftiques pouffées à ces deux dégrez. Le fecond decret eft general & étend les mêmes peines à tous ceux qui prendront un chanoine de quelqu'une des églifes cathedrales de la province de Reims, & le troifiéme les étend jufques aux chanoines des collegiales. Tous trois font datez du lundi avant la S. André,c'est-à-dire,du vingt-huitiéme de Novembre 1239.

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Cette année le roi d'Angleterre Henri irrité de n'avoir pû faire élire Guillaume de Savoïe pour l'évêché de Vincheftre, fit caffer en cour de Rome les deux élections de Simon prieur de la cathedrale de Norvic pour évêque de la même église & de Raoul de Neuville évêque de Chichestre pour celle de Vincheftre. Le roi obtint ces caffations par Simon le Normand un de fes legiftes, dont il avoit une grande troupe, dit Matthieu Paris, comme une meute de chiens, pour les découpler fur les électeurs des prélats. Il avoit chargé le même Simon de demander au pape un ordre pour le legat Otton de demeurer encore en Angleterre, nonobstant la permiffion de retourner à Rome qu'il avoit demandée & obtenuë; mais le roi ne croïoit pas pouvoir vivre fans lui, & fauta de joïe quand il le vit demeurer fuivant le nouvel ordre du pape. Au contraire la nobleffe fut indignée de cette conduite du roi.

Cependant Guillaume Rele fut élû évêque de Coventri par les moines, qui croïoient que fon élection feroit agréable au Roi ; & peu après étant auffi élû par les moines de Norvic, il préfera ce fiege à l'autre, trop voifin des Gaulois encore indomptables. Il fut donc facré évêque de Norvic la même année 1239.

par

S. Edmond archevêque de Cantorberi dans l'égli̟- AN.1239. le de S. Paul de Londres, en prefence d'une grande multitude de prélats & de feigneurs.

D'un autre côté la prétention de Guillaume de Sa- Ag. Aur. val. voïe fur l'évêché de Vincheftre s'évanoüit fon c. 132 133. par élection à l'évêché de Liege, qui étoit demeuré vacant Alberic. p. 574. dès le fecond jour de Mai 1238. par le decés de Jean d'Eppe. On proceda à l'élection vers la S. Jean, & les voix furent divifées : une partie élut Otton prevôt de Maftrict, & l'autre élut Guillaume de Savoie élu de Valence frere de Thomas comte de Flandres. Ils allerent l'un & l'autre foûtenir leurs droits en cour de Rome; & l'élection étant examinée, le pape confirma celle de Guillaume en prefence de Conrad archevêque de Cologne fon metropolitain, mais malgré l'empereur Frideric qui protegeoit Otton. On difoit Math. Parif {que le pape vouloit donner à Guillaume le commandement de fon armée contre l'empereur, & il eft certain qu'il lui permit de garder l'administration de l'évêché de Valence. Guillaume demeura en Italie & fut facré évêque de Liege par le pape Gregoire.

413.

Cependant Conrad fils de l'empereur vint à Liege, & mit Otton contre les regles dans la chaire épifcopale; mais quand il voulut lui faire prêter ferment par les bourgeois, ils répondirent, qu'ils le feroient volontiers à l'évêque que l'églife auroit receu canoniquement. Pendant ce fchifme qui dura près d'un année les troupes des deux partis pilloient l'évêché de Liege impunément. Enfin on apprit que Guillaume Matth. Paris. t de Savoie étoit mort à Viterbe le jour de la Touf-› faints 1239. & avoit été enterré à Hautecombe abbaïe de Cifteaux en Savoie. Le pape en fut fort affli

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463.

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