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AN. 1241.

XLVI.

Les prélats font pris fur

mer.

Matth. Parif..

499.

les Romains en haine du pape. L'empereur au mois d'Avril fuivant prit Benevent fur l'églife Romaine, & le dimanche quatorziéme du même mois il prit Faïence dans la Romagne après un long fiege; & enfuite il se disposoit à attaquer Boulogne.

Cependant plufieurs prélats étoient assemblez à Genes, afin de s'y embarquer & fe rendre par mer Rome pour le concile. Il y avoit trois legats. Jacques cardinal évêque de Palestrine qui venoit d'être legat en France, Otton cardinal diacre qui l'avoit été en Angleterre, & Gregoire de Romagne foûdiacre de l'églife Romaine & chapellain du pape, qui l'avoit envoïé à Genes pour prendre foin de l'embarquement. Les deux premiers avoient amené les prélats de France & d'Ângleterre, & il en étoit aufli venu plufieurs d'Espagne. Ils avoient fait leur traité avec les Genois, qui moïennant une fomme d'argent les devoient rendre à Rome avec leur fuite en toute feureté; & le pape de fon côté avoit promis de leur envoïer par mer de fi grandes forces, qu'ils n'auroient rien à craindre de l'empereur excommunić & aban

donné de Dieu.

L'empereur l'aïant appris envoïa des ambassadeurs aux prélats affemblez à Genes, les prier de ne point s'embarquer mais de paffer fur fes terres : leur promettant une cntiere feureté en telle forme qu'ils la demanderoient. Je defire, ajoutoit-il, de vous expliquer mes raifons de vive voix ; & quand je vous aurai pleinement inftruits de la justice de ma cause, je la foûmettrai abfolument au jugement du concile. Il ajoûtoit de grandes plaintes contre le pape, qui le pourfuivoit fans relâche & le décrioit par tout, le

chargeant fans preuves de crimes énormes ; &
de crimes énormes; & à qui AN. 1241.

AN.1241.

il feroit dangereux de commettre le jugement de fa
cause, puifqu'il étoit fon ennemi déclaré. Les prélats p. 500.
encouragez par les promeffes des legats & du pape
ne furent point touchez de celles de l'empereur, &
ne crurent point s'y devoir fier. Ils s'embarquerent
donc fur la flote des Genois, qui témoignoient une
grande confiance en leurs forces & un grand mépris
pour les ennemis.

1035.

epift.c.

L'empereur de fon côté avoit affemblé une grande flote de fon roïaume de Sicile, dont il avoit donné le commandement à fon fils Hents; & les Pifans qui tenoient fon parti y avoient joint la leur. Les deux armées navales fe rencontrerent le vendredi troifié. Ric. S. Germ. p. me de Mai jour de l'invention de fainte Croix; & après un rude combat les Genois furent battus & les prélats pris pour la plupart. L'empereur Frideric donna part de cette victoire au roi d'Angleterre fon beaufrere & à d'autres princes par une lettre où il dit: Le Petr. de Vin. x. feigneur qui voit d'en haut & juge avec justice a li-Mh. Parif. vré entre nos mains les trois legats avec plufieurs archevêques, évêques, abbez & autres prélats, outre les députez des autres que l'on eftime être au nombre de plus de cent : & les ambaffadeurs des villes rebelles de Lombardie. Il ajoûte dans une autre lettre que cet heureux fuccés lui a fait perdre le deffein d'attaquer Boulogne, pour marcher vers Rome où la fortune l'appelle. Les prifonniers furent menez d'abord à Pife, puis de là par mer à Naples.

Les prélats qui s'étoient fauvez écrivirent au pape une lettre,qui porte les noms de Jean archevêque d'Arles,Pierre de Tarragone, des évêques d'Aftorg a, d'O

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P. Vin. ép. 8.

4. Rain. 11 58.

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AN. 1241. renze,de Salamanque, de Porto & de Placentia en Espagne. Nous allions, difent-ils,trouver vôtre fainteté avec les archevêques de Roüen,de Bourdeaux, d'Auch & de Besançon : les évêques de Carcaffonne, d'Agde, de Nifmes, de Tortone, d'Afte & de Pavie; & Romieu envoïć du comte de Provence. Il s'est sauvé comme nous, & l'archevêque de Compostelle qui étoit demeuré à porto Véneré, l'archevêque de Brague, l'évêque du Pui & quelque peu de députez les autres ont été pris. Nous vous prions donc de proceder contre le tyran felon l'énormité de fon crime; vû que l'église ne fera jamais en paix fous fon regne, & qu'il eft à craindre craindre que tous les princes ne fuivent fon exemple. La lettre eft dattée de Genes le dixiéme de Mai,

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:

Les Prélats prifonniers eurent beaucoup à souffrir. Ils furent long-tems fur mer, enchaînez & entaffez Matth. Parif. dans les galeres; incommodez de la chaleur & des mouches piquantes: fouffrant la faim & la soif: expofez aux reproches & aux injures des foldats & des matelots. La prison leur parut un repos ; & toutefois les plus délicats y tomberent malades, & quelquesuns y moururent. Le plus maltraité de tous fut l'évêque de Palestrine, qui étoit le plus odieux à l'empereur, Au mois de Juillet ils furent transferez à Salerne, Le pape leur écrivit des lettres de confolation xv. ep. 35 109. où il marque entre les prifoniers, les abbez de Clugni, de Cifteaux & de Clairvaux. Il fe plaint du

Ric. S. Germ.

ap. Rain. n. 69. 72.

peu

de précaution de Robert de Romagne fon legat, qui auroit pû affembler un plus grand nombre de galeres. Il exhorte les prifoniers à la patience, par l'exemple des anciens martyrs; mais en même

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tems il promet de ne rien omettre pour les délivrer par force, & reparer l'affront qu'il a reçû.

AN. 1241.

XLVII. S. Louis demande leur li

to.

Nang. Geft.

Le roi S. Louis fachant la prise des prélats François, envoïa à l'empereur Frideric l'abbé de Corbie & Gervais feigneur des Efcrins : avec une lettre où il berté. le prioit de délivrer ces prélats. L'empereur répondit en renouvellant fes plaintes contre le pape Gre- Duchefne p. 336. goire, qui avoit emploïé contre lui l'un & l'autre glaive, & enfin avoit convoqué un concile pour le Petr. de Vin. 1. condamner. Mais Dieu, ajoûte-t-il, voyant fon mau- epift. 13. vais dessein a livré ces prélats entre nos mains, & nous les retenons tous comme nos ennemis. Ne vous étonnez donc pas fi nous gardons étroitement les prélats François, qui nous vouloient mettre à l'étroit. S. Louis repliqua, reprefentant l'union qui avoit toûjours été entre la France & l'empire. C'est vous, ajoûte-t-il, qui avez rompu cette union en faifant bid, ep.120 prendre les prélats de nôtre roïaume, lorsqu'ils alloient vers le S. fiege, comme ils y étoient obligez par ferment & par obéiffance, ne pouvant refifter à ses ordres. On voit ici qu'on croïoit alors en France, comme par tout ailleurs, que les évêques mandez par le pape ne pouvoient fe difpenfer de l'aller trouver. La lettre continuë: Nous avons appris par leurs lettres qu'ils n'avoient aucun deffein de vous nuire, quand même le pape auroit voulu faire quelque chofe contre les regles. C'eft pourquoi vous devez les mettre en liberté. Penfez-y ferieufement: car le roïaume de France n'eft pas tellement affoibli, qu'il fouffrît davantage vos coups d'éperon. Cette lettre eut fon effet, & l'empereur délivra quoique malgré lui tous les François.

AN. 1241.

1036.

Il continuoit cependant fes conquêtes en Italie : faisant le dégât autour des villes qui ne vouloient Rie. S. Germ. t. pas le recevoir. De Faïence il vint à Fano, puis à Spolete, qui fe rendit, puis à Aflife; & pour fournir aux frais de la guerre il fit affembler à Melfe au mois de Juin les prélats de fon royaume en Italie, & les obligea de donner à titre de prêt les tréfors de leurs églifes: c'est-à-dire l'argenterie, les ornemens de foye & les pierreries, ce qu'il continua pendant les deux mois fuivans, & fit amaffer toutes ces richesses dans la ville de S. Germain près du Mont Caffin. On prit entre autres la table d'or, qui étoit dans ce monaftere devant l'autel de S. Benoît, & la table d'argent de l'autel de la fainte Vierge. Mais les églises racheterent pour de l'argent une partie de leurs trefors.

XLVIII. Defolation de

les Tartares.

Ibid.

Haite c. 22.
G. Nang.

par

Au même mois de Juin 1241. l'empereur Frideric la Hongrie par reçût nouvelle que les Tartares pouffant toûjours leurs conquêtes avoient vaincu le roi de Hongrie, & étoient aux portes de l'Allemagne. Le roi de Hongrie lui-même lui envoïa l'évêque de Vacia chargé de lettres, par lefquelles il offroit de se soûmettre à lui Abulfar.p.310. avec fon royaume, pourvû qu'il le défendit contre les Tartares. Ils étoient commandez Bathou ou Left* p. 34°. Baïdo petit-fils de Ginguifcan, qui s'avança vers l'Occident & le Septentrion, tandis qu'Ogtaï fon oncle faifoit la guerre à l'Orient, où il conquit le Roger Deftruct. roïaume de la Chine. Bathou attaqua les Ruffes, les Bulgares, & les Sclaves. Il défit auffi Cuthen roi des Comains, qui envoïa à Bela roi de Hongrie demander retraite pour lui & pour La famille, promettant de fe rendre fon fujet & d'embrasser la religion Chré

besta

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tienne.

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