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Sur. liv.

de contribuer magnifiquement au remboursement de AN. 1245. ces dépenfes, & d'y faire contribuer à proportion par 1. Juillet. tous les païs Chrétiens. Le dernier article est pour le fecours de la terre fainte. Le pape ordonne à tous les croifez de fe préparer pour fe rendre dans le tems qui leur fera marqué de fa part aux lieux convenables. Le reste du decret est repeté mot pour mot de celui du 2+, concile de Latran en 1215. Quelques-uns fe recrierent LXXVII. n. 6. en presence même du pape fur les contributions pour 595. le fecours de CP. & de la terre fainte, en ce qu'elles devoient être remises entre les mains de ceux qui feroient commis par le pape. Car on s'étoit fouvent plaint que la cour de Rome avoit détourné ces contributions.

Matth. Parif..

Après la lecture de ces decrets le pape dit qu'il avoit Conc. 604. fait faire des copies de tous les privileges accordez à l'église Romaine par les empereurs, les rois & les autres princes; & qu'il y avoit fait mettre les feaux de tous les prelats qui étoient prefens, voulant que ces copies euffent la même autorité que les originaux. Alors fe leverent les envoïez du roi d'Angleterre, pour empêcher l'autorisation de quelques feffions faites à l'église Romaine, foûtenant que les seigneurs n'y avoient point confenti. C'étoit apparemment la donation du roi Jean. Ces envoïez fe plaignirent auffi des exactions de la cour de Rome, & firent lire une lettre adreffée au pape au nom de tout le roïaume .co. d'Angleterre, qui contenoit en substance:

Nous avons accordé depuis long-tems à l'églife Romaine nôtre mere un fubfide honnête, nommé le denier S. Pierre ; mais elle ne s'en eft pas contentée, & nous a demandé dans la fuite, tant par fes legats,

XXVIII. Remontrance des Anglois.

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que

que par fes nonces d'autres fecours, qui lui ont été li-
beralement accordez. Vous n'ignorez pas aufli
nos ancêtres ont fondé des monafteres qu'ils ont ri-
chement dotez; & leur ont même donné le patronage
de quelques églifes paroiffiales. Mais vos predecef-
feurs voulant enrichir les Italiens dont le nombre eft
devenu exceffif, leur ont donné ces cures, dont ils ne
prennent aucun foin, ni pour la conduite des ames,
ni pour la défense des monafteres dont elles dépen-
dent. Ils ne s'acquittent ni de l'hofpitalité, ni des au-
mônes,ne songent qu'à prendre les revenus & les em-
porter hors du roïaume, au préjudice de nos freres &
de nos parens, qui devroient poffeder ces benefices &
les defferviroient en perfone. Or pour dire la verité
ces Italiens tirent de l'Angleterre tous les ans plus de
foixante mille marcs d'argent, qui eft plus qu'il n'en
revient au roi même.

Nous efperions à vôtre promotion que vous refor-
meriez cet abus, mais au contraire nos charges font
augmentées. Le docteur Martin eft entré depuis peu
dans le roïaume fans la permiffion du roi, avec plus
de pouvoir que n'en eut jamais aucun legat, quoi-
qu'il n'en prenne point le titre. Il a conferé à des Ita-
liens des benefices vacans de plus de trente marcs de
revenu; & à leur mort il en a lubftitué d'autres à l'in-
fçû des patrons, qui fe trouvent ainfi fruftrez de leurs
nominations. Il veut encore disposer d'autres benefi –
ces femblables, en les refervant à la collation du S.
Liege quand ils viendront à vaquer : il extorque des
religieux des taxes exceffives, & jette des excommu-
nications & des interdits fur ceux qui s'opposent à fes
entreprises. Nous ne pouvons croire qu'il agisse ainfi

par

17. Juillet.

par votre ordre, & nous vous prions d'y remedier AN. 1245promptement; autrement nous ne pourrions fouffrir plus long-tems de telles vexations. Après la lecture de pag.665. cette lettre on garda un grand filence; & le pape,quelque inftance fiffent les envoïez d'Angleterre, ne répondit autre chofe, finon qu'une affaire de cette importance demandoit une meure déliberation.

que

Sentence contre

Alors Thadée de Sueffe vit bien que le pape alloit XXIX. prononcer contre l'empereur fon maître. Il fe leva Federic donc & demanda l'autorisation de plufieurs privileges; l. 640. puis il declara que fi le pape vouloit proceder contre l'empereur, il en appelloit au pape futur & à un concile general. Le pape lui répondit doucement:Ce concile eft general, puifque tous les princes y ont été invitez tant feculiers qu'ecclefiaftiques; mais l'empereur n'a pas permis à ceux qui font fous fon obéïssance de s'y trouver; c'eft pourquoi je n'admets point votre appel. Puis il commença à raconter combien avant que d'être pape il avoit aimé Frideric, & combien il avoit eu d'indulgence pour lui, même depuis la convocation du concile, en parlant toûjours de lui avec honneur; en forte que quelques-uns avoient peine à croire qu'on dût porter quelque jugement contre lui. Enfuite le pape prononça de vive voix la sentence de dépofition contre Frideric, & la fit de plus lire dans le concile; elle contenoit en substance ce qui fuit.

apoftol. 2. de

fent. &c. in

fexto.

Le pape Innocent y rapportoit d'abord les démar- Ibid. & Al ches qu'il avoit faites dés le commencement de fon pontificat, pour traiter de la paix avec Frideric par Pierre de Colmieu, Guillaume de Modene & l'abbé de S. Fagon; & les promeffes de l'empereur jurées en fon nom le jeudi faint de l'année precedente 1244. Tome XVII,

Tt

AN. 1245. 17. Juillet.

P. 641. E. v. Duchefne * 5. p. 343.

XXIX. n.

Conc. p. 644.

ss.

les

dont il n'avoit rien tenu. C'eft pourquoi, continuë le pape, ne pouvant plus fans nous rendre nous-mêmes Coupables tolerer fes iniquitez, nous fommes pressez par le devoir de notre conscience de le punir. Il reduit enfuite les crimes de Frideric à quatre principaux, qu'il foûtient être de notorieté publique : parjure, faSup. liv. crilege, herefie, & felonie. Il prouve le parjure par contraventions à la paix faite avec l'église, c'est-à-dire avec le pape Gregoire IX. en 1230. & plufieurs autres fermens violés. Le facrilege par la prife des legats & des autres prelats, qui alloient au concile fur les galeres de Genes. L'herefie par le mépris des cenfures nonobftant lesquelles il a fait celebrer l'office divin: par fa liaison avec les Sarrafins, fon alliance avec l'empereur Vatace schismatique, à qui il a donné fa fille, & d'autres conjectures, qui fondent un soupçon vehement. La felonie eft prouvée par la vexation des sujets du roïaume de Sicile fief de l'église Romaine, la guerre contre l'église même & la ceffation du païement du tribut pendant neuf ans.

.. 645.

Sur tous ces excés, continue le pape, & plufieurs autres, après avoir déliberé foigneufement avec nos freres & avec le concile, en vertu du pouvoir de lier & délier que J. C. nous a donné en la perfonne de faint Pierre, nous dénonçons le prince fufdit, privé de tout honneur & dignité, dont il s'eft rendu indigne par fes crimes, & l'en privons par cette fentence, abfolvant pour toûjours de leur ferment tous ceux qui lui ont juré fidelité, défendant fermement que perfonne déformais lui obéiffe comme empereur ou comme roi, ni le regarde comme tel; & voulant que quiconque à l'avenir lui donnera aide ou confeil en cette qualité,

foit excommunié par le feul fait. Au reste ceux que regarde l'élection de l'empereur lui éliront librement AN. 1245. un fucceffeur dans l'empire; & quant au roïaume de 17. Juillet. Sicile, nous y pourvoïerons avec le confeil de nos fre

res ainfi que nous jugerons à propos. Donné à Lion le feiziéme des calendes d'Août la troifiéme année de notre pontificat ; c'est-à-dire le dix-septiéme de Juillet 1245.

Aprés la lecture de cette fentence le pape fe leva & p. 640entonna le Te Deum, & quand il fut chanté le concile se separa. Pendant cette lecture le pape & les prelats p. 665. tenoient des cierges allumez, & tous les affiftans étoient faifis de crainte, comme fi c'eût été un coup de foudre accompagné d'éclairs. Les envoïez de l'empereur frapoient leur poitrine en gemissant amerement. Thadée dit ces paroles de l'écriture: C'eft ici Sophon. 1. 15. un jour de colere, de calamité & de mifere, & ils fe retirerent chargez de confufion. Il faut toutefois obferver que dans le titre de la fentence le pape dit feulement qu'il a prononcé en presence du concile, mais non pas avec fon approbation, comme dans les autres decrets. D'ailleurs le pape pretendoit avoir un droit particulier fur l'empire d'Allemagne, depuis Otton premier, & nous avons vu comme Gregoire VII. & fes fucceffeurs avoient foûtenu cette pretention. Quant au roïaume de Sicile, il eft certain que c'étoit un fief mouvant de l'église Romaine. Ainfi la dépofition de Frideric II. ne doit point être tirée à confequence contre les autres fouverains : outre que la puiffance ecclefiaftique en general ne s'étend point fur les chofes temporelles, comme je l'ai montré ailleurs. Le pape aïant declaré l'empire vacant, declara aussi

Sup. liv. Lvc.

1. LXIII.

n. II.

3. Discours:

n. 11.

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