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avec lui avant le jour. Quand il fit clair chacun fut agreablement furpris de voir la croix fur l'épaule de fon voifin, puis fur la fienne; & ils ne crurent pas devoir fe défendre de la croisade où le roi les avoit engagez par cet innocent artifice.

Cependant le pape comptant l'empire pour vacant, preffoit les princes d'Allemagne d'élire un roi des Romains, & propofoient particulierement Henri Lantgrave de Turinge frere de Louis mort en 1227. Quelquesuns des électeurs en étoient d'accord, principalement Conrad archevêque de Cologne; mais le Lantgrave avoit peine à s'y refoudre, aimant mieux jouir paifiblement de fon petit état, que de s'expofer aux perils de la guerre, fur tout contre Frideric exercé à la conduite des armées & artificieux. Le pape en écrivit aux électeurs le vingt-uniéme d'Avril 1246. les exhortant à élire le Lantgrave, & leur promettant en ce cas de s'appliquer fans relâche à procurer le bon fuccés de leurs affaires. En même tems il écrivit ou roi de Bohe-. me Venceslas IV. aux ducs de Baviere, de Brabant, de Brunfvic & de Saxe, qui ne vouloient point faire d'élection, pretendant que c'étoit le moïen de rétablir la paix dans l'églife & dans l'état.

Rain, n.. 6. 7. Il envoïa legat en Allemagne Philippe Fontaine, élû évêque de Ferrare, homme habile & courageux à qui il donna une grande autorité, même de contraindre par peines temporelles les feigneurs laïques qui refuferoient d'obéir au roi qui feroit élû. Le pape écrivit auffi le vingt-deuxième d'Avril aux freres Prefcheurs & aux freres Mineurs, dont la reputation & l'autorité étoit grande parmi le peuple, de prendre le parti du nouveau roi, & d'attirer les Allemans à fon

obéïffance fi-tôt qu'il feroit élû par leurs exhortations publiques & particulieres avec promeffe d'indulgen- AN. 1246.

ces.

Alb. Stad. an.

Par.p.616.

Enfin le Lantgrave fut élû roi des Romains par les archevêques de Maïence & de Cologne & quelques feigneurs laïques : l'élection fe fit prés Virsbourg le jour 1246. Siffrid. de l'Ascension dix-feptiéme de Mai 1246. Auffi-tôt eod. Matth. l'archevêque de Maïence prêcha folemnellement la croifade contre tous les infideles, entre lefquels on comptoit Frideric, & tous les princes & les nobles de cette affemblée se croiferent. Le même prélat écrivit au pape la nouvelle de cette élection; & le pape dans fa réponse datée du neuviéme Juin lui en témoigna sa Rain. 1246joie, l'exhortant à encourager le nouveau roi à pourfuivre vigoureusement fon entreprise & les princes d'Allemagne à le foûtenir; & promettant de sa part toute forte de fecours. En effet il envoïa à Henri de grandes sommes d'argent, dont Frideric étant averti, fit garder les paffages, pour détourner ce fecours à fon profit. Ceux de fon parti nommoient Henri le roi des prêtres. Le pape ordonna auffi de publier de nouveau l'excommunication de Frideric, & de mettre en inter-dit les terres de ceux qui lui obéïroient.

n. s. 6..

XXXVII. Confpiration contre Frideric..

Le pape n'agiffoit pas moins en Sicile dés devant l'élection du roi Henri. Il y envoïa des cardinaux en qualité de legats, favoir Etienne prêtre du titre de fainte Marie Traftéveré & Rainier diacre du titre de fainte Marie en Cofmedin; & écrivit une lettre à tous les prelats, les nobles & le peuple de ce roïaume, où il 111. ep. 8. ap.. les declare abfolument libres de la fervitude de Frideric, qu'il nomme un nouveau Neron, & qu'il dit avoir été déposé avec l'approbation du concile, quoique la

Rain.n. 11.

AN. 1246.

Petr. Vin. II.

ep.
rif. p. 622.

10. M. Pa.

Rain. n. 14.

fentence feulement : Le concile prefent com-
porte
me je l'ai observé. Il les exhorte & leur enjoint pour la
remiffion de leurs pechez, de rejetter l'obéïffance de
cet homme condamné; & de revenir fincerement à
celle de l'église Romaine, dont il font les enfans d'u-
ne maniere particuliere, pour jouir d'une liberté en-
tiere & d'une heureufe tranquillité. La lettre est du
vingt-fixiéme d'Avril 1246.

Mais dés auparavant il y avoit eu dans ce royaume une confpiration contre Frideric, comme on voit par la lettre qu'il en écrivit aux rois & aux princes, où il dit: Quelques-uns de nos ferviteurs avoient coujuré nôtre mort, fçavoir Thebalde, Francifque, Jacques de Morra, Pandolfes de Fafanelles, Guillaume de S.Severin & d'autres,mais quelques-uns des complices nous ont découvert la confpiration ; & comme nous cherchions à en approfondir la verité, Pandolfe & Jacques qui étoient auprés de nous fe font abfentez : Thebalde & Guillaume fe trouvant dans le royaume, où ils attendoient la nouvelle de nôtre mort, fe font emparez par surprise de deux de nos châteaux Capaccio & la Scale. Il ajoûte enfuite que la Scale a été reprise, & que les conjurez ne peuvent échaper de fes mains. Il marque les ordres qu'il a donnez pour la fûreté de l'Italie, puis il dit: Nous cacherions volontiers l'auteur de cette conjuration, fi la voix publique & l'évidence ̧ des faits ne le découvroit. Car les coupables foit fugitifs, foit affiegez, font accompagnez de Freres Mineurs, qui les ont croifez; & montrant des lettres du pape, difent hautement qu'ils foûtiennent les interêts de l'églife Romaine. Les prifonniers trouvez dans la Scala ont parlé de même dans la confession

volontaire

XXXVIII. Lettre du Sultan

d'Egypte au pa

ap. Rain. n. 52.

volontaire qu'ils ont faite publiquement étant prêts de mourir. L'évêque de Bamberg revenant de la cour AN. 1246. de Rome après fa confecration venale, mais avant qu'il fût pris en Allemagne par nos ferviteurs, dit auffi publiquement que dans peu nous ferions infailliblement tuez par nos domeftiques. Nous n'aurions jamais cru des évêques capables d'un tel deffein. Car jusqu'ici, Dieu le fait,nous n'avons jamais voulu consentir,même depuis le concile de Lion, à procurer la mort du pape ni d'aucun des cardinaux, quoique quelques-uns de nos zelez ferviteurs nous en aïent fouvent prié : nous fommes contens de nous défendre fans nous venger. La lettre eft dattée de Salerne le vingt-cinquième d'Avril. Le pape Innocent écrivit aufli à Melic-Saleh Sultan d'Egypte, pour lui perfuader de renoncer à l'alliance qu'il avoit avec Frideric: fur quoi le Sultan pe lui répondit: Nous avons receu vos lettres & écouté vo- Matth. Parif tre envoié. Il nous a parlé de J. C. que nous connoiffons mieux que vous, & que nous honorons plus que vous ne faites. Quant à ce que vous dites que vous defirez procurer la paix entre tous les peuples, nous ne le fouhaitons pas moins de notre côté; mais vous favez qu'entre nous & l'empereur il y a une alliance & une amitié reciproque dés le tems du Sultan notre pere, que Dieu mette en fa gloire. C'est pourquoi il ne nous eft pas permis de faire aucun traité avec les Chrétiens, fans le confentement de ce prince; & nous avons écrit à l'envoïé que nous avons à sa cour, lui envoïant les propofitions que le votre nous a faites. Il ira vous trouver & conferera avec vous; & nous agirons conformément à la réponse que nous recevrons de lui, fans nous éloigner de ce qui fera Tome XVII. Xx

p. 521.

Albert. Stad

fol. 618.

de l'utilité publique, en forte que nous puiffions en AN. 1245. avoir du merite devant Dieu. Telle eft la lettre du Sultan dattée du feptiéme jour du mois Arabe Mohar

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ram,

,qui cette année 1246. répondoit au mois d'Août. Cependant Frideric fe voulut purger du foupçon d'herefie, le motif le plus odieux de fa condamnation. Pour cet effet il fe fit examiner par l'archevêque de Pa→ lerme, l'évêque de Pavie, les abbez du Mont-Caffin, de Cave & de Cafeneuve, & deux freres Prêcheurs nommez Roland & Nicolas, qui l'interrogerent fur les articles du fymbole & les autres points de la foi catholique. Il declara & jura qu'il les croioit fermement; & conftitua les examinateurs fes procureurs, pour faire en fon nom le même ferment, & offrir en prefence du pape de fe purger en lieu convenable du foupçon d'herefie. De quoi fut dreffé un acte public par un fcriniaire du diocefe de Luques, & Frideric y joignit fes lettres fcellées en or. Il envoïa les sept examinateurs à Lion munis de ces pieces; mais le pape refufa d'abord de leur donner audiance,difant qu'ils étoient prefumez excommuniez, comme fauteurs de Frideric, puifqu'ils étoient envoïez de fa part, & porteurs de lettres où il étoit fauffement qualifié roi & empereur. Ils declarerent qu'ils ne pretendoient point foûtenir ces qualitez, mais fe dire envoïez de Frideric comme fimple Chrétien; & après cette declaration le pape leur donna pour commiffaires trois crrdinaux, les évêques de Porto & d'Albane, & Hugues de S. Cher prê tre du titre de fainte Sabine.

Les envoïez de Frideric leur montrerent les pieces dont ils étoient chargez, & offrirent de vive voix de faire en fon nom le ferment pour fa juftification. Mais

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