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me tributaire de l'églife Romaine par la bonne condui- AN. 1246. te d'un homme fage, il ordonne à tous les Portugais de recevoir le comte de Boulogne dans toutes les villes, châteaux & autres places du royaume où il se prefentera; d'obéir en tout à fes ordres, lui donner fecours contre tous ceux qui lui voudront refifter; & lui remettre tous les revenus du royaume, fous peine d'y être contraints par cenfures ecclefiaftiques, fuivant le pouvoir qu'il en donne à l'archevêque de Brague & à l'évêque de Conimbre. En quoi, ajoûte le pape, nous ne pretendons point ôter le royaume au roi, ou à fon fils legitime, s'il lui en vient, mais feulement pourvoir à fa confervation & à celle du royaume pendant fa vie. La bulle eft du vingt-quatriéme de Juillet

1245.

Il en arriva ce qu'on en devoit attendre naturelle-ment, c'est-à-dire, une guerre civile. Quelque méprifé que fût le roi Sanche, il ne laiffa pas de trouver quel-ques feigneurs qui lui furent fideles; & Alfonfe ne put reduire à fon obéiffance plufieurs villes que par la force. Enfin il demeura maître du Portugal, & Sanche fut reduit à se refugier à Tolede prés de Ferdinand roi de Caftille.

Or entre les places que foûmit Alfonfe comte de Boulogne, il y en avoit que le roi Sanche avoit données à Alfonfe fils du roi Ferdinand; & ce fut le fujet de fa plainte au pape, qui lui répondit: Vous devez favoir qu'encore que le comte de Boulogne ait été commis à la garde du roïaume, pour en faire ceffer les abus intolerables qui s'y commettoient, il n'a pas été de notre intention de déroger en rien au droit, ou à la dignité du roi, s'il vient en état de gouverner

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AN. 1246. par lui-même. C'eft pourquoi nous écrivons au comte, s'il vous a fait quelque tort, ou fi à l'égard du roi il a excedé les bornes que nous lui avons prefcrites, de le reparer inceffamment. La lettre eft du vingt-cinquiéme de Juin 1246. Toutefois le roi Sanche mourut dépouillé & exilé, & Alfonfe garda le royaume, &

XLV. Plaintes des

le pape.

Matth. Paris,

P. 609. 611.

art. 1. 6.

regna trente-trois ans.

En Angleterre le roi Henri tint un parlement à Anglois contre Londres le dimanche de la mi-Carême, qui cette année 1246. fut le dix-huitiéme de Mars. Le roi y reprefenta aux prelats & aux feigneurs, qu'il avoit envoyé des ambaffadeurs au concile de Lion, qui lui avoient raporté plufieurs lettres du pape, portant moderation des entreprises de la cour de Rome, & plufieurs belles promesses, au prejudice defquelles le pape continuoit & augmentoit l'oppreffion de l'église d'Angleterre, fur quoi il leur propofa fes griefs redigez en fept articles contenant ce qui fuit: Le pape non content du denier faint Pierre, exige de tout le clergé d'Angleterre une groffe contribution, & fait affeoir & lever des tailles generales, fans le confentement du roi. Il ne permet point aux patrons de prefenter aux églifes vacantes, mais il les confere à des Romains,qui n'entendent point la langue du pays, & qui emportent l'argent hors du royaume. Dans les benefices poffedez par ces Italiens, on neglige le foin des ames, 4. le fervice divin, la predication, l'hofpitalité & l'af 3. fiftance des pauvres, l'ornement & la reparation des bâtimens qui tombent en ruine : un Italien fuccede à un autre Italien dans un même benefice, & les Anglois font tirez hors du royaume pour plaider. Le pape exige des penfions & excede le nombre des provi

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S.

fions aufquelles il s'étoit restraint. Il use trop frequemment de la clause, Nonobftant, qui anéantit les fermens, les coutumes, les contracts, les ftatuts, les privileges & toutes fortes de droits.

AN. 1246

Sur cette propofition du roi le parlement d'Angleterre refolut, que pour le respect du S. fiege on envoïeroit encore une ambaffade au pape avec cinq lettres : la premiere des évêques fuffragans de la province de Cantorberi, la feconde des abbez & des moines des provinces de Cantorberi & d'Yorc, c'eft-àdire de l'Angleterre entiere, la troifiéme des feigneurs, des nobles, de tout le clergé & le peuple : les deux autres lettres étoient du roi Henri, l'une adreffée au pape, l'autre aux cardinaux, cette derniere dattée du vingt-huitiéme de Mars. Elles commençoient toutes par de grandes démonftrations de refpect: puis on reprefentoit l'indignation des Anglois contre les abus dont on s'étoit plaint dans le parlement, & la neceffi té d'y apporter un promt remede, autrement qu'il arriveroit un grand scandale,la division entre le roïau-me & le facerdoce, le foulevement contre le roi comme obligé à proteger fes fujets, & même contre l'églife Romaine. Ces lettres furent envoyées par le doc- Matth. Parif. teur Guillaume de Poüic jurifconfulte, & par Henri de P. 617. la Mare chevalier, qui partirent le lendemain de Pâques neuviéme d'Avril.

Cependant les agens que le roi Henri avoit déja en cour de Rome, obtinrent une moderation des provifions de benefices en faveur des Italiens; favoir que fi le pape ou les cardinaux vouloient en avoir pour quelqu'un de leurs neveux, ils priroient instamment le roi de le trouver bon. Le pape accorda auffi à ce

111. ep.417. ap.

A. 39.

prince une bulle par laquelle il ordonne aux prelats, & AN. 1246. aux feigneurs à qui il avoit donné des terres, des châRain. an.1246, teaux, des franchises & d'autres droits, de les lui rendre, quoique ces donations fuffent confirmées par ferment: attendu que ce ferment étoit contraire à celui qu'il avoit auparavant fait à fon facre, de conferver en leur entier les droits de fa couronne. La bulle eft du vingt-fixiéme de Mars 1246.

.618.

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Mais d'ailleurs le pape étant informé, que depuis quelque tems il étoit mort en Angleterre quelques Matth. Parif. ecclefiaftiques tres-riches, fans avoir difpofé de leurs biens, fit publier en ce royaume un decret, portant que les fucceffions des clercs decedez fans faire teftament, cederoient deformais à fon profit; & il chargea de l'exécution de ce decret des freres Prêcheurs & des freres Mineurs. Ce que le roi d'Angleterre ayant appris, il detesta l'avarice de la cour de Rome, & empêcha l'exécution du decret, comme prejudiciable à lui & à fon royaume. Il défendit auffi qu'on levât au profit du pape le taillage impofé fur le clergé d'Angleterre,jufques au retour des ambaffadeurs qu'il envoioit pag.619. en cour de Rome. Cette oppofition du roi & du pape inquietoitles Anglois, & plufieurs craignant la legêreté du roi, fe rangeoient du côté du pape, quoiqu'ils n'euffent jamais vû que ces levées de deniers euffent été avantageufes à l'églife. Ainfi parle Mathieu

P. 921.

Paris.

Le

pape envoïa enfuite une commiffion au provin cial des freres Mineurs en Angleterre, par laquelle il lui ordonnoit d'établir des freres tant de fon ordre que de celui des Prêcheurs, pour informer contre les ufuriers, & leur faire reftituer l'argent mal acquis,

qui

qui feroit employé au fecours de l'empire de C. P. Ils avoient encore pouvoir d'abfoudre de leurs pechez ceux qui voudroient fe croifer pour cette entreprise, ou y contribuer de leurs biens: pouvoir de recueillir ce qui avoit été laiffé par teftament pour la restitution des biens mal acquis, ou qui feroit laiffé pendant trois ans: de même ce qui devoit être diftribué en œuvres pies, à la difcretion des executeurs teftamentaires, fans deftination certaine du teftateur, ou ce qui devoit être reftitué fans que l'on fçût à qui. Ces religieux devoient faire le recouvrement de tous ces deniers, pour être employez au fecours de Conftantinople.

AN. 1246.

XLVI. Plaintes contre

mandians.

p. 60%.

Les religieux mandians se rendoient odieux aux anciens moines & aux prêtres feculiers, en faifant trop les Religieux valoir les privileges des papes, qui ordonnoient aux évêques de les admettre à la predication & à l'adminiftration de la penitence. Ils exigeoient qu'on fit lire publiquement ces privileges dans les églises ; & demandoient à ceux qu'ils rencontroient, même à des religieux: Vous êtes-vous confessez? Oui, répondoit le particulier. A qui? A mon curé. C'eft un ignorant qui n'a jamais étudié en theologie ni en decret. Vénez à nous, qui favons diftinguer la lépre de la lépre, & qui avons receu les grands pouvoirs que vous p voyez. Ainfi plufieurs laïques, principalement les nobles & leurs femmes, méprifant leurs curez & leurs prelats, fe confeffoient aux freres Prêcheurs; & ce mépris étoit fort fenfible aux fuperieurs ordinaires. Les paroiffiens pechoient plus hardiment n'étant plus retenus par la crainte d'en rendre compte à leurs curez; & fe difoient l'un à l'autre : Prenons librement Tome XVII

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