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mes; & comme Jacob 'prêchoit avec fon impudence ordinaire, un boucher lui donna d'une coi- AN. 1251. gnée sur la tête, & le tua. Son corps demeura fans fepulture; & le bruit s'étant répandu que les Paftoureaux & leurs fauteurs étoient excommuniez, ils fe difperferent, & on commença par toutà les poursuivre & les affommer comme des chiens.

enragez.

Quelques-unes de leurs troupes s'étant presentées pour entrer à Bourdeaux, Simon comte de Leicestre, qui y commandoit pour le roi d'Angleterre, fit fermer les portes, & leur demanda de quelle autorité ils agiffoient. Ce n'eft, répondirentils, ni par l'autorité du pape, ni par celle des évêques, c'est par l'autorité de Dieu tout-puiffant, & de la Vierge fa mere. Retirez-vous au plûtôt, dit le comte, finon je vous poursuivrai avec toutes mes troupes, & les milices du pays. Il fe retirerent épouvantez de cette menace; & leur chef s'étant dérobé fecretement, fretta un vaiffeau pour retourner chez les Sarrafins, d'où il étoit venu ; mais les mariniers l'ayant reconnu pour un compagnon du Hongrois, le jetterent dans la Garonne pieds & mains liez. Ils trouverent dans fon bagage beaucoup d'argent, des poudres empoisonnées, & des lettres écrites en Arabe, par lefquelles il exhortoit le fultan à pourfuivre fon entreprise, & promettoit de lui amener un grand peuple.

Un troifiéme chef des Paftoureaux paffa en Angleterre, où il en raffembla en peu de tems plus de cinq cens; mais le bruit s'étant répandu qu'ils étoient excommuniez, & que les Hongrois Nnn iij

P. 712

AN. 1251.

XXX.

de S. Pierre de

Verone.

avoir été tué, ils furent fort décriez, ils s'éleverent eux-mêmes contre celui qui les avoit seduits, & le mirent en pieces. Plufieurs de ces Paftoureaux étant défabufez, se croiferent dans les regles par penitence, & passerent à la terre-sainte, au fervice du roi S. Louis. Ainfi finit cette feduction, la plus dangereuse au jugement des hommes fages, qui fut arrivée depuis le tems de Mahomet.

Le pape Innocent étoit toûjours à Genes, d'où Commencement il écrivit à Pierre de Verone, & à Vivien de Bergame, tous deux de l'ordre des freres Prêcheurs, ap. Rain. n. 33. une lettre qui porte en fubftance Dieu ayant délivré fon églife de la tyrannie de Frideric, jadis empereur, qui troubloit la paix en Italie particulierement, & favorifoit l'herefie: nous avons refolu d'y fortifier l'inquifition, avec d'autant plus de foin, que le mal eft plus prés de nous. C'eft pourquoi nous vous mandons de vous tranfporter à Cremone, & d'y travailler efficacement à l'extirpation de l'herefie, après avoir tenu un fynode diocefain. Ceux que vous en trouverez infectez ou diffamez, & qui ne fe foûmettront pas abfolument aux ordres de l'églife, vous procederez contre eux felon les canons, implorant, s'il eft neceffaire, le fecours du bras feculier. Si quelques-uns veulent abjurer l'herefie, vous leur donnerez l'abfolution, après avoir confulté l'évêque diocefain: prenant les précautions neceffaires pour vous affurer de la fincerité de leur converfion. Et parce que nous defirons fur toutes chofes le progrès de cette affaire, nous voulons que vous declariez haute

ment, que fi quelque ville ou communauté, quelque grands ou autres perfonnes puiffantes, y aportent quelque empêchement, nous employerons contre eux le glaive de l'églife, & appellerons les rois, les princes & les autres croifez pour les pourfuivre, puifqu'il eft plus important de défendre la foi auprès qu'au loin. La lettre eft du treize de Juin 1251.

Pierre à qui cette lettre eft adreffée, étoit né à Verone de parens heretiques, comme étoit prefque toute fa famille. Il nâquit vers l'an 1206. & à Fâge de fept ou huit ans, comme il revenoit de l'école, fon oncle qui étoit heretique lui demanda ce qu'il avoit apris. L'enfant répondit, qu'il y avoit apris le fymbole, qui porte que Dieu eft auteur des chofes vifibles comme des invifibles. Son oncle lui voulut faire dire que ce n'eft pas Dieu qui eft l'auteur des chofes vibfiles, car ces heretiques étoient des Manichéens: mais l'enfant demeura ferme à dire ce qu'il avoit lû. L'oncle rapporta ce qui s'étoit paffé à fon frere pere du petit Pierre, & lui voulut perfuader de le retirer de l'école. Car je crains, ajoûta-t-il, que quand il fera plus inftruit, il paffe à la prostituée l'églife Romaine, & ne détruise nôtre religion. Le pere ne laiffa pas de faire achever à Pierre l'étude de la grammaire, & quand il fut plus grand il l'envoya continuer fes études à Bologne. Là il refifta aux tentations contre la pureté qu'il conferva entiere, & entra dans l'ordre des freres Prêcheurs fous S. Dominique, & par confequent à l'âge de quinze ou feize ans.

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n. 4.7.

Boll. p. 693.

S'étant appliqué à l'etude il devint predicateur AN. 1251. celebre par toute la Lombardie, & combattit fortement les heretiques dont elle étoit infectée. p. 80. Ce qui porta le pape Gregoire IX. à lui donner la commiffion d'inquifiteur à Milan : envertu de la quelle le vendredi quinziéme de Septembre 1234. il ordonna de mettre entre les ftatuts, de la ville la Sup. liv. 1xxv11. constitution du pape contre les heretiques, conforme au decret du concile de Latran. Pierre de Verone prêcha auffi contre les heretiques à Florence, & avec tant de force qu'il engagea plufieurs nobles à prendre les armes pour les chaffer de la ville. Il leur donna un étendart marqué d'une croix, & dans un grand combat à la place de fainte Felicité fur la riviere d'Arne, les Catholiques emporterent la victoire & contraignirent les heretiques à fortir de la ville. Tel étoit Pierre de Verone quand pape Innocent IV. le fit inquifiteur, non feulement à Cremone, mais à Milan & dans tout le territoire.

XXXI.

Mon. Pad. p. 958

p. 712.

31.

le

De Genes le pape vint à Milan où il fut reçû Le pape à Milan. avec grand honneur & y demeura deux mois. Mais Matth.Par.p.707 avant que de partir de Genes le vingt - huitiéme de Juin il reconcilia à l'églife quelques feigneurs Epift. ap. Rain.n. qu'il avoit excommuniez le jeudi faint, entre autre Thomas de Savoye mari de fa niece, qui dans le dernier tems avoit fuivi le parti de l'empereur Frideric. Le pape le fit exhorter par l'archevêque de Vienne & par l'évêque de Grenoble à rentrer en fon devoir; & Thomas voyant Frideric mort se foûmit & rentra dans les bonnes graces du pape. Au fortir de Milan le pape traversa promptement

la

la Lombardie, évitant de s'enfermer dans les grandes villes, & s'arrêta à Perouse, où il paffa le refte de l'année.

AN. 1251.

S.

XXXII.

Joinv. p. 88.

Le roi faint Louis étoit cependant en Palestine, appliqué à faire executer par les émirs d'Egypte le s. Louisen PaOccupations de traité qu'ils avoient fait avec lui. Ils lui renvoyoient leftine. de tems en tems quelques prifonniers; mais il en Duch. p. 404. délivra grand nombre de fon argent, tantôt fix cens, tantôt fept cens à la fois ; enfin il retira tous les captifs qui avoient été faits en Egypte depuis vingt ans. Il fit reparer & fortifier les places que les p. 469.Chrétiens tenoient dans le pays; fçavoir, Acre, le p. 359. château de Hiffa ou Caïfa, Cefarée, Joppé & Sidon, le tout à fes dépens.

La veille de l'Annonciation vingt-quatrième de p. 456. Mars 1251. il alla en devotion à Nazareth. De fi loin qu'il apperçût ce faint lieu, il defcendit de cheval & se mit à genoux, puis il fitle refte du chemin à pied, quoiqu'il eût ce jour-là jeûné au pain & à l'eau, & beaucoup fatigué. Il y fit chanter folemnellement vêpres, matines & la messe, qui fut celebrée par le legat Eude de Châteauroux, & il y fit un pieux fermon. Le roi avoit toûjours des ornemens precieux de diverses couleurs, felon les folemnitez, & en prenoit un foin particulier. De Nazareth il alla le vingt-huitiéme de Mars à Cefarée où il demeura le refte de l'année 1251. & une partie de la fuivante, occupé principalement à la faire fortifier.

Sanut. p. 220.

Peu de tems après qu'il y fut arrivé, revinrent Joinv. p. 89. les freres Prêcheurs qu'il avoit envoyez én Tarta

rie deux ans auparavant, sçavoir, André de Long

Tome XVII.

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