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AN.1234.

21. lany.

10. XVI. Ij.

verité ? Pourquoi ? pour l'inftruction des fideles & la confufion des heretiques qui devoient nier cet article: car quiconque ne le croit pas eft en voïe de perdition. Nous prouvons cette verité par l'évangile, par les épîtres de S. Paul, par les écrits de vos peres : par les nôtres, fi vous les voulez recevoir comme S. Augustin, S. Gregoire, S. Jerôme, S. Ambroife, S. Hilaire & plufieurs autres.

A ces mots les Grecs demeurerent en filence comme tous étonnez, & l'empereur dit en Grec : Calôs : c'est-à-dire, Fort-bien. Et après avoir long-tems confulté avec les favans,il dit aux nonces : Montrés-nous où il est dit dans l'évangile que le S. Esprit procede du Fils.Un d'eux lût ce pallage de S. Jean: Quand l'Elprit de verité fera venu,il vous enfeignera toute verité; & il ajoûta : En disant l'Esprit de verité, il dit que le S. Efprit procede de la verité; & c'eft ce que nous vouJons prouver. Les Grecs firent entrer un de leurs philofophes pour répondre, & les nonces lui demanderent : L'efprit en ce paffage pour quel efprit fe prend11: Il répondit : Pour le S. Elprit. Et la verité fe prendelle ici pour J.C. ou non? Il répondit : La verité est de plufieurs fortes, l'une des propofitions complexes, l'aut autre des incomplexes: puis étant preffé, il dit qu'en ce paffage la verité ne fignifioit pas J. C. mais la verité créée. Enfuite il fut obligé de s'en dédire & d'avouer que le S. Efprit eft l'efprit de J. C. Les nonces demanderent pourquoi il eft nommé l'esprit du Fils de Dieu ? Les Grecs aïant consulté répondirent: Parce qu'il eft de même substance que le Fils. Donc, reprirent les nonces, le pere étant confubftantiel au Fils doit être auffi nommé l'efprit du

Fils, ce qui eft faux. Alors ils fe feparerent, & il étoit prés de minuit.

AN. 1234.

23. Janu.
XXI.
Suite des con-

Le dimanche les nonces s'occuperent à l'office divin ; & le lundi de la feconde semaine vingt-troifié- ferences me de Janvier ils vinrent le matin au palais : où comme ils commençoient à disputer contre les philofophes des Grecs, l'empereur leur dit par maniere de reproche : Vous devriez montrer fimplement la verité de cette question, fans philofophie & fans fyllogifmes: cette maniere de difputer ne produit que des conteftations & des querelles. Les nonces répondirent: Un ferviteur de Dieu, comme dit S. Paul, ne 1. Tim. 11.14 doit point quereller: auffi aimons-nous beaucoup mieux montrer la verité fimplement: mais nous pouvons dire avec le même apôtre que c'est vous qui nous avez contraints de n'être pas fages, en nous réduifant par vos réponses à nous écarter de nôtre fimplicité. z. Cor.11. Nous demandâmes hier à vos philofophes pourquoi le S. Efprit eft nommé l'efprit du Fils de toute éternité. Il femble qu'on ne peut en donner que trois raifons; ou parce qu'il eft de même substance, comme répondit vôtre docteur : ou parce que le Fils le S. Efprit dans les creatures, ou parce que le S. Efprit procede de lui. Nous avons refuté la premiere raifon : nous détruifons la feconde, en difant que le S. Efprit eft l'efprit du Fils de toute éternité, & toutefois le Fils ne l'a pas envoïé de toute éternité dans les creatures. Refte donc la troifiéme, qu'il eft nommé l'efprit du Fils, parce qu'il procede de lui.

envoye

Les Grecs aïant oui cette raifon, demanderent qu'on la leur donnât par écrit; & les nonces l'aïant d'abord donnée en latin, ils demanderënt qu'on la Tome XVII.

K

2.

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24. Janv.

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leur traduisît en grec: ce qui fut fait. Enfuite ils de manderent le tems d'en déliberer, & on leur accorda le jour même lundi & le mardi. Le mardi au foir on manda les nonces pour venir chez le patriarche où ils trouverent fon clergé affemblé; & il fit apporter un long écrit, contenant, difoit-il, la réponse à leur opinion. Les nonces en aïant oui la lecture y trouverent plufieurs fauffetez, & plufieurs puerilitez ridicules. Ils delibererent s'ils le recevroient, & s'y rés folurent, plûtôt pour la confufion des Grecs, que pour leur propre confolation. Mais les Grecs confiderant que les nonces faifoient peu de cas de leur écrit, leur dirent: Retirez-vous avec la grace de Dieu, & nous vous envoïerons incontinent cet écrit. Aprés qu'ils furent partis, les Grecs réfolurent de composer un nouvel écrit, où ils changerent la plus grande partie de ce qui étoit dans le premier, & y ajoûterent plufieurs propofitions nouvelles. Ils y emploïerent tant de tems, qu'ils l'envoïerent aux nonces lorsqu'ils alloient fe mettre au lit, c'est pourquoi ils remirent au lendemain à le traduire.

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Le mercredi aprés la meffe & l'office, ils s'appli querent certe traduction de Grec en latin. Cependant le patriarche envoïa s'excufer d'affifter ce jour là à la conference, parce qu'il étoit fort indifpofé: mais après leur repas l'empereur les manda, & on s'affembla chez le patriarche. Les Grecs demanderent d'abord aux nonces s'ils avoient vû leur écrit. A quoi ils répondirent, que la traduction n'étoit pas encore écrite, comme il étoit vrai; toutefois pour ne pas perdre de tems, ils dirent: Qu'on life l'écrit devant nous, & nous y répondrons. Un des philofophes

25. janv.

Le leva & commença à lire l'écrit qui étoit long & AN.1234. plein de fyllogifmes & de termes de dialectique contre la défenfe de l'empereur. Ils vouloient examiner à la rigueur felon les regles de cet art, ce que les nonces avoient avancé fimplement & fans raisonner en forme.

Cone. Eth. par. 1.c.16.Sup.

Les nonces répondirent donc fortement à cet écrit, & l'empereur voïant la peine qu'avoient les fiens à le défendre, dit : Laiffons cet écrit qui ne produit que des difputes: avançons, & montrez par les peres la verité de ce que vous foûtenez. Alors un des nonces bien inftruit dans les livres des Grecs, ouvrit S. Cyrille & lut le neuviéme de ses anathêmes, où il condamne, quiconque dit que J. C. a reçû du S. Efprit une puiffance étrangere pour faire des miracles: au. 1. 2.2. lieu de dire qu'il les operoit par l'efprit qui lui étoit propre. Et dans l'explication de cet anatheme S. Cyrille dit, que le S. Esprit eft du verbe, & substantiellement en lui. Or, ajoûtoient les nonces, une perfonne divine ne peut être d'une autre que par generation ou par proceflion; le S. Efprit ne vient du fils par generation, c'eft donc par proceffion. Les Grecs chicanerent encore un peu fur cette preuve, puis on fe

retira.

pas

Question de

26. Janvi

Le jeudi vingt-six les nonces declarerent qu'ils ne XXXII. vouloient plus difputer fur l'article du S. Elprit. Car, rEuchariftic. disoient-ils, fi vous ne voulez pas acquiefcer à laveri- differée. té manifefte, que pouvons-nous vous propofer de plus? Ord'empereur doit partir demain de cette ville, nous voulons parler en da prefence de la feconde caufe de votre feparation. Les Grecs confentirent donc, quoi qu'avec peine, qu'on traitât du Sacre

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26. Janu.

ment de l'autel, & voulurent que les nonces commençassent. Ils déclarerent qu'ils procederoient simplement fans argumenter en forme, de quoi les Grecs témoignerent être fort contens. Toutefois ils voulurent détourner la difpute à d'autres questions fur l'azyme & le pain levé, & confumerent le tems en difcours frivoles jufques à l'heure du dîner. Enfin le patriarche dit: Montrez-nous comment & en quelle matiere vous confacrez & nous vous répondrons. Ils le firent & le patriarche demanda tréve jusques aprés

le

repas.

Ils s'affemblerent donc encore l'après-dînée & le patriarche dit: Nous avons nos freres le patriarche de Jerufalem, celui d'Alexandre & celui d'Antioche, fans le confeil defquels il ne nous eft pas permis de répondre à vos propofitions. Nous convoquerons un concile pour la mi-Mars: nous vous prions d'y affifter; & vous entendrez ce qu'on vous répondra fur ce que vous nous avez propofe. Les nonces répondirent: Nous vous avons affez déclaré que le pape nôtre maître ne nous a envoyez ni à un concile, ni à aucun autre patriarche qu'à vous. C'eft pourquoi nous ne voulons en rien exceder fes ordres au préjudice de fa fainteté ou de l'église Romaine. Nous vous confeillons toutefois d'affembler vos freres & de prendre avec eux promptement un bon confeil pour la paix & la reformation de l'églife. Vous nous écrirez donc là CP. où nous comptons de demeurer jusques à la miMars comme vous demandez; & nous attendrons vôtre réponse, afin d'avoir quelque chose de certain à mander au pape fur cette affaire. Et Dieu veüille, que nous en donnions des nouvelles qui foient à fa

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