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L'ANNÉE

LITTÉRAIRE.

LETTRE I.

Recueil de l'Académie des Belles-Lettres, Sciences & Arts de Marfeille, pour l'Année 1774; contenant l'Eloge de la Fontaine par M. de Chamfort qui a remporté le Prix; deux autres Eloges qui ont eu l'Acceffit, & une Ode fur le même sujet par M. François de Neuf-Château ; Brochure in-8° de 170 pages. A Marseille chez Jean Molly Imprimeur du Roi & Libraire.

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Es deux premiers Eloges de la Fon

Laine quife préfentent dans ce Re

cueil ont pour auteurs M. de Chamfort &M.de la Harpe.Je vous ai rendu compte de ces deux Difcours. Le troifième, ANN. 1775. Tome 111. A ij

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qui eft anonyme, & qui, pour la pre
mière fois, eft imprimé dans ce Vo-
lume, fera l'objet de cet article. Il
mérite que je vous en parle.

L'Exorde porte prefque tout entier
fur le bonheur qu'a eu l'Acacadémie
de Marseille de propofer l'Eloge de la
Fontaine, & fur ce qu'on ne doit pas
reprocher à l'Académie Françoife de
l'avoir négligé, puifqu'elle a pu ba-
lancer entre la Fontaine & Molière ,
& que, fi Molière a eu la préférence, la
Fontaine auroit pu l'avoir. Mais il n'est
pas vraisemblable que cette incertitude
de choix ait été réelle, puifqu'il s'eft
paffé 7 ou 8 ans depuis l'Eloge de Mo-
lière jufqu'à celui de la Fontaine, &
qu'il n'a point paru que l'Académie
Françoife fe foit occupée de ce der
nier. L'auteur s'étoit engagé dans un
mauvais pas; il s'en tire comme il peut.

Les deux Parties de ce Discours ont pour objet la perfonne & les ouvrages de notre immortel Fabuliste; ou plutôt on n'y confidère la Fontaine que dans fes ouvrages; on les obferve d'abord comme l'expreffion de fon caractère; on les confidère enfuite

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en eux-mêmes & indépendamment de ce rapport. Tout Ecrivain qui » a un caractère fe peint dans fes productions....» La Fontaine plaît à » tous les ordres de Lecteurs....D'où >> lui vient cet attrait que rien n'af» foiblit? De ce que l'ame de l'auteur >> eft répandue dans tout ce qu'il écrit, » & de ce que cette ame eft celle d'un » enfant. L'innocence avec tous fes » charmes, la naïveté avec toutes fes } » graces, environnent le Lecteur, l'at>> tachent, le pénètrent; il ne lit point, » il n'étudie point; il fuit, il eft en» traîné, l'auteur l'étoit lui-même. » Un Ecrivain. ordinaire arrange un » plan, médite un fujet, l'approfon» dit, &, s'il parvient à s'en rendre le » maître, c'eft le plus grand éloge où » il puiffe prétendre. Le mérite de la » Fontaine eft d'être maîtrifé par fon » fujet; la pensée le fubjugue, il s'é» gare, il s'endort dans une douce rê»verie; il s'endort, & fongénie » veille. Cette infpiration des Poëtes, »tant célébrée par eux, n'a jamais » été fi réelle que chez la Fontaine ; » mais on n'eft infpiré que felon fon

» caractère; l'inspiration de la Fon»taine n'eft point la fureur des Mé»nades ni l'agitation pénible d'une Pythoniffe échevelée qui ébranle » de fes cris les voûtes du Temple, » & voudroit arracher de fon fein le »Dieu qui l'oppreffe *; cette infpira» tion eft douce: elle n'entraîne que » parce qu'elle féduit; elle eft comme » cet intérêt naïf qui force un enfant » à vous faire part de fes idées nail» fantes & des premiers mouvemens » de fon ame». Ce ftyle fimple, élégant & facile, vous paroîtra, Monfieur, très convenable dans`un Eloge de la Fontaine. Il y a d'ailleurs peu de morceaux des autres Eloges de ce grand homme où fon caractère soit mieux faifi.

L'auteur fait une obfervation trèsjufte qui avoit échappé à fes rivaux, c'eft que l'Egoïfme, qui annonce un ef

* Non compia manfere coma; fed pectus anhelum "

Et rabie fera corda tument...

Bacchatur vates, magnum fi pectore poffet
Excuffiffe Deum.

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