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chaux qui n'a pas été suffisamment lavé. Pour amener le carbonate d'ammoniaque à l'état de pureté qu'il doit avoir pour être employé comme médicament, M. Gessard procède à la rectification de la manière suivante.

Sur un fourneau portatif A, il place une marmite de fer B, à laquelle il a fait adapter un chapiteau plat C, dont le bec D vient s'ajuster à l'ouverture E du récipient F, indiqué dans la première opération. Le récipient est disposé de la même manière; cependant, au lieu de boucher le tube supérieur G avec un linge, on y adapte un appareil de Woulf HHH destiné à recueillir les gaz qui s'y dégagent pendant la rectification. La partie supérieure du chapiteau est garnie d'une tubulure I de six centimètres de diamètre : c'est par cette tubulure qu'on introduit dans la marmite le carbonate d'ammoniaque à rectifier. Lorsque l'appareil est chargé, on bouche cette tubulure avec un bouchon de liége percé d'un trou pour recevoir l'extrémité d'un tube de Welter J. L'autre extrémité du tube K est hermétiquement fermée; la boule du tube L doit être tenue à moitié pleine d'eau. Ce tube sert à indiquer le degré de pression qu'exerce le gaz, et avertit l'opérateur des dangers qu'il court lorsque le premier tube de l'appareil de Woulf vient à se boucher par la condensation du carbonate d'ammoniaque : alors l'eau du tube est lancée avec violence, et il y a perte de gaz si l'artiste ne se hâte de remplacer le tube obstrué, par un autre qu'il doit avoir toujours tout prêt. Ce tube offre un autre avantage pendant l'opération; lorsque la pression est très-forte, il s'oppose à la rupture de l'appareil; il prévient le même accident en contrebalançant la pesanteur de l'air atmosphérique quand les vaisseaux viennent à se refroidir. Le vide se fait alors dans l'appareil avec une telle rapidité par la condensation du carbonate d'ammoniaque, que l'auteur, opérant un jour sans le tube de Welter, ne put s'opposer à ce que son récipient fût chiffonné comme s'il eût été de papier.

Quand l'appareil est monté et solidement luté, on met dans le fourneau quelques charbons allumés. Le carbonate d'ammoniaque ne tarde pas à se mettre en expension, et va se condenser dans le récipient. Il se dégage au commencement de l'opération beaucoup d'ammoniaque caustique, qui est absorbé par l'eau distillée du premier flacon de Woulf. Peu-à-peu ce dégagement cesse, et tout le sel qui se sublime va se condenser sans perte dans le récipient; et, vers la fin de l'opération, lorsqu'il ne reste plus dans la chaudière que du carbonate neutre d'ammoniaque, une portion de ce sel est décomposée. L'ammoniaque caustique, mis à nu, s'élève avec le carbonate neutre et l'amène à l'état de carbonate sursaturé, tandis que l'acide carbonique surabondant s'échappe et traverse les flacons de Woulf. M. Gessard assure que, dans un seul jour d'hiver, lorsqu'il a de la neige à discrétion, il peut facilement rectifier cinquante livres de carbonate d'ammoniaque.

Paris, le 12 décembre 1809.

Le professeur, commissaire-président des jurys de médecine; médecin en chef de l'hospice de la Maternité et de l'École polytechnique,

A M. BOULLAY, pharmacien,

Sur l'usage intérieur du Sulfure de potasse, et la préparation d'un sirop de Sulfure de potasse.

COMME il importe beaucoup, monsieur, de faire connaître les nouveaux modes de traitemens que l'on propose contre des maladies graves et aiguës, afin que, dans leur pratique, les médecins puissent en constater l'efficacité, il conviendrait, je pense, d'annoncer dans le plus prochain Bulletin de Pharmacie un genre de remède que l'on a proposé contre cette espèce d'angine trachéale qui attaque

plus particulièrement les enfans, et que, d'après le peuple écossais, on nomme communément LE CROUP. Ce remède, que l'auteur présente comme un spécifique assuré, qu'il a également employé avec succès dans la coqueluche, dans l'angine trachéale des enfans, et qui, pour me servir de ses expressions, ne lui a jamais manqué de parole, est le sulfure de potasse ou foie de soufre ordinaire, que l'on donne intérieurement à la dose de six à dix grains, dose que l'on détermine, non pas d'après l'âge de l'enfant, mais d'après l'intensité des symptômes.

Dans les premiers tems de la maladie, on fait prendre à l'enfant deux doses de sulfure de potasse, l'une le matin, l'autre le soir; et lorsqu'il y a une amélioration remarquable, ce qui, suivant l'auteur, a lieu ordinairement après vingt-quatre heures, on se borne à une seule dose du remède par jour; mais il convient d'en continuer l'usage quelque tems pour détruire complètement la disposition à la maladie, ou en prévenir le retour.

On administre ce remède, soit sous forme de bol, soit délayé dans une petite quantité d'un sirop approprié. Pour les enfans les plus jeunes, l'auteur conseille de mêler la poudre de sulfure de potasse avec un peu de miel; on en fait une sorte de pâte molle que l'on met au bout du doigt; puis on porte le doigt dans la bouche de l'enfant, et on l'y laisse jusqu'à ce qu'il soit nétoyé et que le remède ait été avalé. Pour les enfans plus âgés, on peut se borner à délayer dans une cuiller de bois ou d'ivoire le sulfure de potasse avec un peu de sirop.

Quel que soit le mode d'administration que l'on emploie, si le malade vomit le remède aussitôt après l'avoir pris, il faut sur-le-champ lui en donner une seconde dose; mais, comme, par son odeur, ce remède répugne souvent au malade et aux assistans, il est nécessaire que le médecin le voye prendre au malade, ou qu'il ne s'en rapporte qu'à des personnes dont il connaît la fidélité, l'exactitude la plus

scrupuleuse à exécuter les prescriptions, qualités malheu→ reusement trop rares dans ceux qui soignent les malades.

Je ne m'arrêterai pas à décrire, d'après l'auteur, quels sont les effets sensibles de ce remède, et encore moins à expliquer quel est son mode d'action sur l'organisme animal; l'abus des raisonnemens chimiques, comme le remar que expressément BERTHOLLET, n'est aujourd'hui que trop fréquent en médecine. Avant de chercher l'explication d'un fait, il faut commencer par le constater pour observer avec soin toutes ses circonstances; ainsi il est sage d'attendre les nouveaux résultats que l'expérience ne peut manquer de fournir sur cet objet aux médecins praticiens. Cependant comme, dans le cours de l'an X (1801), j'avais fait sur les animaux, avec le gaz hydrogène sulfuré et les sulfures, un grand nombre d'expériences dont le précis est imprimé dans le Journal de médecine, tome XV, vendémiaire an X1, (Je cite ces dates parce que, depuis quelque tems, M. Basile s'attribue ces expériences et les conclusions que j'en ai tirées.) j'ajouterai qu'en faisant prendre à des animaux des sulfures alcalins, j'ai constamment observé que les sécrétions muqueuses devenaient plus fluides, plus abondantes, puisque tous ces animaux ont eu des vomissemens, des diarrhées de matières séreuses plus ou moins colorées et fétides; la température de leur corps m'a paru aussi un peu augmentée, leur sang moins coagulable et d'un rouge moins vif. D'après ces aperçus, il paraîtrait donc que le sulfure de potasse est bien indiqué dans le cas pour lequel on le propose aujourd'hui au surplus, ses propriétés n'avaient point échappé aux médecins praticiens; aussi tous s'accordent à regarder le soufre comme le dissolvant des humeurs pituiteuses, diaphorétique, expectorant et même laxatif, soit qu'on en élève la dose, ou qu'on en continue l'usage, propriétés qui sont encore augmentées lorsqu'il est combiné avec un alcali.

Parmi les diverses préparations sulfureuses que l'on a IIeme Année.

Janvier.

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faites pour l'usage intérieur, il en est une qui mérite d'être rappelée, sur-tout dans la circonstance actuelle; elle est décrite dans l'ouvrage de WILLIS, de Medicamentorum Operationibus, cap. VI, sous le titre de Syrupus diasulphuris; quelques-uns l'ont désignée sous le titre d'Arcanum Bechicum Willisii. Mais, si cette dénomination indique une des propriétés de la composition, elle est en même tems injurieuse pour l'auteur, parce que le médecin, c'est-à-dire l'homme probe, ami de l'humanité, au lieu de faire un secret de ses formules, s'empresse de les publier pour le bien public, et de les communiquer à ses collègues.

Pour faire ce sirop de sulfure de potasse, Willis prescrit de faire fondre quatre gros de sulfure de potasse dans deux livres de bon vin de Canarie, puis, après avoir filtré, d'y délayer deux livres de sucre cuit à la consistance d'électuaire.

Bate, dans sa Pharmacopea extemporanea, donne à-peuprès la même formule, et en vante l'efficacité contre l'asthme, la toux, la phthisie et même la peste.

Mais ce mode de préparation me paraît défectueux en plusieurs points; le vin doit nécessairement décomposer une partie du sulfure de potasse. Il serait infiniment plus simple et plus sûr de préparer ce sirop en faisant fondre deux gros de sulfure de potasse dans huit onces d'eau distillée de fenouil, d'hyssope ou autre analogue; puis, après avoir filtré le solutum, d'y faire fondre, à la simple chaleur du bain-marie, quinze onces de sucre blanc concassé; par ce moyen, on obtiendrait un sirop de bonne consistance, et qui contiendrait par once six grains de sulfure de potasse.

Quel que soit, au reste, le procédé que l'on adopte, il convient de ne préparer ce sirop qu'en petite quantité, et de le conserver dans un flacon bien bouché. Je terminerai cette longue lettre en rappelant que Willis dit expressé ment, en parlant de son sirop, qu'il est très-efficace contre

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