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CHAPITRE I

1. Naissance.

SA VIE

Famille.

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Talents précoces.

Education au Mans et à Paris. Relations de Fromentières avec la province du Maine et la ville du Mans. - Fromentières et Mascaron. Il est nomme theologal de la Cathédrale du Mans; ordonné prêtre.

II. - Prédications à Paris. - Fromentières est nommé prédicateur ordinaire du roi; abbé du Jard. - Il est candidat à la charge de précepteur du Dauphin. — Assemblée du clergé en 1670. - Deux discours de circonstance. Démêlés avec le chapitre du Mans. - Elévation et préparation à l'épiscopat. III. La ville et le diocèse d'Aire au XVIIe siècle.

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Activité du nouvel évêque. - Services rendus à la ville et au diocèse. - Soulèvements en Gascogne; affaire Audijos. Les douze prebendes de Bresquit. - Interdiction des courses de taureaux. Démêlés de Fromentières avec le marquis de Poyanne; avec la ville d'Aire. - La petite assemblée de 1681 et l'affaire de la Régale. Prédications aux protestants; abjurations Fromentières est nommé à l'abbaye de Saint-Sever. - Sa mort.

nombreuses.

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I

Jean-Louis de Fromentières naquit à Paris (1) en 1632. Il était le troisième fils de Jacques de Fromentières, conseiller du roi en

(1) Moréri et, après lui, tous les Dictionnaires et recueils biographiques font naître Fromentières à Saint-Denis de Gastines, département de la Mayenne. Il était cependant impossible de donner une raison de cette attribution d'origine, car on ne voit pas du tout ce qu'il peut y avoir eu de

son Grand Conseil, et seigneur des Etangs, et de Marie Perrot, sa femme en secondes noces.

Les Fromentières étaient originaires du pays d'Anjou, où ils possédaient une châtellenie-seigneurie, dans la paroisse qui portait et porte encore leur nom. Leur noblesse était de date assez ancienne : les archives de la préfecture d'Angers font très souvent mention de leur nom, et conservent le testament d'une dame Crespine de Fromentières, qui vivait au commencement du XV° siècle. (1) Plus tard, vers la fin du XVIe siècle, un membre de cette famille, un cadet, sans doute, se rendit acquéreur du château des Etangs-l'Archevêque, dans le Bas-Maine, car, en 1576, il est déjà parlé de noble homme, Adrien de Fromentières, seigneur des Etangs. (2)

Jusqu'alors, la seigneurie des Etangs, située sur la paroisse de Saint-Vincent du Lorouer, arrondissement de Saint-Calais, avait été possédée par la maison des Parthenay, seigneurs de Montfort-le-Rotrou. Les Parthenay descendaient de Josselin, mort en 1086 archevêque de Bordeaux en souvenir de cette origine, ils avaient ajouté au nom de leur seigneurie celui de

:

commun entre les Fromentières et Saint-Denis de Gastines. C'était donc un devoir de se tenir en garde contre les affirmations du premier biographe, répétées ensuite par tous ceux qui sont venus après lui... Or, d'une notice manuscrite, dont je dois communication à l'obligeance de M. l'abbé Angot, de Louverné (Mayenne), il résulte que Fromentières était né à Paris. Cette notice, d'ailleurs très courte, et à laquelle j'aur ai encore l'occasion d'emprunter quelques détails, a été tirée d'un dictionnaire historique manuscrit, auquel travaillait un jésuite en résidence à Paris, le P. Lela eur, mort avant d'avoir achevé son travail. Contrôler l'affi rmation du P. Lelasseur, en remontant aux sources auxquelles il a puisé, est devenu chose impossible, depuis que les actes de l'état civil de la ville de Paris ont été détruits dans l'incendie de l'Hôtel de Ville, en 1871. Mais elle a pour elle le titre de parisiensis, du clergé de Paris, que portera plus tard Fromentières, dès son sous-diaconat. Ajoutons qu'aux yeux de ceux qui l'ont connu, l'érudition du P. Lelasseur était aussi vaste que sûre. Les archives conservées dans nos grands dépôts publics n'avaient plus de secrets pour lui. S'il a été impossible de retrouver parmi ses notes l'acte de baptême de Fromentières, c'est que le P. Lelasseur confiait tout à sa mémoire, qui d'ailleurs était prodigieuse. (1) Achives de Maine-et-Loire, série E, 2533.

(2 Archives de la Sarthe, série G. G.

rchevêque, et c'est sous la dénomination des Etangs-l'Archeque, que la même seigneurie passa en la possession des omentières. (1)

Par sa mère, Jean-Louis de Fromentières appartenait à la ›blesse de robe. Son arrière grand-père, Nicolas Perrot, « dont l'anagramme est portera conseil, était chancelier du duc d'Alençon, et eût été chancelier de France, si son maître eût survécu à Henri III. Ce chancelier était un grand personnage. (2) » Son fils, Cyprien Perrot, fut conseiller à la Grand' hambre : « C'était un homme de mérite et qui ne craignait rien. Sa famille l'enferma le jour qu'on jugea la maréchale d'Ancre, car il n'eût pas manqué de l'absoudre. Ce fut lui qui sauva Théophile. » Son fils, oncle de Jean-Louis, fut d'abord conseiller au Parlement et mourut président de la Chambre les Comptes. Il était cousin-germain de ce Perrot-d'Ablancourt dont Boileau unit le nom, dans ses vers, à celui de Patru. Nous retrouvons les deux amis à côté l'un de l'autre, dans la maison du président. A l'âge où Jean-Louis de Fromentières fera ses études à Paris, « ils y étaient tous les jours. » (3)

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C'est dans l'hôtel du président Perrot, non loin de la Sorbonne

(1) J.-B Pesche: Dictionnaire topographique, historique et statistique de la Sarthe. T. V, p. 647. Le Mans, 1841.

(2) Tallemant des Réaux. Historiettes T. V, p. 19-23. Edition de Monmerqué et P. Paris. Les savants éditeurs, dans une note à la marge, écrivent que Madame des Etangs fut mariée en 1614 à Jacques de Fromentin. Outre l'erreur qui porte sur le nom, il y a confusion de date. En 1614, Fromentières était marié à Mlle d'Aing, qui vivait encore le 29 novembre de cette année. Voir l'Inventaire des archives du départ. de la Sarthe, Tome I, p. 559. L'érudition aussi vaste que sûre des éditeurs est ici en défaut. Le fait est si rare qu'on peut bien le signaler. (3) Tallemant. Loc. cit. Le même Tallemant nous raconte une soirée donnée chez un greffier du Parlement, nommé Guiet. Après les Bergeries de Racan, on joua une farce improvisée : « On donna à la présidente le << rôle de la fille à marier : son père se nommait sire Anselme, c'était << d'Ablancourt, et la propre demoiselle de la Présidente faisait la mère. << Mme des Etangs, sœur du Président, faisait la servante. Gros << Guillaume, c'était un gentilhomme de Brie nommé Méneton; Patru << était le premier amoureux... La scène s'ouvrit par Mme des Etangs, << en chantant et en filant; deux choses qu'elle faisait admirablement

et de l'aristocratique faubourg, que naquit, dans les derniers jours d'octobre 1632, le futur évêque d'Aire. Le 30 du même mois, il était porté à l'église Saint-André-des-Arts et présenté au baptême. L'enfance de Jean-Louis s'écoula presque entière à Saint-Vincent du Lorouer, petite bourgade du Bas-Maine, au manoir des Etangs. C'était alors « une grande et belle maison, ayant à son << centre un haut pavillon carré avec une chapelle ». (1) Elle était adossée à la forêt de Bersay, et se dressait à l'extrémité de la ligne formée par quelques étangs, qui étendaient leurs eaux dormantes à la lisière du bois. S'il est vrai que le spectacle de la nature est fait pour produire des impressions durables sur une âme jeune, qui s'éveille à la vie, le voisinage des bois mystérieux et des eaux tranquilles, l'isolement, qui donnait à la beauté de ces lieux un caractère triste et sauvage, durent éveiller, dans l'âme du futur évêque, le don de voir les choses par le côté le plus triste, et y développer ce penchant à la mélancolie qui sera un des traits dominants du caractère de l'orateur. (2)

Le biographe anonyme, - qui n'est autre que Richard

<< bien; d'ailleurs elle était née à la comédie, et surtout pour le << personnage de servante. » On devine bien que l'intérieur des Perrot, tout en étant austère comme il convenait à un Président, n'avait rien de lugubre : « D'Ablancourt dansait naturellement en grotesque... Tous << les soirs il divertissait son oncle Perrot, en contrefaisant tout le voisi <<nage il contrefaisait son oncle même. » Ceci permet de croire qu'on ne dressait pas des autels à la mélancolie dans les salons du Président.

(1) Pesche loc. cit.

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(2) Il paraît que le paysage des Etangs n'a plus cet air sévère qu'il présentait alors. En 1834, des ouvriers y percèrent des allées, y construisirent une cabane. On attendait d'illustres visiteurs, le préfet de la Sarthe et le sous-préfet de Saint-Calais qui venaient y faire une partie de chasse. D'autres les suivaient. « La beauté du lieu, son site pittoresque, << l'agrément que procure cette réunion, ont donné l'idée de la renouveler << périodiquement... On y mange assis sur la pelouse et sous le feuillage « de la forêt de l'Hermitière aux eaux limpides, qui sert à abreuver les << chevaux des nombreux équipages qui s'y rencontrent : des musiciens << des villes environnantes, de Château-du-Loir, de la Châtre, de << Saint-Cristophe, de Tours même, y font danser; de sorte que cette << réunion est devenue la plus brillante assemblée du pays, un véritable << Longchamps. » Pesche. Loc. cit.

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