& sur tout par l'vfage, vous en puilliez ettre plus amplement inftruite. le vous marque premierement la preparation, laquelle consiste en deux poincts : dont le premier est de le mettre en la presence de Dieu, & le second d'inuoquer son asliftance. Or pour vous mettre en la presence de Dieu, je vous propose quatre principaux moyens, desquels vous vous pourrez seruir à ce commencement. Le premier gilt en vne viue & attentiue apprehension de la toute presence de Dieu, c'est à dire, que Dieu est en tout par tout, & qu'il n'y a lieu, ni chose en ce monde, où il ne soit, d'vne trel-veritable presence, de sorte que comme les oiseaux, ou qu'ils volent, rencotrent tousiours l'air : ainsi, où que nous allions, ou que nous soyons, nous trouuons Dieu prefent; chacun sçait cette verité, mais chacun n'est pas attentif à l'apprehender. Les aueugles ne voyans pas vn Prince, qui leur est prelent, ne laillent pas de se tenir en respect, s'ils sont auertis de la presence : mais la verité est, que parce qu'ils ne le voyent pas, ils oublient aisément qu'il soit present, & s'en estans oubliez, ils perdent encore plus aisément le respect & la reuerence. Helas, Philothee! nous ne voyons pas Dieu, qui nous est present ; & bien que la foy nous aduertiile de sa presence, si efl-ce que ne le voyant pas de nos yeux, nous nous en oublions bien fouuent, & lors nous nous comportons comme si Dieu estoit bien loing de nous; car encor que nous fçachions bien qu'il est present à toutes choses, si est-ce que n'y pensant point, c'est tout autant come si nous le sçauions pas C'est pourquoy tousiours auant l'oraison il faut prouoquer nostre ame à vne attentiue penfee & consideratio de cette presence de Dieu. Ce fut l'apprehension de Dauid, quand il s'escrioit. Si ie monte au Ciel, ô mon Dieu, vous y eftes; fi ie descends en enfer, vous y elles; & ainsi nous deuons vser des paroles de ne Iacob, lequel ayant veu l'eschelle sacrec, ô que ce lieu, dit-il, eft redoutable ! vragement Dieu est icy, & ie n'en sçauois rien : il veut dire qu'il n'y pensoit pas ; car au reite il ne pouuoit ignorer, que Dieu ne fust en tout, & par tout. Venant donques à la priere, il vous faut dire de tout vostre coeur, & à vostre cæur; ò mon coeur, mon coeur ! Dieu est vrayement icy: Le second moyen de se mettre en ceite facree presence, c'est de penser que non seulement Dieu est au lieu où vous estes, mais qu'il est tres-particulierement en vostre cour, & au fond de voitre esprit, lequel il viuifie & anime de la diuine prefence, eftant là, comme le coeur de votre coeur, & l'esprit de vostre esprit; car comme l'ame ettant respandue par tout le corps, le troue presente en toutes les parties d'iceluy & reside neantmoins au coeur d'vne speciale residence; de melme que Dieu estant tresprefent à toutes choses, aflitte toutesfois d'vne speciale façon à nostre esprit. Et pour cela Dauid appeloit Dieu, Dieu de Jon caur; & Paul disoit que nous viuous, nous nous nouuons, & sommes en Dieu. En la consideration donques de cette verite, vous exciterez vne grande reuerence en vostre coeur à l'endroit de Dieu, qui luy eft intimement present. Le troisiesme moyen, c'est de confiderer nostre Sauueur, lequel en fon humanité regarde dés le ciel toutes les personnes du monde, mais particulierement les Chrestiens qui font ses enfans, & plus specialemēt ceux qui font en priere, desquels il remarque les actions, & deportemens. Or cecy n'est pas vne simple imagination, mais vne vraye verité : car encor que nous ne le voyons pas, si est-ce que de là haut il nous confidere. S. Eftienne le vit ainsi au temps de son martyre : si que nous pouuons bien dire auec l'espouse, le voilà qu'il est derriere la paroy, voyant par les fenestres, regardant par les treillis. La quatriefme façon consiste à se seruir de la simple imaginatio, nous representans le Sauueur en fon humanité sacree, comme s'il estoit pres de nous : ainsi que nous auons accoustumé de nous representer nos amis, & de dire, ie m'imagine de voir vn tel, qui fait cecy & cela, il me semble que je le vois, ou chose semblable. Mais si le tref fainct Sacrement de l'autel estoit present, alors cette presence seroit reelle, & non purement imaginaire ; car les elpeces & apparences du pain, feroient comme vne tapitlerie, derriere laquelle nostre Seigneur eftāt reellement present, nous void & considere, quoy que nous ne le voyos pas en la propre forme. Vous vierez donc, Philothee, de l'vn de ces quatre moyens, pour mettre votre ame en la presence de Dieu, auant l'oraison : & ne faut pas les vouloir employer tous ensemblement, mais seulement vn à la fois & cela briesuement & fimplement. |