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4o Quels sont les effets qui en résultent pal effet du Rappel, c'est-à-dire, pour rendre pour ceux qui en sont l'objet;

5o S'il est révocable, et si la révocation s'en fait de plein droit par le prédécès de ceux avec qui il tendait à faire concourir les rappe

lés.

ART. I. Le Rappel en ligne collatérale est-il admis dans toutes les coutumes qui excluent la représentation dans cette ligne?

I. On a vu ci-devant, §. 1, art. 1, qu'il est admis les coutumes du bailliage et de la par ville de Saint-Omer, et par celle de Mortagne.

Il l'est également par celle de Blois; voici ce qu'elle porte, art. 139: « Représentation » n'a lieu en ligne collatérale si elle n'est ac»cordée par celui ou ceux de la succession » desquels il est question : ce qu'ils pourront » faire sans y appeler aucuns de leurs heri» tiers présomptifs ».

La coutume de Cambrésis et celle de Hautbourdin excluent pareillement la représentation en ligne collaterale; et l'on verra ci

après, art. 2, qu'elles permettent d'y remédier par le Rappel.

La coutume de Saint-Mihiel dispose de même. «< En succession collaterale (dit-elle, tit. 5, » art. 15) de meubles, dettes, gagieres, ac>>quêts et conquêts faits hors ligne, en termes » de poste, représentation n'a lieu; ains ap>> partiennent au plus prochain parent ab in» testat, si doncques n'est qu'il y ait dis"position testamentaire au contraire ».

Il en est autrement de la coutume de Montargis elle permet, à la vérité, le Rappel, mais seulement avec le consentement des héritiers « Représentation n'a point de lieu » en succession de ligne collatérale, sinon du » consentement de tous ceux qui y ont in» térêt ». Ce sont les termes dont elle se sert, chap. 15, art. 8; et, comme le femarque Dumoulin sur ce texte, le consentement qu'elle exige, ne peut être valablement donné que par des majeurs : intellige consensum eorum qui sint majores 25 annis.

II. Les autres coutumes n'admettent ni n'excluent le Rappel : doit-il avoir lieu dans leurs territoires, ou doit on se tenir rigoureusement à la règle qu'elles ont établie, de déférer les successions aux plus proches parens? C'est ce que nous avons à examiner.

D'abord, on ne doute nullement que le Rap pel ne soit admis partout, lorsque les parties intéressées y consentent. Ce seul consentement suffit, même après la mort de celui a qui l'on succède, pour donner lieu au princi

héritier le parent plus éloigné que la loi excluait. C'est ce qui a été jugé dans la coutume de la châtellenie de Lille, par un arrêt du parlement de Flandre, dont voici l'espèce.

Maximilien Liber décède en 1688, laissant un frère, des sœurs, et des neveux issus d'un frère prédécédé. La coutume déférait tous les propres au frère, à l'exclusion des sœurs et des neveux. Cependant le frère veut bien les partager avec les unes et les autres. Le seigneur de qui relevaient les biens, vient dire que les sœurs et les neveux sont exclus de droit par le frère; qu'ainsi, c'est à titre de donataires de celui-ci qu'ils prennent part aux lui doivent le droit seigneurial. Les sœurs et propres du défunt; et que par conséquent ils les neveux répondent qu'ils ont recueilli à frère ne leur a point fait de donation; qu'il a titre d'héritiers les biens dont il s'agit ; que le seulement renoncé au droit qu'il avait de sucqui les empêchait de concourir avec lui, et céder seul; qu'il n'a fait que lever l'obstacle que, le retour au droit commun étant favorable, on ne doit pas faire difficulté de les

considérer comme de vrais successeurs ab intestat. Par arrêt du 24 décembre 1696, rapporté par Desjaunaux, le seigneur a eté de

bouté de sa demande.

Ainsi, point de difficulté lorsque l'héritier consent au Rappel, du vivant de celui à qui il s'agit de succéder, ou l'accorde lui-même après l'ouverture de la succession.

III. Mais que doit-on décider dans le cas où celui qui veut rappeler, a des héritiers qui refusent ou sont incapables d'y consentir?

Le droit commun est pour la faculté du Rappel; cependant il y a quelques coutumes où elle est contestée : ce sont principalement celles qui interdisent la disposition entre-vifs des biens propres, soit absolument, soit sans le consentement des héritiers présomptifs.

Le Camus d'Houlouve, sur la coutume de Boulonnais, tome 1, page 369, dit que « le » Rappel supplée en Boulonnais le défaut de » représentation, mais qu'il ne peut propre>>ment avoir lieu qu'en ligne directe ».

On a cependant vu plus haut, §. 1, art. 4, que les commentateurs de la coutume d'Artois, dont les dispositions à cet égard sont les mêmes que celles de la coutume de Boulonnais, ne font aucune difficulté d'admettre le Rappel en ligne collatérale comme en ligne directe; et cet avis nous paraît plus exact et plus conséquent que l'autre : plus exact, parceque l'indisponibilité par acte entre-vifs n'est pas plus forte que l'indisponibilité testamen

taire, et qu'ainsi les raisons qui ont fait admettre le Rappel par testament, dans les coutumes où les propres ne sont disponibles par cette voie que jusqu'à concurrence d'un quint, militent également pour le faire recevoir dans les coutumes qui étendent jusqu'aux actes entre-vifs la prohibition de disposer; plus conséquent, parceque la coutume de Boulonnais n'autorisant pas plus les dispositions des propres en ligne directe qu'en ligne collaterale, il n'est pas possible de donner une juste raison pourquoi l'on admettrait le Rappel dans l'une plutôt que dans l'autre.

IV. Ce que nous disons ici, ne s'entend que du Rappel proprement dit, et appelé intrà terminos juris; car personne ne doute que l'autre espèce de Rappel ne forme, comme on le verra ci-après, qu'un simple legs, et ne puisse valoir dans toutes les coutumes jusqu'à concurrence des portions des biens dont elles permettent de disposer. Ainsi, dit Lebrun, « dans la coutume de Montargis, l'on » interprète l'art. 8 du chap. 15, si favora»blement pour ceux qui peuvent être rap» peles, que, si le Rappel leur manque, à » cause que les plus prochains refusent leur » consentement, celui des biens duquel il » s'agit, les peut récompenser par des legs ». Il peut aussi les rappeler purement et simplement, et ajouter que, si son héritier ne veut point exécuter le Rappel, il leur lègue telle partie de biens ou telle somme d'argent. Cette alternative est d'un usage très-fréquent dans la coutume citée, et la légitimité en a été consacrée par un arrêt du 30 mai 1616, confirmatif de deux sentences rendues successivement à la prévôté et au bailliage de Montargis, les 18 octobre et 29 décembre 1614: « Licet (dit l'Hoste, dans son commentaire) » que l'on alléguât que le legs était en fraude » de la loi pœnæ nomine ». (V. l'article Peine testamentaire).

Remarquez cependant que cette règle n'a lieu qu'autant que le testateur a fait un legs exprés car s'il s'était borné à un Rappel, sa disposition, nulle comme telle, ne vaudrait pas comme legs. C'est ce qui a été jugé récemment dans l'espèce suivante.

le

Hélène-Julienne Delon a fait, le premier janvier 1766, un testament dans lequel deux dispositions sont à remarquer : « Et pour "surplus de mes autres biens mobiliers ou » immobiliers, acquêts ou conquêts, à l'exe ception de mes propres qui appartiendront » à mes héritiers les plus proches, je les » donne et lègue à Marie-Louise-Jeanne De» lon, ma parente et ma bonne amie, que

» j'institue à cet effet pour ma legataire uni» verselle. Mon intention est que les enfans » du feu sieur Boyer, marchand à Loret, » héritent de moi avec les autres héritiers, » à l'effet de quoi je les rappelle par mon » présent testament ».

Après la mort de la testatrice, les mineurs Boyer qui avaient été rappelés, ont formé au bailliage de Nemours, une demande en partage contre le sieur Marc, héritier de la legataire. Ils ont été déboutés de leur demande. Appel de la sentence au parlement de Paris.

M. l'avocat général d'Aguesseau, qui a porté la parole dans cette cause, a observé que la loi municipale des parties n'admettait point la représentation en ligne collatérale, à moins que les parties n'y consentissent. Représentation, dit l'art. 8 du chap. 15, n'a point lieu en succession de ligne collatérale, sinon du consentement de tous ceux qui y ont intérét.

« Mais (a-t-il ajouté) elle ne proscrit point le Rappel nommément, et ce moyen répare le défaut de représentation. Le Rappel produit deux effets si les rappelés sont intrà terminos juris, ils viennent comme héritiers; s'ils sont au contraire extrà terminos juris, ils ne viennent que comme légataires, jure legati tantùm.

» Dans l'espèce, il est convenu que les mineurs Boyer sont rappelés extrà terminos juris. Ces premiers principes posés, les difficultés disparaissent. Le Rappel répare le défaut de représentation: la représentation dans la coutume de Montargis, ne peut avoir lieu sans le consentement des parties intéressées, il en faut donc dire autant du Rappel.

» Or, il n'y a pas, dans l'espèce, le consentement requis par la coutume.

» Mais, ont dit les mineurs Boyer, d'après tous les auteurs et la jurisprudence de la cour, le consentement n'est requis que pour faire venir les rappelés à la succession comme heritiers; il est inutile pour donner au Rappel l'effet d'un legs.

» D'abord le Rappel fait extrà terminos juris, ne peut jamais produire que l'effet d'un legs. Or, la coutume de Montargis exige le consentement des parties intéressées pour opé rer la représentation dont le Rappel est l'équivalent; il faut donc conclure à pari qu'elle exige ce même consentement pour donner au Rappel l'effet d'un legs.

» Ricard semble être d'un avis contraire; mais son opinion isolée est combattue par une foule d'autres auteurs célèbres, tels que Brodeau, Lebrun, Rousseaud de Lacombe, etc., et surtout par le texte et l'esprit de la cou

tume, ne paraît pas devoir déterminer les suffrages en sa faveur.

» Les mineurs Boyer ont cité deux arrêts; mais ils n'ont pas été rendus dans des coutumes qui exigent le consentement des parties intéressées, ils l'ont été dans des coutumes locales de celle de Blois, qui ne contiennent point de dispositions semblables à celle de Montargis.

» Si la testatrice avait fait un legs aux mineurs Boyer, ce legs serait valable sans le consentement de ses héritiers; mais elle ne l'a pas fait. Voici l'ordre de ses dispositions: après plusieurs legs particuliers, elle dispose de tous ses acquêts et conquêts au profit de la demoiselle Delon. Ensuite par un codicille, elle rappelle les mineurs Boyer, pour succéder à ses propres avec ses autres heritiers. Ce Rappel est-il valable sans le consentement des parties intéressées? Voilà toujours où la vérité des principes force de revenir. Sans doute, la cause des mineurs est favorable, l'intention de la testatrice parait avoir été de leur laisser une part de son heredité. Mais enfin, la loi existe, et on ne peut qu'en réclamer l'exécution.

» On a cité la note de Dumoulin, sur l'art. 6 d'une coutume locale de Blois. Ce jurisconsulte, il est vrai, soutient, dans cette note, que le Rappel dans une coutume qui ne l'admet pas, a au moins l'effet d'un legs; mais il ne dit, dans cet endroit, ni dans aucun de ses écrits, que, dans une coutume où la représentation ne peut avoir lieu sans le consentement des parties intéressées, ce consentement ne soit pas nécessaire ».

Ainsi a parlé M. l'avocat général : et sur ses conclusions, il est intervenu, le 2 juillet 1781', un arrêt qui a confirmé la sentence.

V. On a vu plus haut, que les coutumes de Saint-Omer, de Mortagne, de Blois, de Cambresis, de Saint-Mihiel, permettent le Rappel indefiniment. Mais leur disposition doit-elle être limitée aux termes de droit, ou s'étendelle à tous les degrés de succession?

Lebrun propose cette question par rapport à la coutume de Blois, et voici comment il

la résoud :

« Cette coutume, par des termes si géné. raux, semble permettre de rappeler toute sorte d'héritiers collatéraux, et laisser à la disposition de chacun de faire tel Rappel que bon lui semblera, même des degrés plus éloignés, au préjudice de ceux qui sont dans les plus proches degrés. Cependant il faut conclure avec Pontanus, que le Rappel ne pourra être fait que dans les termes de la représen

tation du droit, c'est-à-dire, au profit de neveux venant avec les frères, parceque, dans le doute, il faut se conformer, autant qu'il se peut, au droit commun.

» D'ailleurs, on doit être persuadé que c'est l'esprit de la coutume; car si l'ancien droit n'admettait aucune représentation en ligne collatérale, et si le nouveau droit l'a limitée aux enfans des frères venant avec leurs oncles, frères du défunt, il y a apparence, dit cet auteur, qu'une coutume qui rétablit la représentation en cette ligne, entend se conformer à ce nouveau droit et à l'authentique post fratres, C. de legitimis heredibus, à laquelle le droit commun du royaume s'est conformé.

» J'ajouterai seulement à cette raison que, dans le doute, on doit restreindre plutôt qu'étendre le droit de Rappel qui va à changer l'ordre des successions, avec cet exemple qui résulte d'un des arrêts que nous avons pour cette coutume de Blois, dont l'art. 155, admettant le double lien bien plus indéfiniment que l'art. 139 n'admet le Rappel, et disant qu'il a lieu en toute succession collatérale ; néanmoins, par l'arrêt de Villebrames, rapporté par Dumoulin, sur cet art. 135, il a été jugé que le double lien n'avait lieu que jusqu'aux enfans des frères (1) : tant l'explication qui conforme les choses au droit commun,

est favorable!

» Enfin, il y a un autre exemple dans une des coutumes locales de Blois, et dans l'art. 6 du chap. 4 de la coutume de Lépuroux et Bouges, qui disent en général que, dans la coutume on n'use point de Rappel, et que la représentation y a lieu, ce terme général de représentation n'a été entendu que de la représentation du droit, suivant la note de Dumoulin sur cet article ».

ART. II. Dans quelle forme doit étre fait le Rappel en ligne collatérale?

I. Le Rappel intrà terminos juris peut être fait par toutes sortes d'actes entre-vifs ou de dernière volonté, même par un billet sous seing-prive, en un mot, par tout ce qui peut servir, à la inanifestation de la volonté de son auteur. C'est ce que nous avons établi ci-devant, §. 1, art. 2.

Mais il faut, pour cela, que l'acte dont on prétend l'induire, l'établisse clairement; car

en cette matière, comme en toute autre, on ne doit pas dénaturer les dispositions de

(1) V. l'article Double licn.

1

l'homme, et en tirer des conséquences auxquelles il n'a pas pensé. C'est cependant ce qu'on prétendait faire dans une espèce rapportée par Lépine de Grainville.

Le sieur de Mespas avait fait donation entre-vifs au sieur de Lastre, son neveu, d'une maison, d'une ferme et de terres situées au village d'Hupelandre en Boulonnais. Les sœurs du sieur de Mespas s'étaient jointes à lui dans l'acte et y avaient aussi pris la qualité de donatrices. Les biens relevaient du duché de Bournonville; le sieur Cavero de Rieux, receveur de ce duché, demanda le quart-denier, en se fondant de l'art. 50 de la coutume, suivant lequel, « en matière de vendition, >> donation ou alienation d'héritages féodaux » ou cottiers, il est dû au seigneur pour ses » droits seigneuriaux.......... pour les cottiers, » le quart-denier »>.

Le sieur de Lastre s'opposa à cette demande, et soutint 1o qu'au moyen du concours de ses tantes, sœurs du donateur, qui s'étaient aussi rendues donatrices, il était devenu l'héritier apparent de son oncle; qu'ainsi, il ne devait point de droits seigneuriaux, puisque l'art. 50 même en exempte le don entre-vifs fait par le propriétaire à son héritier apparent par avancement de succession; 2o que la donation contenait en sa faveur un Rappel intrà terminos juris ; ce qui lui avait donné un titre successif, et ne l'assujetissait par conséquent qu'à un simple

relief.

Le premier de ces deux moyens, dit Lépine de Grainville, ne se trouva pas fondé, parcequ'il était prouvé que les héritages donnés étaient venus au donateur de la succession du père commun. Or, dans la coutume de Boulonnais, il n'avait appartenu aucun droit de propriété aux sœurs dans les héritages; elles avaient seulement quelques droits à exercer : ainsi, quoiqu'elles fussent parties dans l'acte, elles ne pouvaient pas être regardées comme véritablement donatrices.

A l'égard du second moyen, on n'eût pas besoin d'examiner si le Rappel en ligne collatérale, fait intrà terminos juris, devait être admis dans la coutume de Boulonnais, parcequ'il était préalable de décider si la donation contenait un Rappel'; et on jugea que non, parcequ'il lui manquait deux caracteres essentiels :

1o Le Rappel n'a d'autre effet que de faire concourir le plus éloigné avec le plus proche. Par la donation du sieur de Mespas, le neveu devait venir seul à la succession, à l'exclusion

c'était plutôt une donation d'une succession future, qu'un Rappel. Il n'était point question de savoir si la disposition était valable

ou non.

2o Le Rappel est un titre universel; le rappelé vient à la succession. La donation, au contraire, ne portait que sur certains immeubles; elles pouvait valoir pour les biens dont elle disposait, mais elle ne donnait point droit au sieur de Lastre de venir au partage de la succession; il n'était donc point devenu héritier.

« Outre ces deux caractères (continue Lépine de Grainville), qui manquaient à la donation pour en faire un Rappel, il faut encore observer que, quoiqu'il n'y ait point de formule, ni de termes prescrits pour opérer le Rappel, il faut cependant pouvoir l'induire des expressions de l'acte, ainsi que de la substance; et l'expression de Rappel ni aucune au tre équivalente ne s'y trouvaient employees. » La donation ne contenant point de Rappel, il ne restait plus qu'une donation faite à un parent éloigné, du consentement de l'heritier apparent. C'est précisément une pareille donation qui donne ouverture au droit de quart-denier ».

Par arrêt rendu à la quatrième chambre des enquêtes, le 3 juillet 1730, le sieur de Lastres a été condamné au paiement du droit.

II. L'observation de Lépine de Grainville, qu'il n'y a point de formule ni de termes prescrits pour opérer le Rappel, est confirmée par un arrêt du 9 juin 1687, dont l'espèce est rapportée ci-après, art. 4. Il s'agissait de savoir si c'était un Rappel ou un legs qu'avait entendu faire un testateur, en déclarant qu'il laissait ses biens à son frère et à son neveu, pour être partagés entre eux également.

Pour établir que cette disposition n'avait donné au neveu que la qualité de legataire, et que sa part dans les biens du défunt lui avait tenu nature d'acquêt, on disait 1o que le testament ne contenait point le mot de Rappel; 2o que le frère et le neveu étaient compris dans une seule et même clause; et que, puisqu'il n'y avait et ne pouvait point y avoir de Rappel à l'égard du frère, il ne pouvait pas en être question pour le neveu; qu'en un mot, la portion échue au frère en vertu du testament, était sans difficulté un acquêt dans sa personne; et que la condition du neveu ne pouvait pas être différente, puisqu'ils tiraient l'un et l'autre tout leur droit d'une même disposition.

Ces raisons n'ont fait aucune impression de ses tantes qui étaient plus proches : ainsi, sur les juges. La première n'était qu'une

vaine subtilité. La seconde était plus spécieuse; voici comment on l'a réfutée :

« Rien n'empêche que la disposition du défunt n'agisse différemment sur le neveu. La raison en est que ce qui produit les différens effets de cette disposition, est la différence des personnes : le frère du défunt était son héritier naturel et ab intestat, quant aux meubles et acquêts immeubles, et n'avait pas besoin de la disposition du testateur pour y succéder; ainsi, quand il a accepté la disposition faite à son profit, il a renoncé au bénéfice de la loi, et prenant tout de la main du testateur, c'est une disposition particulière qui n'est considérée que comme un legs en sa personne; et c'est là le cas véritable dans lequel on peut dire que le legs fait à l'héritier présomptif en collatérale, est acquêt.

» Mais il en est autrement par rapport au neveu: il ne pouvait venir à la succession des meubles et acquêts de son oncle que par la voie du Rappel; le silence de la coutume de Meaux imposait une nécessité absolue de rappeler, pour le rendre capable de succéder; ainsi, il avait besoin de la disposition de son oncle pour produire cet effet en sa faveur : mais, d'autre part, comme cette disposition ne fait que remettre les choses dans le droit commun, ce qui lui est advenu par cette voie, n'est, par un effet de la libéralité du sieur Poulet, qu'une exécution de la loi commune des successions qui veut que les neveux succèdent par représentation avec les frères de leur oncle.

» En un mot, c'est la coutume elle-même qui agit par le ministère du défunt; et c'est par cette raison que le Rappel produit en sa personne la qualité d'héritier, comme l'effet ordinaire et inséparable de la représentation dans les coutumes qui la reçoivent ».

III. Quelque constante que soit la maxime qui permet de rappeler un neveu ou une niece par toute sorte d'actes, et sans employer les formalités requises, soit pour les testamens, soit pour les donations entre vifs, il y a cependant une coutume dans laquelle on ne peut le faire que par le moyen d'un acte dont elle veut que toutes les dispositions de derniere volonté soient précédées ou suivies : c'est la coutume de Cambresis. Elle porte, tit. 3, art. 1, que « nul ne peut, par testa»ment, disposer de ses héritages, si ce n'est » en faisant les devoirs dûment pardevant loi » du lieu ou des lieux esquels les heritages » sont situés ». Et par l'art. 13 du tit. 5, elle fait entendre très clairement que le Rappel est soumis, comme le testament, à la neces

site de la déshéritance. Cet article déclare que « devoirs de représentation héréditaire, » passés pardevant loi, se peuvent faire en » termes généraux, sans spécification parti» culière des héritages, et sans désignation » d'abouts et tenans ».

On a cependant prétendu faire valoir dans cette coutume, un rappel testamentaire qui n'avait été ni précédé ni suivi de devoirs de loi. C'était dans la succession de la demoiselle Mairesse d'Hauprat, qui avait rappelé les enfans du sieur Wartelle d'Alloine, ses neveux, pour concourir avec le sieur Mairesse de La Viefville, son frère: on appuyait cette prétention sur le principe que le Rappel intrù terminos juris peut se faire par toute sorte d'actes; mais elle était trop contraire à la disposition textuelle de la coutume, pour être accueillie aussi a-t-elle été rejetée par une sentence du bailliage de Cambrai, du 6 juin 1739, que j'ai entre les mains.

Il y a quelque chose de semblable dans la coutume de Haubourdin et Emmerin, locale de la châtellenie de Lille. Elle déclare, art. 17, que « représentation de neveux ou nièces, » faites sur un traité de mariage ou par dis» position pour venir représenter les chef et » corps de père ou mère terminés, en la suc» cession et hoirie des biens héréditaires gi» sans esdites seigneuries et en mouvans, n'a » lieu, ne soit que lesdits traité ou disposition » soient passés ou reconnus pardevant jus» tice, fors que pour biens meubles ».

IV. On a remarqué ci-dessus que le Rappel ne peut avoir lieu dans la coutume de Montargis, que du consentement des parties in

téressées.

Ce consentement n'exige aucune formalité particulière il suffit qu'il soit constant pour assurer le droit du rappelé. Il a même été juge, par une sentence du bailliage de Montargis, du 6 juin 1564, rapportée dans le commentaire de l'Hoste, que « ceux qui ont » intérêt au Rappel, sont présumés avoir » consenti, quand ils y ont été présens et se

» sont tus >>.

Ricard et Lebrun applaudissent à cette décision, et reprennent l'Hoste de l'avoir regardée comme contraire à l'apostille de Dumoulin sur l'art. 99 de la coutume de Vitry. En effet, Dumoulin etablit seulement que le consentement des cohéritiers, requis par cette coutume pour qu'un père et une mère puissent avantager un de leurs enfans, doit être libre et exprès; ce qui paraît assez juste, si l'on considère que l'égalité entre les frères et les sœurs est toujours favorable, et que les

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