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Mais, dans les derniers temps, les moeurs se corrompirent au point que les fidéi-commis durent avoir moins de force, pour éluder la loi Voconienne, que cette loi n'en avoit pour se faire suivre.

Les guerres civiles firent périr un nombre infini de citoyens. Rome, sous Auguste, se trouva presque déserte il falloit la repeupler. On fit les lois pappiennes, où l'on n'omit rien de ce qui pouvoit encourager les citoyens à se marier et à avoir des enfants a. Un des principaux moyens fut d'augmenter, pour ceux qui se prêtoient aux vues de la loi, les espérances de succéder, et de les diminuer pour ceux qui s'y refusoient; et comme la loi Voconienne avoit rendu les femmes incapables de succéder; la loi pappienne fit, dans de certains cas, cesser cette prohibition.

Les femmes, sur-tout celles qui avoient des enfants, furent rendues capables de recevoir en vertu du testament de leurs maris; elles purent, quand elles avoient des enfants, recevoir en vertu du testament des étrangers; tout cela contre la disposition de la loi Voconienné : et il est remarquable qu'on n'abandonna pas entièrement l'esprit de cette loi. Par exemple, la loi pappienne

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a Voyez ce que j'en ai dit au liv. XXIII, ch. XXI,

b Voyez sur ceci les Fragm. d'Ulpien, tit. XV, §. 16. c La même différence se trouve dans plusieurs dispositions de la loi pappienne. Voyez les Fragm. d'Ulpien, S. 4 et 5, tit. dernier; et le même, au même tit. §. 6.

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permettoit à un homme qui avoit un enfant a de recevoir toute l'hérédité par le testament d'un étranger; elle n'accordoit la même grace à la femme, que lorsqu'elle avoit trois enfants ↳

Il faut remarquer que la loi pappienne ne rendit les femmes, qui avoient trois enfants, capables de succéder qu'en vertu du testament des étrangers; et qu'à l'égard de la succession des parents, elle laissa les anciennes lois, et la loi Voconiennec dans toute leur force. Mais cela ne sub

sista pas.

Rome, abymée par les richesses de toutes les nations, avoit changé de moeurs; il ne fut plus question d'arrêter le luxe des femmes. AuluGelle, qui vivoit sous Adrien, nous dit d que de son temps la loi. Voconienne étoit presque anéantie; elle fut couverte par l'opulence de la cité. Aussi trouvons-nous dans les Sentences de Paule, qui vivoit sous Niger, et dans les Fragments d'Ulpien f, qui étoit du temps d'Alexandre Sévère,

a Quod tibi filiolus, vel filia, nascitur ex me, Jura parentis habes; propter me scriberis haeres. Juvenal. sat. IX. b Voyez la loi IX, Cod. Théod. de bonis proscriptorum; et Dion, liv. LV. Voyez les Fragm. d'Ulpien, tit. dern. §. 6; et tit. XXIX, §. 3.

c Fragm. d'Ulpien, tit. XVI, §. 1; Sozomène, liv. I, ch. XIX.

d Liv. XX, ch. I.

e Liv. IV, tit. VIII, §. 3.

f Tit. XXVI, §. VI.

que les soeurs du côté du père pouvoient succéder, et qu'il n'y avoit que les parents d'un degré plus éloigné qui fussent dans le cas de la prohibition de la loi Voconienne.

Les anciennes lois de Rome avoient commencé à paroître dures; et les préteurs ne furent plus touchés que de raisons d'équité, de modération et de bienséance.

Nous avons vu que, par les anciennes lois de Rome, les mères n'avoient point de part à la succession de leurs enfants. La loi Voconienne fut une nouvelle raison pour les en exclure. Mais l'empereur Claude donna à la mère la succession de ses enfants, comme une consolation de leur perte; le sénatus-consulte Tertullien, fait sous Adrien a, la leur donna lorsqu'elles avoient trois enfants, si elles étoient ingénues, ou quatre si elles étoient affranchies. Il est clair que ce sénatusconsulte n'étoit qu'une extension de la loi pappienne, qui, dans le même cas, avoit accordé aux femmes les successions qui leur étoient déférées par les étrangers. Enfin Justinien leur accorda la succession indépendamment du nombre de leurs enfants.

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Les mêmes causes qui firent restreindre la loi qui empêchoit les femmes de succéder firent renverser peu-à-peu celle qui avoit gêné la succession des parents par femmes. Ces lois étoient

a C'est-à-dire l'empereur Pie, qui prit le nom d'Adrien par adoption.

b Leg. II. Cod. de Jure liberorum. Instit. liv. III, tit. III, S. 4, de senatus-consult. Tertul.

très - conformes à l'esprit d'une bonne république, où l'on doit faire en sorte que ce sexe ne puisse se prévaloir pour le luxe, ni de ses richesses, ni de l'espérance de ses richesses au contraire, le luxe d'une monarchie rendant le mariage à charge et coûteux, il faut y être invité et par les richesses que les femmes peuvent donner et par l'espérance des successions qu'elles peuvent procurer. Ainsi, lorsque la monarchie s'établit à Rome, tout le systême fut changé sur les successions les préteurs appelèrent les parcats par femmes au défaut des parents par mâles; au lieu que, par les anciennes lois, les parents par femmes n'étoient jamais appelés. Le sénatus-consulte Orphitien appela les enfants à la succession de leur mère, et les empereurs Valentinien a, Théodose et Arcadius, appelèrent les petits-enfants par la fille à la succession du grand-père; enfin l'empereur Justinien b ôta jusqu'au moindre vestige du droit ancien sur les successions: il établit trois ordres d'héritiers; les descendants, les ascendants, les collatéraux, sans aucune distinction entre les mâles et les femelles, entre les parents par femmes et les parents par mâles, et abrogea toutes celles qui restoient à cet égard. Il crut suivre la nature même, en s'écartant de ce qu'il appela les embarras de l'ancienne jurisprudence.

a Leg. IX. Cod. de suis et legitimis liberis.

b Leg. XII, Cod. ibid. et les Novelles CXVIII et GXXVII.

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De

LIVRE XXVII I.

l'origine et des révolutions des lois civiles chez les Français..

In nova fert animus mutatas dicere formas

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LES

ES Francs étant sortis de leur pays, il firent rédiger par les sages de leur nation les lois saliques a La tribu des Francs ripuaires s'étant jointe, sous Clovis b, à celle des Francs saliens, elle conserva ses usages; et Théodoric c roi d'Austrasie, les fit mettre par écrit. Il recueillità de

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a Voyez le prologue de la loi salique. M. de Leibnitz dit, dans son traité de l'Origine des Francs, que cette loi fut faite avant le règne de Clovis mais elle ne put l'être avant que les Francs fussent sortis de la Germanie; ils n'entendoient pas pour lors la langue latine.

b Voyez Grégoire de Tours.

c Voyez le prologue de la loi des Bavarois, et celui de la loi salique.

d Ibid.

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