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Les continuelles lotions sont très en usage dans les climats chauds cela fait que la loi mahométane et la religion indienne les ordonnent. C'est un acte très-méritoire aux Indes de priera Dieu dans l'eau courante; mais comment exécuter ces choses dans d'autres climats?

Lorsque la religion, fondée sur le climat, a trop choqué le climat d'un autre pays, elle n'a pu s'y' établir; et quand on l'y a introduite, elle en a été chassée. Il semble, humainement parlant, que ce soit le climat qui a prescrit des bornes à la religion chrétienne et à la religion mahométane.

Il suit de-là qu'il est presque toujours convenable qu'une religion ait des dogmes particuliers et un culte général. Dans les lois qui concernent les pratiques de culte, il faut peu de détails; par exemple, des mortifications, et non pas une certaine mortification. Le christianisme est plein de bon sens, l'abstinence est de droit divin; mais une abstinence particulière est de droit de police, et on peut la changer.

a Voyage de Bernier, tome II.

LIVRE X X V.

Des lois, dans le rapport qu'elles ont avec l'établissement de la religion de chaque pays et sa police extérieure.

CHAPITRE PREMIER.

Du sentiment pour la religion.

L'HOMME pieux et l'athée parlent toujours de .

religion; l'un parle de ce qu'il aime, et l'autre de ce qu'il craint.

CHAPITRE II,

Des motifs d'attachement pour les diverses religions.

LES

VES diverses religions du monde ne donnent pas à ceux qui les professent des motifs égaux d'attachement pour elles: cela dépend beaucoup de la manière dont elles se concilient avec la façon de penser et de sentir des hommes.

Nous sommes extrêmement portés à l'idolâ trie, et cependant nous ne sommes pas fort attachés aux religions idolâtres; nous ne sommes guère portés aux idées spirituelles, et cependant

nous sommes très-attachés aux religions qui nous font adorer un être spirituel. C'est un sentiment heureux qui vient en partie de la satisfaction que nous trouvons en nous-mêmes, d'avoir été assez intelligents pour avoir choisi une religion qui tire la divinité de l'humiliation où les autres l'avoient mise. Nous regardons l'idolâtrie comme la religion des peuples grossiers; et la religion qui a pour objet un être spirituel, comme celle des peuples éclairés.

Quand, avec l'idée d'un être spirituel suprême qui forme le dogme, nous pouvons joindre encore des idées sensibles qui entrent dans le culte, cela nous donne un grand attachement pour la religion, parce que les motifs dont nous venons de parler se trouvent joints à notre penchant naturel pour les choses sensibles. Aussi les catholiques, qui ont plus de cette sorte de culte que les protestants, sont-ils plus invinciblement attachés à leur religion que les protestants ne le sont à la leur, et plus zélés pour sa propagation.

Lorsque a le peuple d'Ephèse eut appris que les pères du concile avoient décidé qu'on pouvoit appeler la Vierge mère de Dieu, il fut transporté de joie; il baisoit les mains des évêques; il embrassoit leurs genoux tout retentissoit d'accla

mations.

Quand une religion intellectuelle nous donne encore l'idée d'un choix fait par la divinité, et

a Lettre de S. Cyrille.

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d'une distinction de ceux qui la professent d'avee ceux qui ne la professent pas, cela nous attache beaucoup à cette religion. Les mahométans ne seroient pas si bons musulmans, si d'un côté il n'y avoit pas de peuples idolâtres qui leur font penser qu'ils sont les vengeurs de l'unité de Dieu, et de l'autre des chrétiens, pour leur faire croire qu'ils sont l'objet de ses préférences.

:

a

Une religion chargée de beaucoup a de pratiques, attache plus à elle qu'une autre qui l'est moins on tient beaucoup aux choses dont on est continuellement occupé; témoin l'obstination tenace des mahométans et des Juifs, et la facilité qu'ont de changer de religion les peuples barbares et sauvages, qui, uniquement occupés de la chasse ou de la guerre, ne se chargent guère de pratiques religieuses.

Les hommes sont extrêmement portés à espérer et à craindre; et une religion qui n'auroit ni enfer ni paradis ne sauroit guère leur plaire. Cela se prouve par la facilité qu'ont eue les religions

a

Ceci n'est point contradictoire avec ce que j'ai dit au chapitre pénultième du livre précédent: ici je parle des motifs d'attachement pour une religion, et là des moyens de la rendre plus générale.

b Cela se remarque par toute la terre. Voyez sur les Turcs les Missions du Levant; le Recueil des Voyages qui ont servi à l'établissement de la compagnie des Indes, tome III, part. I, p. 201, sur les Maures de Batavia; et le père Labat, sur les Nègres mahométans, etc.

étrangères à s'établir au Japon, et le zèle et l'amour avec lesquels on les y a reçues a.

Pour qu'une religion attache, il faut qu'elle ait une morale pure. Les hommes fripons en détail sont en gros de très-honnêtes gens; ils aiment la morale; et si je ne traitois pas un sujet grave, je dirois que cela se voit admirablement bien sur les théâtres on est sûr de plaire au peuple par les sentiments que la morale avoue, et on est sûr de le choquer par ceux qu'elle réprouve.

si

Lorsque le culte extérieur a une grande, magnificence, cela nous flatte et nous donne beaucoup d'attachement pour la religion. Les richesses des temples et celles du clergé nous affectent beaucoup. Ainsi la misère même des peuples est un motif qui les attache à cette religion, qui a servi de prétexte à ceux qui ont causé leur misère.

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PRESQUE tous les peuples policés habitent

dans des maisons. De-là est venu naturellement l'idée de bâtir à Dieu une maison où ils puissent

a La religion chrétienne et les religions des Indes; cellesci ont un enfer et un paradis, au lieu que la religion des Sintes n'en a point.

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