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Vous vous privez de l'avantage que vous a

,, donné sur les mahométans la manière dont

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leur religion s'est établie. Quand ils se van,, tent du nombre de leurs fidèles, vous leur dites ,, que la force les leur a acquis, et qu'ils ont étendu leur religion par le fer: pourquoi donc établissez-vous la vôtre par le feu?

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Quand vous voulez nous faire venir à vous, nous vous objectons une source dont vous ,, vous faites gloire de descendre. Vous nous répondez que votre religion est nouvelle, mais ,, qu'elle est divine; et vous le prouvez parce qu'elle s'est accrue par la persécution des païens de vos martyrs mais aujourd'hui ,, vous prenez le rôle des Dioclétiens, et vous ,, nous faites prendre le vôtre.

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et par par le

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sang

Nous vous conjurons, non pas par le Dieu puissant que nous servons vous et nous, mais ,, par le Christ que vous nous dites avoir pris la ,, condition humaine pour vous proposer des ,, exemples que vous puissiez suivre; nous vous conjurons d'agir avec nous comme il agiroit lui-même, s'il étoit encore sur la terre. Vous ,, voulez que nous soyons chrétiens, et vous ne voulez pas l'être.

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Mais, si vous ne voulez pas être chrétiens, ,, soyez au moins des hommes traitez-nous comme vous feriez, si, n'ayant que ces foibles lueurs de justice que la nature nous donne, vous n'aviez pas une religion pour vous conduire et une révélation pour vous éclairer.

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"

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Si le ciel vous a assez aimés pour vous faire ,, voir la vérité, il vous a fait une grande grace: mais est-ce aux enfants qui ont l'héritage de leur père de haïr ceux qui ne l'ont pas eu?

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Que si vous avez cette vérité, ne nous la ,,cachez pas par la manière dont vous nous la proposez. Le caractère de la vérité, c'est son triomphe sur les coeurs et les esprits, et non ,, pas cette impuissance que vous avouez, lors,, que vous voulez la faire recevoir par des ,, supplices.

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Si vous êtes raisonnables, vous ne devez pas nous faire mourir, parce que nous ne voulons ,, pas vous tromper. Si votre Christ est le fils de Dieu, nous espérons qu'il nous récompensera de n'avoir pas voulu profaner ses mystères; et nous croyons que le Dieu que nous servons vous et nous, ne nous punira pas de ce que nous avons souffert la mort pour une religion qu'il nous a autrefois donnée, parce que nous ,, croyons qu'il nous l'a encore donnée.

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Vous vivez dans un siècle où la lumière naturelle est plus vive qu'elle n'a jamais été, où la philosophie a éclairé les esprits, où la mo,, rale de votre évangile a été plus connue, où ,, les droits respectifs des hommes les uns sur les ,, autres, l'empire qu'une conscience a sur une ,, autre conscience, sont mieux établis. Si donc ,, vous ne revenez pas de vos anciens préjugés qui, si vous n'y prenez garde, sont vos pas,,sions, il faut avouer que vous êtes incorrigibles,

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,,incapables de toute lumière et de toute instruc,, tion; et une nation est bien malheureuse qui donne de l'autorité à des hommes tels que

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,, vous.

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Voulez-vous que nous vous disions naïve,,ment notre pensée? Vous nous regardez plutôt ,, comme vos ennemis que comme les ennemis de votre religion; car si vous aimiez votre religion, vous ne la laisseriez pas corrompre par ,, une ignorance grossière.

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Il faut que nous vous avertissions d'une ,, chose; c'est que si quelqu'un, dans la postérité, ,, ose jamais dire que dans le siècle où nous vivons les peuples d'Europe étoient policés, on vous citera pour prouver qu'ils étoient barba„, res; et l'idée que l'on aura de vous sera telle, qu'elle flétrira votre siècle, et portera la haine ,, sur tous vos contemporains. "

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CHAPITRE XIV.

Pourquoi la religion chrétienne est si odieuse au Japon.

JA

'AI parlé du caractère atroce des ames japonaises. Les magistrats regardèrent la fermeté qu'inspire le christianisme, lorsqu'il s'agit de renoncer à la foi, comme très-dangereuse on crut voir augmenter l'audace. La loi du Japon punit

a Liv. VI, ch. XXIV.

:

sévèrement la moindre désobéissance. On or donna de renoncer à la religion chrétienne : n'y pas renoncer, c'étoit désobéir: on châtia ce crime, et la continuation de la désobéissance parut mériter un autre châtiment.

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Les punitions chez les Japonais sont regardées comme la vengeance d'une insulte faite au prince. Les chants d'alégresse, de. nos martyrs parurent être un attentat contre lui le titre de martyr intimida les magistrats; dans leur esprit, il signifioit rebelle; ils firent tout pour empêcher qu'on ne l'obtint. Ce fut alors que les ames s'effarouchèrent, et que l'on vit un combat horrible entre les tribunaux qui condamnèrent et les accusés qui souffrirent, entre les lois civiles et celles de la religion.

CHAPITRE X V.

De la propagation de la religion.

Tous les peuples d'Orient, excepté les ma

hométans, croient toutes les religions en ellesmêmes indifférentes. Ce n'est què comme changement dans le gouvernement qu'ils craignent l'établissement d'une autre religion. Chez les Japonais, où il y a plusieurs sectes, et où l'état a eu si long-temps un chef ecclésiastique, on ne dispute jamais sur la religion . Il en est de même

a Voyez Kempfer.

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chez les Siamois a. Les Calmouks b font plus; ils se font une affaire de conscience de souffrir toutes sortes de religions. A Calicut, c'est une maxime d'état, que toute religion est bonne c.

Mais il n'en résulte pas qu'une religion apportée d'un pays très-éloigné, et totalement différent de climat, de lois, de moeurs et de manières, ait tout le succès que sa sainteté devroit lui promettre: cela est sur-tout vrai dans les grands empires despotiques: on tolère d'abord les étrangers, parce qu'on ne fait point d'attention à ce qui ne paroît pas blesser la puissance du prince; on y est dans une ignorance extrême de tout. Un Européen peut se rendre agréable par de certaines connoissances qu'il procure: cela est bon pour les commencements. Mais, sitôt que l'on a quelque succès, que quelque dispute s'élève, que les gens qui peuvent avoir quelque intérêt sont avertis; comme cet état par sa nature dem...nde sur-tout la tranquillité, et que le moindre trouble peut le renverser, on proscrit d'abord la religion nouvelle et ceux qui l'annoncent; les disputes entre ceux qui prêchent venant à éclater, on commence à se dégoûter d'une religion dont. ceux qui la proposent ne conviennent pas.

a Mémoires du comte de Forbin.

b Histoire des Tattars, part. V.

c Voyage de François Pyrard, ch. XXVII.

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