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il n'en parlait point sans répandre des larmes de tendresse et de compassion. Ce mystère, qui nous laisse si froids, si secs et si stériles produisait en lui les plus admirables sentimens de componction. D'où vient cette extrême différence entre lui et nous ? C'est que nous pensons à peine aux souffrances de Jésus-Christ, et que Paul de la Croix les avait méditées avec la foi la plus vive et la piété la plus sincère. Comme lui, nous en retirerons des fruits de salut abondans si nous suivons le conseil de saint Augustin: « Que celui, dit ce Père, qui a été pour vous » attaché tout entier à la croix soit tout entier fixé dans » votre cœur. »

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S. MONON, HERMITE ET MARTYR.

Tiré de Barth. Fisen, Flores eccl. Leod., p. 454; Bertholet, Hist. de Luxembourg, t. II, p. 149; Molani Nat. SS. Belgii, p. 230; item addit. ad Usuard; King, in Calend., et sur-tout Ghesquière, Acta SS. Belgii selecta, t. II, p. 418-421.

Vers l'an 645.

S. MONON, dont le corps repose à Nassogne (1), près de Saint-Hubert, est très-célèbre dans le duché de Luxembourg. Par suite d'une inspiration divine, il quitta l'Ecosse sa patrie, entreprit un pélerinage à Rome, revint par la Gaule, et alla chercher une retraite au milieu des forêts des Ardennes, sur la petite rivière de Nassogne, appelée

(1) Autrement Nassoin, mais nullement Nassaw ou Nassau. Selon le P. Wastelain (Descript. de la Gaule-Belgique, p. 230, édit. 1788). C'est l'ancien Nassonacum, où l'Empereur Valentinien donna vers l'an 372 deux lois rapportées dans le Code Théodosien, tom. II Gothofredi p. 59 et 581.

par les habitans Fridier. Il bâtit un oratoire dans cette solitude, et y assembla les peuples voisins, pour les instruire dans les mystères de la foi. Son zèle fut couronné par de nombreuses conversions. Ces néophytes admiraient la sainteté de Monon; cependant il rencontra aussi quelques cœurs vicieux et endurcis, auxquels la conduite vertueuse du fervent hermite, non-seulement n'était pas agréable, mais était devenu un objet de haine. Ils vinrent le surprendre dans sa cabane, et l'assassinèrent d'une manière atroce. Fisen place cet événement en 636, sous l'épiscopat de Jean l'Agneau, quoique d'autres écrivains le reculent jusqu'au temps de S. Remacle (2).

On bâtit une église en l'honneur de la Mère de Dieu à Nassogne, sur le tombeau de S. Monon, rendu célèbre par beaucoup de miracles; on y exposa les reliques du saint hermite à la vénération des fidèles, et ensuite le Roi Pepin y établit une collégiale, composée d'un prévôt et de six chanoines (3). Une église voisine de la ville de SaintAndré en Ecosse fut aussi dédiée sous l'invocation de ce Saint. Elle subsiste encore sous le nom de Monon's kirk.

(2) Nous préférons le sentiment de Ghesquière qui place sa mort entre l'année 642 et 645.

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(3) On prétend que les biens que Pepin leur légua, consistaient dans toutes les dimes entre les rivières d'Ourt et de la Lesse; mais ce legs n'est pas constaté d'une manière suffisante. La seigneurie de Nassogne cut différentes vicissitudes et différens maîtres: Gérard de Luxembourg, seigneur de Durbuy, donna l'affranchissement à ses habitans en 1274. Voyez le P. Bertholet, Hist. de Luxembourg, tom. VI, pag. 118, et tom. VII, pag. 48.

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19 Octobre.

S. PIERRE D'ALCANTARA, RELIGIEUX DE L'ORDRE DE S. FRANÇOIS.

Tiré de sa vie, écrite par le P. Jean de Sainte-Marie, en 1619, et par le P. Martin de Saint-Joseph, en 1644; de sainte Thérèse, dans le chapitre 27 de sa propre vie; de la vie du Saint, donnée en français par le P. Fr. Courtot, cordelier, Paris, 1670, in-12. Voyez Hélyot, Hist. des ord. relig., t. I, p. 137, et la continuation des Annales des Franciscains, par Wadding, de l'édition de Rome, 1740, t. XVIII, ad an. 1542, n. 5-18, p. 41.

L'AN 1562.

JÉSUS-CHRIST nous déclare lui-même que l'esprit et la pratique constante de la pénitence sont le fondement de la vie spirituelle. Cette maxime importante, presque généralement inconnue dans ces derniers siècles, même parmi ceux qui se disent chrétiens, fut la règle à laquelle saint Pierre d'Alcantara conforma toujours sa conduite. Ainsi nous trouverons dans sa vie de quoi confondre notre lâcheté et les vains prétextes dont nous cherchons à la couvrir.

Il naquit en 1499 à Alcantara, petite ville de la province d'Estramadure en Espagne. Son père, nommé Alphonse Garavito, était magistrat et gouverneur de la ville. Sa mère sortait d'une famille noble, et elle se distinguait comme son mari par ses vertus et sa piété. A peine le jeune Pierre faisait-il usage de sa raison, qu'il paraissait déjà rempli d'amour pour Dieu. Sa fidélité à accomplir ses devoirs, sa ferveur et son application à la prière le faisaient regarder comme une espèce de prodige. La mort lui enleva son père lorsqu'il finissait son cours de philosophie à Alcantara; quelque temps après il fut envoyé à Salamanque pour y étudier le droit canonique. Pendant les deux ans qu'il passa dans l'université de cette ville, il partagea

régulièrement son temps entre l'étude, la prière et le service des pauvres dans les hôpitaux.

En 1513, il fut rappelé dans sa patrie. Son premier soin fut de délibérer sur le genre de vie qu'il embrasserait. D'un côté, la fortune qui l'attendait dans le monde se présentait à lui; mais de l'autre, il considérait les dangers auxquels on est exposé dans le siècle, les avantages et le bonheur de la solitude. Enfin la grâce l'emporta, et il résolut d'embrasser l'état religieux. Il fixa son choix sur l'ordre de saint François, et il en prit l'habit à seize ans, dans le couvent de Manjarez, situé sur les montagnes qui séparent la Castille du Portugal. On le distingua des autres moines par son zèle pour les humiliations, pour les veilles, pour le jeûne, pour les autres pratiques de la pénitence. Sa ferveur était si grande, que les plus rigoureuses austérités n'avaient rien d'effrayant pour lui. Son détachement était si parfait et si entier, qu'il était véritablement crucifié au monde, et qu'il ne trouvait que peine et affliction dans tout ce qui flatte les sens et la vanité des hommes. Son union avec Dieu était si continuelle, que rien n'était capable de l'interrompre. On lui donna divers emplois dont il s'acquitta à la plus grande satisfaction de ses supérieurs. Il veillait si exactement sur ses sens, et sur-tout sur ses yeux, qu'il fut un temps considérable sans savoir comment l'église du couvent était faite. Le supérieur l'ayant repris de ce que depuis plusieurs mois qu'on lui avait confié le soin du réfectoire, il ne servait point aux frères le fruit qui était dans sa dépense, il répondit avec humilité qu'il n'avait point regardé le plancher où les fruits étaient suspendus, comme il se pratique dans le pays, sur-tout par rapport aux grappes de raisin que l'on garde après les avoir fait sécher. Il avoua depuis à sainte Thérèse, qu'il avait été trois ans dans une maison sans connaître les frères autrement que par leur voix. Depuis son entrée dans

l'état religieux jusqu'à sa mort, il ne regarda jamais aucune femme en face. Pendant plusieurs années, il ne vécut que de pain trempé dans de l'eau, et d'herbes insipides; et lorsqu'il menait la vie hérémitique, il en faisait bouillir une grande quantité à la fois, afin de donner moins de temps au soin de son corps. Il ne faisait alors qu'un repas léger par jour, et il lui arriva souvent de passer trois jours de suite sans prendre aucune nourriture. Les grandes fêtes, il ajoutait quelquefois à sa portion d'herbes une espèce de potage fait avec du sel et du vinaigre. Il ne buvait que de l'eau, encore n'en buvait-il qu'en petite quantité. A force de se mortifier, il en était venu au point de perdre presqu'entièrement le sens du goût; en sorte qu'il ne savait ordinairement ce qu'il mangeait. Un cilice étendu par terre lui servait de lit; il dormait peu; et le repos qu'il accordait à la nature, il le prenait communément assis et la têté appuyée contre la muraille. La longueur et la continuité de ses veilles étaient incroyables; il s'était accoutumé par degrés à ce genre de mortification, afin de ne point endommager sa santé; et comme il était d'une constitution robuste, il fut en état de la supporter. Il eut de violentes tentations : mais il en triompha par la prière et par l'humilité.

Quelques mois après sa profession, Pierre d'Alcantara fut envoyé dans un couvent situé près de Belviso, dans un lieu solitaire. Il s'y construisit, à quelque distance de la communauté, une cellule avec des branches d'arbre et de la terre il y pratiqua des austérités extraordinaires qui ne furent connues que de Dieu. Trois ans après, on le fit supérieur d'un petit couvent qui venait d'être fondé à Badajoz, métropole de l'Estramadure, quoiqu'il n'eût encore que vingt ans. Le temps de sa supériorité expiré, son provincial lui dit de se préparer à recevoir les saints ordres. Il demanda inutilement un plus long délai. Il fut ordonné

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