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Et toi a, dont la vertu brilla perfécutée, Toi qui prouvas un DIEU, mais qu'on nommait Athée, Martyr de la raifon, que l'envie en fureur

Chaffa de fon pays par la main de l'erreur, Reviens, il n'eft plus rien qu'un Philofophe craigne, Socrate eft fur le Throne, & la vérité règne.

Cet or qu'on entaffait, ce pur fang des Etats, Qui leur donne la mort en ne circulant pas, Répandu par fes mains au gré de fa prudence, Va ranimer la vie, & porter l'abondance.

Il ne recherche point ces énormes foldats, Ce fuperbe appareil inutile aux combats, Fardeaux embarraffans, Coloffes de la guerre, Enlevés à prix d'or aux deux bouts de la Terre; Il veut dans fes guerriers le zèle & la valeur, Et fans les mefurer, juge d'eux par le cœur. Ainfi pense le juste, ainsi règne le fage:

Mais il faut au grand-homme un plus heureux partage; Confulter la prudence, & fuivre l'équité,

Ce n'eft encor qu'un pas vers l'immortalité.

Qui n'est que jufte est dur, qui n'est que fage eft triste; Dans d'autres fentimens l'héroïfme confifte;

a Le Profeffeur Wolf, perfécuté comme Athée par les Théologiens de l'Univerfité de Hall, chaffé par Frederic II. fous peine d'être pendu, & fait Chan

Le

celier de la même Univerfité à l'avénement de Fréderic III.

b Un de ces foldats, qu'on nommait Petit-Jean, avait été acheté 24000. liv.

Le Conquérant eft craint, le fage est eftimé ;
Mais le bienfaifant charme, & lui feul eft aimé;
Lui feul eft vraiment Roi, fa gloire eft toujours pure;
Son nom parvient fans tache à la race future.
A qui se fait chérir faut-il d'autres exploits?
Trajan non loin du Gange enchaîna trente Rois;
A peine a-t-il un nom fameux par la victoire :
Connu par fes bienfaits, fa bonté fait fa gloire.
Jérufalem conquife, & fes murs abattus,
N'ont point éternifé le grand nom de Titus.
Il fut aimé, voilà fa grandeur véritable.

O vous qui l'imitez, vous fon rival aimable,
Effacez le Héros dont vous fuivez les pas;
Titus perdit un jour, & vous n'en perdrez pas.

E

A U

DE P......

R. DE

Ce 20. Avril 1741.

H bien! mauvais plaifans, critiques obftinés, Prétendus beaux-efprits à médire acharnés, Qui parlant fans penfer, fiers avec ignorance, Mettez légérement les Rois dans la balance; Qui d'un ton décifif, auffi hardi que faux, Affûrez qu'un favant ne peut être un Héros; Ennemis de la gloire & de la poëfie, Grands critiques des Rois, allez en Siléfie: Voyez cent bataillons près de Neifs écrafés: C'eft-là qu'eft mon Héros. Venez, fi vous l'ofez. C'eft lui-même, c'eft lui, dont l'ame univerfelle Courut de tous les Arts la carrière immortelle ; Lui qui de la Nature a vû les profondeurs, Des Charlatans dévots confondit les erreurs; Lui qui dans un repas, fans foins & fans affaire, Paffait les ignorans dans l'art heureux de plaire; Qui fait tout, qui fait tout, qui s'élance à grands pas Du Parnaffe à l'Olympe, & des jeux aux combats. Je fai, que Charle Douze, & Guftave, & Turenne, N'ont point bu dans les eaux qu'épanche l'Hypocrène : Mais enfin ces guerriers, illuftres ignorans,

En

En étant moins polis, n'en étaient pas plus grands.
Mon Prince eft au-deffus de leur gloire vulgaire ;
Quand il n'eft point Achille, il fait être un Homère.
Tour-à-tour la terreur de l'Autriche & des fots,
Fertile en grands projets, auffi-bien qu'en bons mots,
Et riant à la fois de Genève & de Rome,

Il parle, agit, combat, écrit, règne en grand - homme.
O vous qui prodiguez l'efprit & les vertus!
Repofez-vous, mon Prince, & ne m'effrayez plus;
Et quoique vous fachiez tout penfer & tout faire,
Songez que les boulets ne vous respectent guère
Et qu'un plomb dans un tube entaffé par des fots,
Peut caffer d'un feul coup la tête d'un Héros,
Lorfque multipliant fon poids par sa viteffe,
Il fend l'air qui réfifte & pouffe autant qu'il preffe.
Alors privé de vie, & chargé d'un grand nom,
Sur un lit de parade étendu tout du long,
Vous iriez triftement revoir votre patrie.
O Ciel que ferait-on dans votre Académie?
Un dur Anatomiste, élève d'Atropos

Viendrait fcalpel en main diffequer mon Héros :
La voilà, dirait-il, cette cervelle unique,
Si belle, fi féconde & fi philofophique.
Il montrerait aux yeux les fibres de ce cœur
Généreux, bienfaifant, jufte, plein de grandeur.
Il couperait.... mais non, ces horribles images
Ne doivent point fouiller les lignes de nos pages.
Confervez, ô mes Dieux! l'aimable Fréderic,

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Four fon bonheur, pour moi, pour le bien du public.
Vivez, Prince, & paffez dans la paix, dans la guerre,
Surtout dans les plaifirs, tous les Ics de la terre,
Théodoric, Ulric, Jenferic, Alaric,

Dont aucun ne vous vaut felon mon pronoftic.
Mais lorsque vous aurez de victoire en victoire
Arrondi vos Etats, ainfi que votre gloire,
Daignez vous fouvenir, que ma tremblante voix,
En chantant vos vertus, préfagea vos exploits.
Songez bien qu'en dépit de la grandeur suprême,
Votre main mille fois m'écrivait, Je vous aime.
Adieu, grand Politique, & rapide vainqueur,
Trente Etats fubjugués ne valent point un cœur.

AU

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