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Que vos chants de victoire animent tous nos chants.
Les palmes dans les mains nos peuples vous attendent;
Nos cœurs volent vers vous, nos regards vous demandent;
Vos mères, vos enfans, près de vous empreffés,
Encor tout éperdus de vos périls paffés,

Vont baigner dans l'excès d'une ardente allegreffe,
Vos fronts victorieux de larmes de tendreffe.
Accourez, recevez à votre heureux retour,
Le prix de la vertu par les mains de l'amour,

POE

POEMES

SUR LE

DESASTRE DE LISBONNE,

ET SUR

LA LOI NATURELLE;

AVEC DES PREFACES,

DES NOTES, &c.

PREFACE

DE

L'AUTEUR.

S! jamais la queftion du Mal Physique a mérité l'at

nu,

tention de tous les hommes, c'eft dans ces événemens funeftes qui nous rappellent à la contemplation de notre faible nature, comme les peftes générales qui ont enlevé le quart des hommes dans le Monde conle tremblement de terre qui engloutit quatre-cent mille perfonnes à la Chine en 1699., celui de Lima & de Callao, & en dernier lieu celui du Portugal & du Royaume de Fez. L'axiome, Tout est bien, paraît un peu étrange à ceux qui font les témoins de ces défaf tres. Tout eft arrangé, tout eft ordonné, fans doute, par la Providence; mais il n'eft que trop fenfible, que tout depuis longtems n'eft pas arrangé pour notre bienêtre préfent.

Lorfque l'Illuftre Pope donna fon Efay fur l'homme, & qu'il dévelopa dans fes vers immortels les fyftèmes de Leibnitz, du Lord Shaftersburi, & du Lord Boling

brooke,

brooke, une foule de Théologiens de toutes les Communions attaqua ce fyftême. On fe revoltait contre cet Axiome nouveau, que Tout est bien, que l'homme jouït de la feule mefure du bonheur dont fon être foit susceptible, &c... Il y a toujours un fens dans lequel on peut condamner un écrit, & un fens dans lequel on peut l'approuver. Il ferait bien plus raifonnable de ne faire attention qu'aux beautés utiles d'un ouvrage, & de n'y point chercher un fens odieux. Mais c'eft une des imperfections de notre nature, d'interpréter malignement tout ce qui peut être interprété, & de vouloir décrier tout ce qui a eu du fuccès.

On crut donc voir dans cette propofition, Tout eft bien, le renversement du fondement des idées reçues. Si Tout est bien, difait-on, il eft donc faux que la nature humaine foit déchue. Si l'ordre général exige que tout foit comme il eft, la nature humaine n'a donc pas été corrompue; elle n'a donc pas eu befoin de Rédempteur. Si ce Monde, tel qu'il eft, eft le meilleur des Mondes poffibles, on ne peut donc pas espérer un avenir plus heureux. Si tous les maux dont nous fommes accablés font un bien général, toutes les Nations policées ont donc eu tort de rechercher l'origine du mal Physique & du mal Moral. Si un homme mangé par les bêtes féroces fait le bien-être de ces bêtes, & contribue à l'ordre du Monde; fi les malheurs de tous les particuliers ne font que la fuite de cet ordre général & néceffaire; nous ne fommes donc que des roues qui

fer

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